7 ° H i s t o ir e Naturel le
goût. L ’odeur forte du bouc ne vient pas de fa
chair, mais de fa peau. On ne laiffe pas vieillir ces animaux,
qui pourraient peut-être vivre dix ou douze ans :
on s’en défait dès qu’ils celfent de produire, & plus ils
font vieux, plus leur chair eft mauvaife. Communément
les boucs & les chèvres ont des cornes; cependant il y
a, quoiqu’en moindre nombre, des chèvres & des boucs
fins cprnes. Ils varient auffi beaucoup par la couleur du
poil : on dit que les blanches, & celles qui n’ont point
de cornes, font celles qui donnent le plus de lait, & que
les noires font les plus fortes & les plus robuftes de
toutes. Ces animaux, qui ne coûtent prefque rien à
nourrir, ne lailfent pas de faire un produit affez confi-
dérable ; on en vend la chair, le fuif, le poil & la peau.
Leur lait eft plus làin & meilleur que celui de la brebis;
il eft d’ufàge dans la médecine, il fe caille aifément, &
l ’on en fait de très-bons fromages : comme il ne contient
que peu de parties butireufes, l’on ne doit pas en féparer
la crème. Les chèvres fe laiffent teter aifément, même
par les enfans, pour lefquels leur lait eft une très-bonne
nourriture; elles font, comme les vaches & les brebis,
fujettes à être tetées par la couleuvre, & encore par un
oifeau connu fous le nom de tete -chèvre ou crapaud
volant, qui s’attache à leur mamelle pendant la nuit, &
leur fait, dit-on, perdre leur lait.
Les chèvres n’ont point de dents incifives à la mâchoire
fupérieure ; celles de la mâchoire inférieure tombent
& fe renouvellent dans le même temps & dans le
DE LA CHEVRE.
même ordre que celles des brebis : les noeuds des cornes
& les dents peuvent indiquer l’âge. Le nombre des dents
n’eft pas confiant dans les chèvres ; elles en ont ordinairement
moins que les boucs, qui ont auftî le poil plus
rude, la barbe & les cornes plus longues que les chèvres.
Ces animaux, comme les boeufs & les moutons, ont
quatre eftomacs & ruminent : l ’efpèce en eft plus répan-
~ due que celle de la brebis ; on trouve des chèvres fem-
blables aux nôtres dans plufieurs parties du monde ; elles
font feulement plus petites en Guinée & dans les autres
pays chauds ; elles font plus grandes en Mofcovie & dans
les autres climats froids. Les chèvres d’Angora ou de
Syrie, à oreilles pendantes , font de la même elpèce
que les nôtres ; elles fe mêlent & produifent enfemble,
même dans nos climats : le mâle a les cornes à peu près
auffi longues que le bouc ordinaire , mais .dirigées &
contournées d’une manière différente ; elles S’étendent
horizontalement de chaque côté de la tête, & forment
des fpirales à peu près comme un tire-bourre. Les cornes
de la femelle font courtes, & fe recourbent en arrière ,
en bas & en avant; de forte qu’elles aboutiffentauprès
de l’oe il, & il paraît que leur contour & leur direéiion
varient. Le bouc & la chevre d’Angora, que nous avons
vus à la ménagerie du R o i, les avoient telles que nous
venons de les décrire ; & ces chèvres ont, comme prefque
tous les autres animaux de Syrie , le poil très-long,
tres-fourni, & fi fin qu’on en fait des étoffes auffi belles
& auffi luftrées que nos étoffes de foie.