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yuide en dedans, 8c forme en dehors une tubercule ou une
pointe direélement oppofée. Si le Poiffon fe déplacé^ en
tournant, il forme une autre bolTe fur fon écaille en même
diftance. Quand fon corps eft canelé , renflé ou creufé ,
fa Coquille eft de même canelée, renflée ou creuféejlorfque
la canelure eft extérieure feulement, 8c que la partie oppofée
en dedans eft polie , il faut entendre que les canelures
du corps de l’Animal s’étant dilfipées entièrement pendant
qu’il croilïoit, la matière qui fert à former la Coquille , a
rempli les canelures en dedans , excepté les bords de la fur-
face intérieure, lefquels reftent toujours canelés.
Les circonvolutions ou fpirales, 8c la forme fpherique des
Coquilles , partent de la même caufe. Comme le Poiffon fe
meut doucement 8c toujours en tournant autour de lui-me-
me , il décrit des lignes , des fpirales ou des bandes circulaires.
Il eft aifé de voir que ces lignes font toutes décrites
fur des cercles ou fur des ellipfes. *
La forme ronde 8c tournée en poires , félon quelques Na-
turaliftes , a été donnée aux Coquillages , comme la plus
convenable à leur nature. Peut-être que la Providence l’a
jugé ainfi, pour donner aux flots de la mer moins de prife
fur leur couverture. Ils n’o n t , comme on le fça it, ni pieds ,
ni nageoires. Les rides 8c les différens contours du ^dedans
font taies pour les empêcher de fortir de leurs Coquilles au
premier effort qu’ils fo n t, Sc au moindre obftacle qu’ils rencontrent
en leur chemin ; ce qui arriveroit aux Univalves,
qui ne tiennent point fi fortement à leurs Coquilles , que les
Bivalves. Cette figure peut encore venir de ce que leurs extrémités
brifées 8c ufees par un choc égal 8c continuel, fe
réduifent en forme ronde j l’agitation des flots de la mer, 8c
leur frottement continuel l’un contre 1 autre , pourroit y
contribuer aufïï, de même qu’il arrive aux galets que la
mer roule fur la grève.
Il eft auffi difficile de découvrir la Caufe immédiate des
belles couleurs des Coquilles , que de celles des fleurs. La
diverfité des eaux 8c des humeurs dont fe nourriffent les
Poiflons , produit, à ce que l’on croit , les différentes couleurs
dont ils font embellis. Les eaux chaudes forment la
couleur blanche ; ce qui fe prouve par l’écume : la couleur
fauve provient des eaux froides. Les couleurs dépendent
encore des exhalaifoos U des efprits des Minéraux : ceux
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du Vitriol , de l’Alun , du fel Ammoniac fe communiquent
facilement aux eaux. L ’ardeur du S o le il, la fanté du
Poiffon , fon âge 8c les différens pays où il fe nourrit , tout,
cela joint enfemble augmente , affaiblit 8c varié leurs couleurs
à l’infini.
Nous avons l’expérience des Huîtres que l’on pêche à
Diepe 8c au Havre de Grâce. Ces Huîtres ont une robe
fort commune , 8c ne produifent aucune Perle, à caufe
de la différence des eaux , de la diminution de l’ardeur
du Soleil , 8c de la qualité des Huîtres qui font excellentes
à manger r celles que l’on pêche en Amérique 8c en
Perfe, font au contraire nacrées, 8c renferment prefque toutes
de belles Perles ; leur chair ne fçauroit fervir d’aliment,
8c lés côtes de la mer font très-mal faines ; ce qui a fait
dire a Pline , que la naiffance des Perles eft dûe à la maladie
des Huîtres.
Un (a) Moderne dit que les couleurs fe forment dans les
Animaux par leurs vaiffeaux excrétoires , ainfi que dans
l ’homme par des glandes 8c des vifeeres , par lefquelles fe
feparent certaines liqueurs qui ont des couleurs particulières..
L e foye donne le fiel qui eft verd j la rate , la bile qui eft
noirâtre j les veines 8c les arteres, le fan g qui eft rouge j les
vaiffeaux falivaires,une humeur crafle 8c blanche 8c le Chyle
qui eft blanc, ainfi du relfe j comment appliquer ce fyftême
aux Coquillages , qui n’ont point de coeur , -de foye , de
rate , ni de fang ?
Il faut concevoir que l’Auteur de la nature a difpofé les.
glandes excrétoires de ces Animaux de maniéré qu’ils puif-
fent former leur Coquille avec telle ou telle couleur, c’eft-à-
dire , avec cette bave vifqueufe teinte d’une couleur conforme
aux glandes 8c aux vifeeres d’où elle fort : il réfulte-
roit de-là , que la difpofition des couleurs dépendroit abfo-
lument de celle des cribles par où paffe l’humeur vifqueufe-
qui forme la Coquille de l’Animal.
La variété des couleurs 8c des- raies peut encore venir delà
peau de l’Animal, laquelle eft différemment percée en.
plufieurs endroits , ou compofée de différens cribles , dont
les uns laiffent paffer certaines parties , qui varient en figure-
8c en nature d’avec celles qui paffent par les autres, cribles »
8c qui ferment le paifage à celles-ci.
Il s agit prefentement de fçavoir , comment ces liqueurs
(a) Uifioire
naturelle de
l ’Univers, par
Colonne, tom,
4. p. 17,ï~