quantité. Leur gourmandife eft, comme l’on v o it, aufiï
groffière que leur naturel e(l brutal ; iis n’ont aucun
fentiment bien diflinét, les petits reconnoident à peine
leur mère, ou du moins font fort fujets à fe méprendre,
& à teter la première truie qui leur laide feifir fes mamelles.
La crainte &lanéceffité donnent apparemment
un peu plus de fentiment & d’inftinél aux cochons fiu-
vages ; il femble que les petits foient fidèlement attachés
à leur mère , qui paraît être auffi plus attentive à leurs
befoins que ne l’eft la truie domeftique, Dans le temps
du rut, le mâle cherche , fiiit la femelle, & demeure
ordinairement trente jours avec elle dans les bois les
plus épais, les plus folitaires & les plus reculés,1.1 eft alors
plus farouche que jamais, & il devient même furieux
forfqu’un autre mâle veut occuper fa place ; ils fe battent,
fe bledent , & fe tuent quelquefois. Pour la laie, elle
ne devient furieufe que quand on attaque fes petits ; &
en général, dans prefque tous les animaux fiuvages, le
mâle devient plus ou moins féroce lorfqu’il cherche à
s’accoupler, & la femelle lorfqu’elle a mis bas.
On chade le fanglier à force ouverte, avec des
chiens, ou bien on le tue par furprife pendant la nuit
au clair de la lune : comme il ne fiiit que lentement,
qu’il laide une odeur très-forte, qu’il fe défend contre
lés chiens & les biede toujours dangereufement, il ne
fuit pas le ehader avec les bons chiens courans deftinés
pour le cerf & le chevreuil ; cette chade leur gâterait
}e nez, & les accoutumerait à aller lentement : des
mâtins
d u C o c h o n , frc. 1 2 I
mâtins un peu dredés fuffifent pour la chade du fin-
glier. Il ne faut attaquer que les plus vieux, on les
connoît aifément aux traces : un jeune fanglier de trois
ans eft difficile à forcer, parce qu’il court très-loin,
fins s’arrêter, au lieu qu’un finglier plus âgé ne fuit
pas loin, fe laide ehader de près, n’a pas grand peur
des chiens, & s’arrête fovwent pour leur faire tête.
Le jour, il relie ordinairement dans fi bauge, au plus
épais & dans le plus fort du bois ; le foir, à la nuit,
il en fort pour chercher fi nourriture : en été, lorf-
que les grains font mûrs, il eft adez facile de le fur-
prendre dans les blés & dans les avoines où il fréquente
toutes les nuits. Dès qu’il eft tué, les chadeurs
ont grand foin de lui couper les fuites, .c’eft-à-dire,
les tefticulcs, dont l’odeur eft fi forte que fi l’o-n pade
feulement cinq ou fix heures fins les ô te r , toute la
chair en eft infeétée. Au refte, il n’y a que la hure
qui foit bonne dans un vieux finglier, au lieu que
toute la chair du marcadin, Sc celle du jeune fanglier
qui n’a pas encore un an, eft délicate; & même adez
fine. Celle du verrat, ou cochon domeftique mâle,
eft encore plus mauvaife que celle du finglier; ce
n’eft que par la caftration & l ’engrais qu’on la rend
bonne à manger. Les Anciens * étoient dans l ’ufige
de faire la caftration aux jeunes marcadin* qu’on pou-
voit enlever à leur mère, après quoi on les reportoit
Vide Arijl. hift. animal, lib. VI. cap. XXVI I I .
Tome V, Q