
vj a v e r t i s s e m e n t .
difpofce horizontalement, & les parties de la génération aufli apparentes que celles
des quadrupèdes. Les Chiens de mer au contraire ont la peau chagrinée, & plufieurs
évents fur les parties latérales du cou, dont le nombre varie depuis quatre jufqu’à
fept : la nageoire de la queue eft verticale : on ne voit pas non plus les parties de
la génération. Je ne parle ici que des principales différences extérieures ; la
conformation intérieure en offre encore de plus confidérables. Veut-on actuellement
connoître dans quelle claffe doit être rangé un cetacé quelconque ? Il fuffit, pour
cela, d’examiner la ftruéture de la bouche. Si au lieu de dents, on trouve des
efpèces de lames de corne, terminées par de longs poils qui pendent autour des
mâchoires, l’individu doit être rangé parmi les Baleines proprement dites. Si on
voit une ou deux dents inférées horizontalement fur le devant de la mâchoire
fupérieure, cJeft un Monodon. Trouve-t-on uniquement des dents pointues ou
émouffées à la mâchoire inférieure, & quelques dents plates, prefque invifibles à
celle d’en haut ? c’eft un Cachalot. Enfin fi on remarque des dents aux deux
mâchoires , il faut conclure que c’eft un Dauphin. On parviendra enfuite à connoître
le nom de l ’animal, en lui appliquant fucceffivement les caraétères exprimés
dans chaque phrafe defcriptive. Si c’étoit une efpèce nouvelle , il faudroit s’attacher
à bien faifir tous les traits-qui la caractérifent, & à indiquer la place qu’elle doit
occuper dans la diftribution méthodique.
Je ne faurois affez infifter fur ces détails , d’où dépendent abfolument les progrès
de la Cetologie. L ’hiftoire de chaque animal en particulier ne pourra recevoir quelques
accroiffemens, qu’autant qu’on fera d’accord fur la nomenclature ; c’eft la bafe de
l ’Hiftoire Naturelle. Je termine ici mes remarques, en conjurant tous ceux qui feront
dans le cas de voir des cétacés, de comparer mes defcriptions avec les objets & de
corriger mes erreurs ; car je n’ai pas la vanité de croire que mes Ouvrages en
foient exempts. S’ils daignent me faire part de leurs obfervations, j’aurai foin*d’en
profiter & de publier le nom de tous ceux qui auront concouru à la perfection de
mon Ouvragé & à l ’avancement de l’Hiftoire Naturelle.
I N T R O D U C T I O N .
X i A mer n’eft pas feulement la patrie des
poiflons ; elle renferme encore dans fon fein
une multitude prefque infinie d’animaux,
auffi variés par leur forme que par leur grandeur
: c’eft un empire immenfe , dont la
domination s’étend fur toute la nature &
dont toutes les claffes des êtres animés pa-
roilfent tributaires. Les quadrupèdes qui
habitent nos forêts ; les infedes qui peuplent
les airs ; les oifeaux qui animent nos bocages
; les ferpens qui fe cachent fous les
buiffons ; les reptiles qui croupiffent dans
les marais ; & les vers qui rampent fur le
limon ; toutes les tribus enfin des animaux-qui
vivent fur le g lo b e , fourniffent à ce vafte
élément une population nombreufe , dont
l ’enfemble préfente un tableau aufli étonnant
par le nombre que par la diverfité des individus
qui le compolent. Mais au milieu de
ces divèrfes colonies, on diftingue une’ race
extraordinaire, qui femble n’avoir été créée
que pour commander aux autres : la Baleine
paroît au milieu de ces animaux , comme
un Souverain environné, de fes fujets. Si l’on
eonfidère fa taille monftrueufe, elle furpaffe
.celle de l’éléphant, autant que l’étendue de
la mer furpaffe celle de la terre. L ’agilité &
la force correfpondent à fa grandeur; d’un
feul coup de fa queue elle renverfe & fub-
merge les vaiffeaux. Son fouffle, femblable
a un vent impétueux , élève en l’air deux
immenfes colonnes d’eau, 8c les divife comme
en poufïière. Son approche s’annonce au loin
par des ondulations rapides, & produit à plus
d’un mille le même effet que celui d’un
orage. Bientôt, on voit ce coloffe animé
fendre les ondes, avec plus de vîtelfe que
l’aigle n’en a en parcourant les airs, & Jaiffer
fur fes traces des tourbillons dont le mouvement
circulaire fe communique à tous
les objets circonvoiiîns, Cette force déjà fi
prqdigieufe , reçoit encore une nouvelle
activité , lorfqu’étant aux prîtes avec fes
ennemis & fe fentant b le lfé , cet animal déploie
toute l’étendue des relfources que la
nature lui a données. On entend alors un
bruit qui s’étend plus loin que celui du
canon. La mer eft agitée jufqu’au fond de
fes abîmes; fa furface eft couverte d’écume;
8c les flots lancés par le mouvement de fa
queue redoutable, jaillifîent jufqu’aux nues.
Ce tableau raccourci ne fuffit pas pour faire
connoître cet énorme 8c prodigieux animal ,
la plus grande maffe animée qui exifte fur
la terre. On en aura une idée plus précife ,
en réunifiant fous un même point de vue
les connoiflances que nous avons fur Forgani Cation
, les moeurs, & les habitudes des individus
qui compofent cette famille peu nombreufe.
D ifférences entre les cétacés et les
poissons. Dans tous les temps, on a confondu
les cétacés avec les poiflons. Toute
la différence qu’on a mife entre ces deux
dénominations , confifte à exprimer leur
grandeur refpeâive : ainfî on a nommé ceta*
ces, toutes les grojjes bêtes marines remarquables
par une taille extraordinaire ; 8c les
petits individus, ceux qui ont une groffeur
médiocre , ont porté le nom de poiJfonSo
Cependant il exifte entre ces deux claffes
d’animaux, des différences bien plus marquées
que celles de leur grandeur. La plus
légère attention fuffit pour apercevoir les caractères
qui les diftinguent. Les cétacés ont
le corps dépourvu d’écailles ; un ou deux
évents fur la partie fupérieure de la tête;
les nageoires latérales garnies d’articulations
- femblables à celles de la main de l’homme;
8c celle de la queue difpofée horizontalement.
De plus, leur fan g eft chaud ; le coeur a deux
ventricules; ils refpirent par les poumons;
s’accouplent, font leurs petits vivans, 8c les
allaitent comme les quadrupèdes.
Les cétacés diffèrent encore des poiflons 9
en ce qu’ils ont plus de fang 8c que leur chair
eft revêtue d’une couche de graifie poreufe
8c tendineufe, que les pêcheurs angîois appellent
blubbes. La température du climat 8c
l’élément que ces animaux habitent fembloient
exiger une conformation particulière. En
effet, cette furabondance de fang doit produire
une chaleur extraordinaire, & capable
de réfifter au froid rigoureux qui règne dans
les pays du Nord ; 8c la couche de graifie