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Le lieu où fut fondée la ville de Mycènes était on ne peut mieux choisi comme position militaire;
aussi, cette ville ne parait-elle avoir été construite dans cet endroit que pour fermer le passage^qui sert
de communication entre, les plaines d’Argos et celles de Némée et de Corinthe. Le nom de son valeureux
fondateur Persée; »son Acropole; placée sur un mamelon escarpé, protégée par de hautes et belles
murailles, doivent encore appuyer cette opinion.
Afin de faire connaître la situation dans laquelle Pausanias à trouvé Mycènes, et pour mieux fixer
l’attention de nos lecteurs sur ce qui fait le sujet de notre travail , nous citerons textuellement ce que
dit d intéressant ce célèbre voyageur. « On y distingue encore quelques restes de* son enceinte, et entre
« autres une porte , sur laquelle il y a deux lions que*l’on croit avoirété faits par les Cyclopes, aussi bien
« que les murs de.Tirynthe, du temps de Proetus. On vous montre encore la fontaine de Persée, et des
«chambres souterraines ou l’on dit qu’Atrée et ses enfants cachaient leurs trésors. Près delà est le
« tombeau d’Atrée et de tous peux qu’Agamemnon ramena avec lui ¿près la prise de. Troie et
« qu’Égisthe fit périr dans le festin qu’il leur donna : il fout en excepter éfclui de Çasfondre que, les
« Lacédémohiens qui habitent Amyclees prétendent avoir Chez eux; ce qui amenait un sujet de dispute
« entre eux et les habitants de Mycènes. Oñ voit encore le, tombeau d’Agamemnon et celui d’Eurymédôn,
" son écuyerl;f¡mais Télédamus et Pélops, les deux junjpux que Cassandre mit au monde et qu’Égisthe
* ¿gorgea dans leur enfonce, n’ont qu’une même sépulture. Je vis aussi le tombeamd’Électre; Oreste
«l’avait mariée à Pÿlade, et selon le témoignage; d’Hellanicus, elle en èut deux enfants; savoir:
« ItrôphiusetMédon. Quantà Clytenmestre ét à Égisthe, ils ont leur sépulture hors dés murs, n’étant
« pas dignes de 1 avoir au meme lieu qu’Agamemnon et que ceux qui furent-massacrésavec lui1. «
Nous allons suivre l’ordre adopté par Pausanias dans sa description, et parler d’abord des restes du
péribole de la citadelle. Cè qu’il faut bitn rémarquer dans là construction de ë ëS murailles , .c’est la
.variété d appareils qüon y a tour à to'ur employés; ce qui a fait présumer que ces constructions'
avaient été faites à des époques différentes. C’est ainsi qu’on voit l’un à côté de l’autre ( Planche 65 **
%• V ) , des murs faits avec des blocs bruts, dont les interstices sontremplis avec des pierres plus petites;
et auprès d’eux, des muradles construites en pierres tcaidées po^gonalement, ayant presque toujours
cinq joints, faits avec la plus grande perfection, et/enfin dés pierres placées par assises horizontales,
-Comme il y en a aux avenues de la Pórte dés Pions et à celle du Grand Trésor.
La construction des premiers murs dont nous venons dé parler est en tout sêmblable à celle des
murs de Tirynthe, qui sont en pierres plus grosses, mais dènt l’arrangement est le même. Ce sont cés
ouvrages que l’on attribue aux CydÉpe#, nm parce qqils ont été faits par eux, mais parce que, dans
les premiers temps où les Grecs construisaient, toûtçé qui causait de l ’admiration, soit paÿ là grandeur,
soit par la perfection, était attribué à leurs travaux, dont la mythologie nous apprend lès merveilles.
Quant à la seconde et à la troisième espèce de murailles', nous les retrouvons dans un grand nombre
de villes grecques.
Suivant M. Petit-Radel, le premier qui ait éveillé l’attention des savants sur cette question importante;
Ces diverses constructions indiquent chacune par leur nature une époque précise, êt forment autant de
jalons historiques à l’aide desquels on peut établir la chronologie d^Swilles. Cette opinion est aussi celle
de plusieurs habiles archéologues que nous sommes loin de vouloir contredire. Cependant, d’après nôs
diverses explorations, nous ne pouvons nous empêcher d’adméttre que, dans des constructions de
moindre importance que celles des murs dé villes ou de monumentssacrés, les Grecs aient adopté, peut-
etrè bien a des époques différentes, mais aussi suivant la'forme naturelle dés matériaux, tantôt la
formé polygonale, tantôt 1 appareil par assises horizontales et joints inclinés ou verticaux, tantôt le
mélange de ces deux systèmes. Nous rappellerons ic i, comme venant à.l’appui dé notre assertion
l’exemple que nous avons rencontré sur le mont DiaffOrti ou Lycée, qui, tout en présentant les restes
d une Construction foite avec le plus grand soin, laisse voir plusieurs rangées d’assises horizontales,
avec joints verticaux à refends en forme de biseau, et appareillées de longueur, au-dessus desquelles
on a cependant placé des pierres taillées<polygonalement.
Avant dé nous occuper d une autre ruine, nous ajouterons ce fait curieux, observé par nous dans une
de nos tournées dans le Magne, savoir, que les Grecs modernes, sansdoute pour imiter les construc-
1 Pausanias, Corinthie, liv. I I , chap. xti.
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tions anciennes qu’ils ont toujours sous les yeux , font encore de nos jours des murs de soutènement
qui pourraient passer pour'être cyclôpéens , tant leur ressemblance est grande avec ces derniers. Enfin,
pour terihiner ce que nous avons à dire sur cette importante question, que nous ne prétendons traiter
ici-que fort superficiellement, nous ferons remarquer à ceux q ui, comme nous, crôiront que la ville de
Mycènes pouvait être une position militaire, que les murailles n’étaient point flanquées de tours, et
qù’à cette époque on ne connaissait pas encore ce système de défense, qui parait avoir été adopté depuis
pan des villes plus:récentes. Tirynthe et la citadelle de Larissa à Argos, qui furent bâties dans un temps
aussi reculé que Mycèhès,n’en ont pas davantage, et nous serions disposés à croire que les villes.qui,
comme cés dernières, remontent aune haute antiqiîité, n’en avaient pas dans l’originè > et que si elles
en ont eu depuis, ce n’est que parce qu’elles ont du suivre le progrès des villes nouvelles quelles pouvaient
avoir pour rivales/.
Le caractère particulier de tout ce qui reste à Mycènes porte à croire que la race qui a construit
Gëtte ville était‘étrangère au pays. C’est en effet ce que l’histoire paraît, indiquer; rien ne peut mieux
nous prouver que ces ruinéfe existaient dans lés;§iècles les plus reculé's, que Ce cachet d’originalité dont
elles sont seules empreintes. Rien, en Grèce ; ne ressemble aux lions sculptés au-dessus de la porté de la
citadelle, qui très-probablement est aujourd’hui dans le même état, que du temps de Pausanias, et que
cet-auteur regarde^omme étant l’ouvrage des Cyclopes. Sur le mur latéral de cette Acropole, on retrouve
■ . aussi une porte plus petite, recouverte de, son linteau ;, et n’ayant aucune, sculpture au-dessus.
A peu de distance de la citadelle,.et'auprès d’elle,, sur-le penchant de la montagne», l’étonnement
redouble .à l’aspect des ruines qui y sont placées : ce sont de vastes constructions en pierre bâties sur un
plan circulaire, et dont les voûtes présentent une forme parabolique-; Ces-constructions, furent érigées
d’après ce principe barbare d’enfouir des trésors sous terre, pour les conserver, et cette circonstance
semblerait prouver qu’elles ont dû appartenir aux premiers temps de la société. La construction la moins
v ëndômmageè, celle qui, dans ce moment, fait le sujet de notre examen, a été. regardée par différents
‘ voyageurs modernes comme étant \c Tombeàu d’Agamemnon, ou le Trésor des Atrides. •
Il serait, difficile dé contester cette dpinion; cependant, on est disposé à croire què le tombeau
d’Agamemnon devait être, ou plus riche ou plus grand que ceux qui l’entouraient. Sans adopter entièrement
cétte manière de voir, nous dirons que la Voûte de la ruine placée près.de là porte des lions
paraît ètre de la même grandeur que celle dont nous nous- occupons : ce qui: ferait plutôt présumer,
d’après cette ressemblance, que ces deux monuments devaient être , ou les chambres souterraines dans
lesquelles Afréë et sés enfants cachaient, dit-on, leurs trésors^ ou les tombeaux des compagnons
qu’Agamemnon ramena avec lui après la prise de Troie, ou le tombeau d’Eurymédon, son écuyer,
ou Celui de Télédamus et de Pélops, enfants de Cassandre, ou enfin le tombeau d’Electre. H; n’est donc
pas.supposable que Cétte:iCurieùsé;èt simple construction ait été ¡le tombeau du grand roi, ou même
celui d’Atréë, chef de (sa racé, puisque dans cette intéressante ruine rien n’indique la distinction de
. leur. rang. , ,
Parmi les neüftqmbëaux désignés par Pausanias, il en est deux sur lesquels il ne peut y avoir de doute,
en adoptant toutefois comme restes.de l’enceinte de la ville, les fragments de murs indiqués sur le plan
général M r la lettre H ; ;Çë? sont ceujfide Clytemnestre et d’Égisthe, placés en dehors de la ville, et dont
il ne reste plus aujourd’hui que les deux portes recouvertes de.leurs linteaux.
Pendant nos explorations en Laconie, nous avons trouvé, à peu de distance d’Amyclées, vers les bords
de l’Eurotas, un monument, éntièrement semblable à ceux de Mycènes : ce doit être le tombeau de
Cassandre, que l ’histoire place dans cetteprovince.
Espérons qu’un jour, des fouilles faites sur le versant de la montagne où sè trouve l’entrée de la
chambre que nous décrivons, feront connaître les monuments qui doivent êtrëàla suite de celui-ci; et
que leur découverte, en détruisant les doutes dans lesquels nous sommes, permettra aussi aux archéologues
de mieux étudier l’histoire si obscure de cette ancienne cité.
La description que Pausanias nous donne du trésor de Minyas nous fait encore ;pïuç regretter le
silence qu’il conserve sur chacun des monuments de Mycènes, puisqu’il se borne seulement à les
nommer., sans nous faire connaître ce qui les distinguait entre eux. Avec quel intérêt nous aurions aimé
à entendre cet estimable auteur parler de là ressemblance qui existait entre les monuments dont nous
parlons et celui d’Orchomène, qu’il décrit avec une sorte d’admiration! Ce n’est pas sans surprise que