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pour un bouclier, et de la main droite il emporte une femme vêtue d’une
tunique qui ne couvre que la poitrine, et laisse à découvert le corps
et lés jambes, dont les extrémités ainsi que les bras ont disparu.
Le cheval s’avance au pas, e t de son pied droit de devant pèse sur
la tête d’un homme enfoncé dans la terre jusqu’aux épaules.
Caylus voit dans cette statue Une-composition fantastique; je crois,
moi, qu’if faut y reconnaître le dieu de la mort portant dans la
roue l’image la plus immédiate du- cours.'de là vie 8*,'ou plutôt' de
la1 révolution solaire, de -la vic -èt de la mort. C’est au retour dans
lé sein de la mère commune que fait allusion le cheval enfonçant un
hèminc dans la terre, de même que le voyage suprême est indiqué
par la femme que lé dieu impitoyable emporte comme le Xapoç des
Grecs modernes emporte les Tpuçspà naiSéxouXa.
Nous avons vu plus haut que, dans son Apocalypse, saint Jean donne
à ©«tvstToç un cheval pâle, c’est-à-dire.blanc. C’est .aussi la couleur
qu’a sur la plupart des vases peints le cheval destiné .à conduire le
mort aus:. demeures /fortunées,8®.. Le mort va commencer, une nouvelle
vie, e t la couleur blanche annonce cette renaissance, cette apo-
thépse, Les monuments et les textes cités par M. Raoul Roche t te,
dans son Orcstéide 8®, ne peuvent laisser aucun doute à cet égard.
Ainsi les poètes donnent des ailes blanches à Æwcço'po;8’ e tà l’Àurore88,
symboles de la vie et de la renaissance, tandis.que celles d’Êrâepoî8®
et de la Nuit 9° , images de la mort, sont,noires. Sur un" vase.appartenant
au comte PouCtalès-Gorgiér où lesDioscures sont représentés
près de leurs chevaux, l’un de ces chevaux est rouge et l'autre est blanc,
sans doute, dit le savant antiquaire que je viens de nommer, àfin d indiquer
cette alternative d évié et de mort qui distinguait ces deux
frères; sur les monuments, au contraire, où ils figuraient tous deux
comme déifiés, ils étaient réprésentés l’ùn et l’autre sur un cheval
blanc, e t dé là l’épithète de Xtiixi-rrrroi qui leur est donnée p a r Euripide
9“. Cette opposition së retrouvé dans les noms d é Meiavento.;
et de Maxapravo;, donnés aux deux chevaux qu’on avait représentés
combattant sur la stèle funéraire--’du monument érigé on commun
aux Athéniens morts pour leur pays 93, e t dans la doctrine allégorique
des . deux chevaux, l’un bon e t l’autre mauvais, développée
dans le Phèdre de, Platon 9t . Elle se retrouvé aussi dans les bandelettes,
alternativement' blanches et noires, qtii ceignent’des stèles
funéraires sur quelques vases peints 95, e t dans la personnification
dTirvoî e t de ôttvavôç, représentés, l’un blanc e t l’autre noir, sur le
coffre de Cypsélus 9®. Le rapport symbolique de ces deux couleurs,
avec la vie et la mort, n’a point échappé à M. Creuzer 97.
Du reste, le cheval n’est point le symbole unique dù voyagé suprême.
Depuis que le séjour des bienheureux .eut été placé par les
. ‘VAnacty, Od. 4>v. g et,8 i .
t1? d«
PÎOTOÎ Tps/tl ZuXlsdtiî.
Voyez les antres passages anciens cités par Fischer, dans sa note sur ces deux
vers, p. at. — La roue, sur les vases peints et sur les urnes étrusques, est
l'attribut des divinités implacables, de Hémésis, par exemple. Gori, Mus. étr.,
t ni-, ch i n , tab. x v n , fig. I , et lab. x v n , fig. IL Voyez aussi les textes
et les monuments cités par M. Welcker, Ansi. de tlnst. arch., L H, p. 70 et Suiv.
“ Voyez Millin, Peintura dé vases, t. Et, pl. XXX; et Description des antiquités
du cabinet 1 Durand, n° 695.
*.* P. 96, note i, col. a.
*’ Ion , apud Schol. Aristoph. Pac. 83a. &
' " Eurip.Ziwnf. 848-855. .
** Stat. Thebaid. Vin, 1S9. ..
” Eurip. Orest. 178.
” Ce vase n’a pas été compris dans la description que M. Th. Panofka a donnée
des antiques possédées par ce riche amateur.
»* Helcn. 646. ,
” Vausàn. I , ,Z9, 5.,
” X, 3zo', ed. Bipont.
M i l
poètes dans les îles fortunées 9®, les Néréides, l’hippocampe99; le
dauphin, les monstres marins100, les navires10*, se-partagèrent, avec
le cheval, l’honneur de transporter les héros dans leur dernière
demeure, et vinrent à leur.tour figurer sur les tombeaux.
Nous croyons avoir suffisamment prouvé que le cheval, sur les
monuments funéraires, représentait toujours.le cheval de la mort.
Mais tous les monuments où il figure sont-ils funéraires? C’est ce
que je crois pouvoir nier. L’examen attentif e t la.comparaison d’un
grand nombre de stèles, de bas-reliefs e t de vases, m’a convaincu
que presque toujours là-où-, le buste du cheval est placé à une fenêtre
sur le dernier plan, il ne figure que comrne symbole.de la jn o r t imminente,
et pour ajouter une . nouvelle .force aux prières qu’une famille
vient adresser au dieu de la médecine ou à .ses représentants; en
faveur de l’un de ses membres atteint d’une maladie .grave, et que
lé cheval de ©avaro; va emporter, si un .dieu sauveur ne. vient point
à son secours 10“. Ces monuments forment donc une classe à.part, et
doivent être rangés parmi les yapia-njpiajïés tùyal ,'lès aû-voto.
Convaincu qu’au1 point' où .est arrivée,-‘dé -ños jours, la' science
archéologique, on ne doit plus s'en tenir aux généralités, mais que
le temps est venu d’appliquer aux monuments de' l’antiquité figurée
la méthode suivie pour les sciences naturelles, j ’ai recueilli le plus
grand nombre possible d e f a its .je les ai comparés entre eux, j ’ai
noté leurs affinités e t leurs'différences, e t j’ai été conduit' à .reconnaître
qiie là aussi on pouvait distinguer dés classés, des familles, des
divisions, dés subdivisions; qu’enfin fous les monuments funéraires
où l’on trouve le cheval n’indiquaient pas tous la même circonstance
du dernier voyage. De ce travail ést résultée la-classification suiafv
Voeux ou actions de' grâce.
' i . Adieux du mort à sa famille.
Départ,
p l p . Voyage. '
5; Arrivée.
•6. Sacrifice offert par le mort aux divinités infernales.
7. Le mort devant ses jugésl -
8. Repas funèbre offert au héros par sa famille.
9. Monuments chrétiens'où le cheval figure.
■i o.: Monuments païens où le cheval’ n’est pas symbolique.
Un semblable résultat ayant besoin de preuves, je vais passer successivement
en revue chacune de ces Classes, e t recommencer ainsi
l’analyse qui m’a co h d u ità la synthèse.
” DTIancarville, I , 55. Vases de Lamberg, I , XM.
** Pausan. V, 1.7, 4. |
” Sjmbotit, IV, 116. Voyez sur cet emploi altèrnatif du'blanc et- dû noir,
pour caractériser lcsdivinitfe solaires, M. Émeric David, Introd. à l’étude de là
myth., p. ccLXxxr.
” Voyez les témoignages anciens cités par M. RaoulRochette dans son
” Sur un bas-relief dupalais Griroani à Venise, on.voit Pluton sous la *
forme d’un jeune homme monté sur un chova) marin, et serrant dans scs bras
Proscrpinc qui lui résiste. Voy. F. W. Rinck Kunstblatt, 26 mai i8a8,.p. 187.
Dans les Monuments étrusques dTnghirami, ser. i, pl. 6, 10, et pl. 55,
*“ Voyez M. Raoul Rochelle, p. 48 et suiv. du mémoire cité plus haut.
"* Nous ne devons point passer sóús silence une observation qui résulte de tous
les monuments ici rappelés, où l’on .voit uno famille implorant ou remerciant
Esculapc : c’est qu’à l’exception d’un seul bas-relief, tous, nous montrent des
enfants au nombre des suppliants. Faudrait-il,conclure que c’étaitprincipalemcnt
en faveur des enfants qu’on offrait ces sacrifices P.Si ccttc remarque était fondée,
l’apparition du cheval de la mort aurait pour objet d’indiquer dons un sens
général les dangers qui ne cessent de menacer l’enfance jusqu’après le développement
de la puberté.
§ i. Sacrifice d'un bélier. '
H i fants, qui vient.invoqucrîe dieu sauveur. Un jeune sacrificateur n u ,
1 comme.sur.le monument.de Merbaka,-conduit, un agneau à l’autel.
Là aussi le.serpentse dresse devant, la table pour prendre sa part du
1 festin;;sacré-,::et le jeune cadntilë,- dans une nudité:complète, sè
tient pr£sid’un .cratère à la gauche du.dieu,- disposé.à t’emplir de nour
v.Oau sa .Coupe ,’ tandis qu’à sa place accoutdmdc: le .cheval de ©ovaio;
présente satête.comme. pour'annoncer qu’il est au moment d’accomplir
. Je dois, à- plus d’un titre, la préférence au monument recueilli
par la'commission de Morée. Il est'inédit;'il a été le point de départ
de'mes recherches : il est sans contredit le plus complet, le plus remarquable;
le plus exactement reproduit; et-l’un de ceux dont lî&|i|i i
ginalité grecque est le mieux-constatée.
■ L’encadr.ement quc j'ai; décrit plus haut et qu’âvait déjà remarqué
Visconti dans d’autres monuments.grecs,et notamment dans un bas-
relief où-il voit-, avec raison*®m voeu fait par quelque famille .à une
divinité salutaireIo3, se; retrouve sur tous les yapwr-njpia dont j’aurai
occasion dc parler, e t paraît propre à ces témoignages de reconnaisr
.saiiee envers,les- dieux. -Visconti, y voit l’indication - d’un veslibulei.
c’est plutôt l’indication abrégée d’un s'fômgite.-î-'sir.
' Notre, monument à été trouvé dans-le: village de Merbaka, situé
près d’Ar'gos, où l’on sait qu’Esculape avait pjüsieUrssanctuàires. Pau-
sanias en cite deux:10*,' et assure que le plus célébré;, de .tousV.était-
celuioù l’on voyait; de son temps, un groupé représentant Escu-
lape assis et Hygie près de ltii: Or, ce::temple'devait être ¡situé hors
de la ville ; puisqu’il-en parle ümmédiatement ajirès laïmention qu’il
fait du tombeau d’Hyrnéthop où conduisait le Chemin Creux (KoîXd
éàé;) quejl’on rencontrait en sortant du.gymnàse Gylarabis.dont la
position hors des murs de la ville est attestée par Plutarque10f:.et par
Tite-Live,0®. C’est peut-êtrë daus le voisinage, de ce temple célèbre
qu’a été retrouvé le bas-relief qui.nous occupe. Il était bien digne
de figurer dans un aussi magnifique sanctuaire.
Ce qui confirmerait cette cônjecture', c’est qüe dans les deux dir
itrc monument, il est impossible de ne
t Hygie. Leur pose n’est qii’üne variété
.s de parler e t dont Visconti a cru, avec
te copie; assez médiocre, il est vrai, dans
remarquable d’ailleurs par là grâce de sa
iis; Ilygié,' debout près de .’luîi e t la
n gauche appuyée sür l’épa'ule de so a p è re , présente de la droite
une patère au sérpént roulé autour du bâton que le dieui tiènt de
la main gauche. On voit que l’oeuvre de Xénophile e t de Straton';108
n’a subi, sur, notre bas-relief,-'d’autre' modification q'ué,’celle qui était
réclamée par la circonstance du banquet sacré. ' -
1 La victime offerte au dieu ti’a rien qui'doive nous surprendre.
Les victimes sacrifiées à Esculape variaient suivant les localités^ Nous
voyons par le Phédon d e ’Platon,09,'-qu’oriî'.lui sacrifiait u n : coq''à,
Athènes. Pausanias, de son Côté,nous apprend qu’à Titàné on -lui immolait
un tàureau',-un agneau e t un-porc ,I0'; (pa’à Delphes il était
permis delùiisacrifièr toutes sortes d’animaux, excepté des chèvres111;
^ù’il'eh était dé mêtheà'Epidaüre; le centré du-cùlte d’Esculape111,'
sans doute par ce que, d’après ,1a légende locale, ce dieu avait été
noùrri par une chèvre sur le mont T ithion1,3 ; on voit cependant,
dans le même auteur, que cétte exception n’avait point lièu à Cyrènè1
• Le musée,dé Vérone 1,5 contient un sujet tout à fait semblable,
à'quelqüés légères variétés près, d’où l’on pourrait conclure qu’il
provient égalèmënt d’Argos.-Esculape nu jusqu’à la ceinture est sur
: son séant, sa 'main' gauche est appuyée sur' sa poitrine, de la droite
; il? tient un rhyton.' Hygie est assise au pied du lit-et tournée vers le
' 'diéu,'comme pour joindre^^ ses'suppliCations aux prières de la famille
composée de cinq membres, deux hommes , une femme et deux-enÜ
son funèbre ministère, -. .
vinites représentées sur m
pas reconnaître Escùlape t
du groupe dont nous venor
vraisemblance, retrouver ui
- -ùn .‘groupe- du Vatican ,07, .
composition : Esculape est a
§ a. Sacrifice d'un porc.
Le type de cettcseconde-classe. de monuments nous est fourni par
un bas-relief grec du musée deMantoue ,1®, non moins remarquable
que .çelui de Merbaka pour la pureté de la composition et l’élégance
du'dessin. Près du pilastre gauche oh voit Esculape .à démi couché
sur un lectisterniuni. Son visage est majestueux, sa barbe touffue, et
sa chevelure épaisse së sépare sur le.,Iront; son corps est à moitié
nùy e t depuis la ceinture entouré dans un jarge manteau, dont les
plis nombreux retombent dé son bras, gauche, sur; lé'coussin qui
soutient son coude, ©ans sa main gauche est une coupe ” 7, e t dans
la’ droite, qu’il tient élevée eh avant e tu h pcu aü-dessus de sa tête,
un objet rond'm utilé que les'interprétés? du musée de Milan ont
pris pour un rouleau, et qui, à en juger par le bas-relief de Vérone
dont nous venons de parler, e t par les nombreux monuments dont
nous nous occuperons bientôt,- ne peut être autre chose que l’oxtré-
mité inférieure 3’uh rhÿtoh.' A u pied du léctisteëniüm est assise
Hygie j la face toiirhée vers son'pèré ,' e t ne se' montrant par conséquent
que de’profik Sa chevelure est élégamment relevée e t formé
comme un diadème ondoyant autour de sa tête, derrière laquelle elle
vient s’attacher avec grâce; Sa tunique talaire, q u i’laisse à nu scs
épaules e t sa poitrine j est recouverte d’un peplus; ses pieds nus rc?
¡posent sur un 6t:ot:oÎiov assez élevé. De la main' droite elle semble
prendre les genoux de son’ père, ce qui, comme on le sait, est un
geste' de suppliants"8, ct d é l’autre elle tient une acemz ouverte 1,9;
devant le lit est.unc table soutenue sur-deux pieds, entré lesquels on
distingue la partie inférieure des vêtements de la déesse et les draperies
dit l i t A gauche de la tablé, où l’on voit trois gâteaux sacrés,
e t au-dessous du Icoudé d’Esculape, est un jeûné, ca'dmile', nu et
debôüt, représenté de face; le cratère ayant une formé plus évasée,
il puisé directement avec le 'wpdyoo; à l’aide duquel il doit remplir la
coupé d’Esculape. Dans. sa main gauclié-est un autre vase do n tia
forme est trop incertaine pour qu’oh puisses lui donner tin'nom; à
en juger par le dessin, ce devait être u n vase à anse mobile, et
par conséqueht en bronzel 'Pôint d’autel apparent; mais derrière la
déesse une famille composéede dix individus qui s’avancent sur deux
rangs. Au premier, cihq'eùfants précédés du jeune sacrificateur qtii,
succinctus'èl ¡l’épaulé1 gauche'découverte, chasse devant lui de là
main droite un porc dont le ventre touche à terre. Dé la main
gauche • il tient sur - un plateau le couteau destiné au sacrifice.
Les trois enfants qui le suivent immédiatement sont de jeunes garçons
sur le point d’entrer dans la classe des épbèbes; les deux derniers
sont deux jeunes filles moins âgées dont la première porte une petite
corbeille, contenant sans doute le mola ¿¡Usa.
‘ Au second rang oh voit deux hommes barbus d’âge différent, et
derrière eux deux femmes voilées. Dans l’angle supérieur à' droite
et touchant au pilastre droit un buste de cheval à la fenêtre.
Mus. Pió Ciem. vol.-V, tav. XXVII, p. i f f î t d. (le Milan. " ' Servius, ad Gébrg. U, 38q: Item cxr.* [
IX, ai, 1 et a3, 4. salutis : quum fiipra nunquam sinefebrc si
Fie de Pyrrhus, Cyrènc, on conçoit que la chèvre y ait é té,
XXXIV, 26. CXXXIX, 6.
’ ; i “f Museo delta real,; academia diManh
Pausan. II, 23, 4. .tav. XIII, p. 44?53.
K ïi8 . - •’ ’■ ■-'v Ce qui, indèpcmilamment de p.luslcu
Pausan. I I, x 1,7; -f ÍÍU .„'piusvbas, confirme n<atre conjecture rcli
X, 3a , 8. Esculape* sur le bas-reliitf de Merbaka.
n ; »eîé&’A'i'’' - Eur. Iphig. A. Í2 16. Androm. 886.
ibia. s« • :; >>»' Voyez sur FAccn» M. Laborde, Vas
II, 26, 7. Il devait en être de même en Mlle, :àênjugerparccpass»gede et II,.p.:i4o. •
lur] JEseulapio, qui est deui