14- H i s toi r e Naturel le
paille , de luzerne, de fàinfoin , de feuilles d’orme,
de frêne, &c. on ne laifle pas de les faire fortir tous
les jours , à moins que le temps ne foit fort mauvais\
mais c’eft pluflôt pour les promener que pour les
nourrir; & dans cette mauvaife fàifon, on ne les conduit
aux champs que fur les dix heures du matin, on les y
laide pendant quatre ou cinq heures, après quoi on les
fait hoire & on les ramène vers les trois heures après
midi. Au printemps & en automne au contraire, on les
fait fortir auffi-tôt que le foleil a dilfipé la gelée ou
l ’humidité, & on ne les ramène qu’au foleil couchant:
il fuffit aulfi dans ces deux faifons de les faire boire
une feule fois par jour avant de les ramener à l ’étable,
où il faut qu’ils trouvent toujours du fourrage, mais en
plus petite quantité qu’en hiver. C e n’efl que pendant
l ’été qu’ils doivent prendre aux champs toute leur
nourriture, on les y mène deux fois par jour , & on
les fait boire auffi deux fois; on les fait fortir de grand
matin , on attend que la rofée foit tombée pour les
laiffer paître pendant quatre ou cinq heures, enfuite
on les fait boire & on les ramène à la bergerie ou
dans quelqu’autre endroit à l’ombre : fur les trois ou
quatre heures du foir, lorfque la grande chaleur commence
à diminuer , on les mène paître une fécondé
fois jufqu’à la fin du jour ; il faudrait même les laiffer
pafTer toute la nuit aux champs comme on le fait en
Angleterre, fi l’on n’avoit rien à craindre du loup, ils
n’en feraient que plus vigoureux, plus propres & plus
fains. Comme la chaleur trop vive les incommode
beaucoup, & que les rayons du foleil leur étourdiffent
la tête & leur donnent des vertiges „ on fera bien
de choifir les lieux oppofés au foleil, & de les mener
le matin fur des coteaux expofés au levant, & l ’après-
midi fur des côteaux expofés au couchant, afin qu’ils
aient en paiffant la tête à l’ombre de leur corps; enfin
il faut éviter de les faire pafTer par des endroits couverts
d’épines , de ronces , d’ajoncs, de chardons, fi
l ’on veut qu’ils confervent leur laine.
Dans les terreins fec s, dans les lieux élevés où le
ferpolet & les autres herbes odoriférantes abondent,
la chair de mouton efl de bien meilleure qualité que
dans les plaines baffes & dans les vallées humides, à
moins que ces plaines ne foient fablonneufes & voifines
de la mer, parce qu’alors toutes les herbes font falées,
& la chair du mouton n’efl nulle part auffi bonne que
dans ces pacages ou prés falés; le lait des brebis y efl
auffi plus abondant & de meilleur goût. Rien ne flatte
plus l ’appétit de ces animaux que le fe l, rien auffi ne
leur efl plus fàlutaire, lorfqu’il leur efl donné modérément
; & dans quelques endroits on met dans la bergerie
un lac de fel ou une pierre fàlée qu’ils vont tous lécher
tour à tour.
Tous les ans il faut trier dans le troupeau les bêtes qui
commencent à vieillir, & qu’on veut engraiffer: comme
elles demandent un traitement différent de celui des
autres, on doit en faire un troupeau féparé; & fi c ’efl en