I N T R O x D t T C T 17 O TST:
qu’on trouve dans la plupart des-animaux. La
Nature ne leur a point donné de pattes comme
aux quadrupèdes & aux reptiles, ni des ailes
. comme aux oifeaux, ni des nageoires comme
aux poilTons ; mais à la place de. ces membres
, .on obferve fur la furface inférieure du
corps, une rangée de grandes lames mobiles
au gré de l’animal, dont chacune>s’élevant
8c fe rabaiffant par le moyen d’un, miffcle
particulier, devient une forte de pied Çi)‘ ,
une efpèce de point d’appui fur le terreiiî
que le ferpent veut parcourir*; C ’eft par le
moyen de ce mécanifme-& par le jeu de
ces écailles , que la Couleuvre commune
s’enfuit au moindre bruit 8c s’éloigne avec ■
. tant de promptitude , qu’elle fe dérobe
prefque à nos regards. Mais à cette faculté
qu’ont les ferpens de fe mouvoir par le
moyen des plaques qui recouvrent le ventre,,
fe joint encore un moyen bien puilfant pour
accélérer leur marche. Ils relèvent en arc de
cercle le milieu du tronc,, tandis que les
. deux extrémités, qui portent fur la terre , f e
rapprochent l’une de l’autre. Ils „s’appuient
en lui tefur une de ces extrémités., la compriment
avec force comme un relfort, 8c s’élancent^
avec la rapidité d’un traitve rs l’endroit,
©ù ils fe dirigent. Lorfqu’ils veulent aller en
. avant, ils s’appuient fur l’extrémité pofté-
rieure du corps ; 8c quand ils veulent fe
porter en arrière, ils compriment la partie*
antérieure.. Chaque fois: qu’ils répètent cette
manoeuvre, iis. font, pour a in fi dire, un pas-:
-d’autant plus long r que la corde de l’arc eft
plus conüdérable^ fans compter, l’étendue que
peut donner à cet intervalle parcouru l’élaf-
ticité de cette même portion du corps qu’ils
. .ont pliée, 8c qui les lance avec;roideur en fe
rétabli fiant.. On peut voir cette efpèce de
mouvement dans les chenilles qu’on appelle
arpenteufés-, & dans quelques efpèces de vers,
qui,, étant dépourvus de pieds comme les
ferpens, font obligés de fe mouvoir de même
pour changer de place. Pendant que les ferpens
exécutent ces divers, mouvemens,.iis portent
leur tête d’autant plus élevée au deffus. du ter-
: rein, qu’ils ont plus de vigueur, & qu’ils font
animés par des fenfations plus vives*
Quoique tous les ferpens fe meuvent- de la
même manière & qu’ils foient pourvus d’une
' (i) Cardan & Ifidore ont regardé les côtes des ferpens
comme. faifant la fonction des pieds j & les plaques du
rentre, comme tenant la place dès ongles*
grande élafticité , cependant ce rèfïbrt n’efê ’
pas également diftribué dans toutes les parties
du corps. La plupart des efpèces , les
fur-tout 8c les C o uleuv re sont plus de facilité
pour avancer que pour reculer. En général
cette faculté que pofsèdent quelques ferpens
de fe porter plutôt en avant qu’en arriéré,ré-
fuite néceffairement de la difpofition des pla-1
ques qui recouvrent le ventre , & qui font
couchées les- unes au deffus des autres..
Lorfque les ferpens les redreffent , elles-
forment contre le terrein un obftacle qui;
• arrête leurs mouvemens rétrogrades; tandis
qu’au- contraire , lorfqu’ils vont en avant,,
les écailles s’appliquent fur le terrein., les
unes contre les autres , dans le fens où elles»
fe recouvrent réciproquement,. &.accélèrent!I
la marche*
Quand les-ferpens-, au lieu de fe mouvoir
progrefiivement de la manière dont nôos j
venons- de parler , veulent p a fier tout de|
fuite d’un endroit à un autre , ou fe jeter j
avec impétuofité fur l’ennemi qui les attaque,
alors- ils fe roulent en fpirale , en formant.j
plufieurs. cercles concentriques. Lis n’élèvènt
que la tête au defliis de leur- corps ainfi replié
; ils- compriment ,, pour ainfi dire, tous
leurs refforts ;., 8c réunifiailt toutes leurs forées;
particulières, ils's’élancent comme une fie-1
che , en franchifiant fbuvent: u-n efpace 'de1
plufieurs pieds (i)..
Les ferpens qui veulent' grimper fur tur;
arbre,- embraflent d’abord le tronc dans leitrs-
plis tortueux., en .appliquant' fuccelliyemént1
les plaques inférieures fur- tous les points de
fa furface , de s’élèvent ainfi jufqu’à 1 extrémité
dés branches, lès-plus hautes. Veülerit-j
ils s’élancer fur un 'arbre- voïffn ? Us appuient
contre-1 arbre une portion de l<W
corps-, & la plient de manière qu’elle fane
une efpèce de reffort 8c qu’elle fe débande
avec élafiické ou bien ils fe fufpendent pat
la queue ;: 8c balançant ainfi , à plufieurs re-
prifes,. la partie antérieure du corps, jls
atteignent l’arbre voifin ou la branche a laquelle
ils veulent parvenir s’ÿ attachent par
la tête , en l’embrafiant par plufieurs cou-
;|j| C’tû' dans cette Quation, que le P. Plumier rePc
fente le Fèr de lance, qu’il nomme vipère d Am ’H ’
Dans le manuferit qui m’a.été communiqué par M- oC ’
l e corps forme plufieurs cercles' dont la tète occupe
centre: la gueule eft béante* » •
IN TR O D UGT ION. N
tours, 8c retirent à eux la queue qui leur avoit
ïeryî a fe fufperidre. '
Les Anciens ne font pas d’accord fur le
• nombre ni fur la nature des fens dont les
ferpens font pourvus. ‘Les uns leur attribuent
i tous ceux dont l’exiftence eft reconnue dans
les autres animaux, quoique les organes qui
1 reçoivent la fenfation ne foient pas appareils
I & fenfibles; les autres ne leur accordent que
: les fens dont ils ont aperçu les organes exté-
I rieurs'. C’eft ainfi que Pline 8c Ariftote ont
refufé aux ferpens'le fens de l’odorat, parce
qu’ils ont vu des narines d’une conformation
: particulière 8c qui leur ont paru plus pro-
- près à la refpiration, qii’à recevoir i’impref-
fion des corps odorans. Les Naturaliftes mof
dédiés s’accordent à dire que les ferpens ont
lè même nombre de fèns que les autres ani-
[ niaux ; ils prétendent néanmoins que tous
" n’ont point le même degré d’adivité.
Sens d e .l ’o u ïe . I l eft certain qu’on n’aperçoit
L fur les ferpens aucun organe apparent de
I j’oüïe ; on n’y voit point de cartilage façonné
j, en entonnoir, ni de concayité extérieure,
pas même de trpu pour donner pafiage aux
rayons fonores 8c les faire parvenir jufqu’au
L, timpan. Faut-iL conclure de là que les 1er-
pens font privés du fens de l’ouïe ? Point du
tout; mais puifqu’il eft.démontré, par. le fait
& l’expérience, que la plupart écoutent at-
, ’ tentivement le chant des oifeaux , 8c que
[. jugeant ainfi de leur proximité ,. ils fe mettent
en. embufeade pour en faire.leur proie ,
l. on doit en inférer que les organes de ce. fens
L ,ont une ftrudure 8c une difpofition différente
. de ceux des autres animaux, 8c qu’au lj.eu
I, de correfpondre, comme dans c e u x - c i fu r
: |a furface fupérieure ou latérale de-la tête,
f's vont aboutir fur le mufeau -, ou peut-être
| dans l’intérieur de la gueule ( i ). Tout au plus
U on pourroit conclure que ce fens eft peuadif,
• puifquon ne voit point à découvert les or-
i ,• ganes qui, dans les quadrupèdes 8c les oifeaux,
L concourent à l’excellence de l’ouïe.
;Sens de l ’o d o b at. Ce fens ne parqît, être ni
r le meilleur, ni le plus fin. L’ouverture des
■ truies eft fituée à l’extrémité du mufeau;
- elle eft petite, environnée d’écailles. On feroit
! ,.î€nté de croire, avec Pline & Aldrovande,
| ^ ) .O n remarque de chaque côté delà tête du Fer de
; |- i’ïei’fre les yeux &. les narines, une ouverture parti-;
iere que l’on regarde comme les organes de l’ouïe..
que c’eft un trou pour refpirer, plutôt qu’un
, conduit deftiné à recevoir les impreftions des
corps odorans; cependant il eft certain que
plufieurs ferpens ont l’odorat excellent*. Le
Fer de. lance fuit les traces de fa proie, lorf-
qu’elle lui échappe, 8c parvient à l’atteindre
irès-aifément. L e Devin flaire comme un
chien, 8c pourfuit ainfi l’homme 8c les animaux
dont il fait fa proie. Ils ont beau prendre
la fuite, il n’eft point d’afile affuré contre
un fi dangereux ennemi ; il n’eft arrêté ni par
les fleuves qu’il rencontre, ni par les bras.de
mer dont il fréquente les bords ; il grimpe
même avec facilité jufqu’à la cîme des arbres.
Le feul moyen qui refte pour fauver la v ie ,
c’eft de mettre le feu aux herbes à demi-brûlées
par les ardeurs du foleil & d’élever ainfi un
rempart de flammes contre la pourfuite d’uri
animal aufti terrible.
Sens de la vue* La ftrudure intérieure des
yeux 8c leur conformation extérieure annoncent
que les ferpens excellent par la vue.
En effet, leurs -yeux, garnis communément
d’une membrane clignotante , qui les pré-
ferve^des accidens 8c des effets d’une lumière
trop éclatante, font brillans, animés,1 pleins
de feu , failians, & Irès-mobiles. La prunelle,
pouvant aifément fe côntrader ou fe
dilater, admet un grand nombre de rayons-
lumineux , 8c rejette ceux qui pourroient
nuire à l’excellence de cet organe. Il eft vrai
que les Coeciles' ne femblent pas jouir- du
même avantage* Les individus^de cette famille
peu nombreufe , deftinés-à vivre fous
terre, comme la taupe, dévoient naturellement
être privés de la perfedion d’un fens
dont ils ne pauvoient faire aucun ufage. •
SeKs dü goût. Si l’on doit juger de la fîneffe
du goût par la conformation des parties qui
en font les principaux orgaiïes, on ne peut
avoir ici qu’une idée très-avantageufe de ce
fens. Le palais des ferpens eft compofé' de
parties molles, nefveules, 8c très-propres à
recevoir l’impreftion des parties favoureufes.
La langue eft mince , déliée , 8c fendue de
manière à, fe coller facilement contre les ali-
meïis. On devroit donc conclure que ce fens
eft très-adif, fi on ne favoit pas que la plupart
des animaux de, cet ordre avalent .les mor-?
çeaux entiers, ce qui les empêche de favou-
rer leurs alimèns. 8c de jouir de toute la
plénitude .de fenfation que la ftrudure des
organes, pourroit leur procurer.