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A V E R T I S S E M E N T .
O N fe plaint depuis long-temps du peu. de connoilfances que nous avons fur
les cétacés (i) & du défordre qui règne dans les defcriptions des Naturaliftes.
En effet, l ’hiftoire de ces animaux marins e ft, non feulement la plus confufe, mais
la moins fufceptible d’avancement. A tous les obftacles qu’oppofe un élément
impénétrable à l’homme , fe joignent encore des difficultés particulières. C ’eft
aans les mers du Nord , c’eft fous les montagnes de glace que la plupart des
cétacés ont établi leur féjour ; & quel eft l’homme allez z é lé , affez hardi, aflez
patient pour aller dans ces mers éloignées , aux rifques. de fa v ie , palier des
années entières à étudier des . animaux d’autant plus difficiles à obferver, qu’ils
n ont choilî cette retraite inacceffible que pour fe fouftraire à nos perfécutions &
dans la crainte de devenir nos victimes ! Il a donc fallu s’en tenir jufqu’ici aux.,
relations, ordinairement peu exaltes, des pêcheurs, & au témoignage de quelques
voyageurs qui ont pénétré dans ces régions glacées. Sibbald , Martens, Dudley,
K le in , & Anderfon, à qui nous fommes redevables des premières defcriptions
méthodiques , n’ont point vu tous les individus dont ils ont parlé ; ils n’ont
compofé leurs ouvrages que d’après les mémoires qu’on leur a communiqués,
& les Naturaliftes les plus célèbres de ces derniers temps., Artedi , Brillon ,
L in n é , Erxleben, ont établi la bafe de leurs fyftêmes fur les détails de ces
premiers Auteurs. De là vient que les erreurs & les inexactitudes qui s’étoient
d’abord glilfées dans cette partie de l’Hiftoire Naturelle , fe font perpétuées
jufqu’à nous. L a feule manière de les rectifier, ce feroit d’examiner avec foin
les divers cétacés qui viennent de temps en temps échouer fur nos côtes ; mais il
eft rare qu’il y ait fur les lieux des perfonnes allez initiantes pour faire de
bonnes obfervations. La curiofité attire beaucoup de fpectateurs ; tout le monde
s extafie en voyant ces grands cololfes, mais perfonne n’en obferve les caractères
ni les proportions. Bientôt l ’animal tombe en putréfaction avant que les Naturaliftes
en foient inftruits ; & les Gazettes ne tardent pas à publier qu’un
tel jo u r , fur une telle plage, il a échoué un Souffleur ou une Baleine ,
( i ) Ce mot peut être employé comme fubftantif ou comme adjeâif. Dans le premier ca s ,
il eft toujours mafculin; dans le dernier, il ne peut pas être féminin, puifque le fubftantif qui
lé précédé eft lui-même mafculin, poiffons cétacés, animaux cétacés. Ainfî je l ’écrirai avec un
feul e , à l’exemple de M. Daubenton.
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