
cent foixante pieds de longueur. Au rapport
du même Naturalifte, dans les relations que
Juba adrefla à C. Céfar, fils d’Augufte, il
y eft fait mention de quelques cétacés qui
entrèrent dans les fleuves de. l’Arabie, qui
avoient fix cents pieds de longueur & trois
cent foixante de circonférence ( i ) . Néarchus
dit que les Baleines ont ordinairement vingt-
trois pas de longueur ;. 8c qu’il eh a vu une
de cent cinquante coudées qui échoua dans
ces îles* qui font devant l’Euphrate. Jacques
Ziéglérus^dans fa Defcription delà Schondie,
aflùre qu’auprès de W~ardhuys, dans le
printemps , tout le rivage eft rempli de
Baleines- d’une grandeur monftrueufe, 8c qu’il
y en a de cent coudées de longueur. Il n’eft
pas étonnant que les Anciens exceffiveulent
amis du merveilleux * aient attribué à ces
animaux des dimenfions fî prodigieufes;. mais
ce qu’il- y a de plus incroyable , c’eft qu’il y
ait eu dans ces derniers temps des voyageurs
qui , portant l’exagération à l’excès r> ont. dit
avoir yu dans, les mers de la Chine,, des
Baleines longues de plus de neuf cents
pieds; d’autres.les ont comparées à des îles,
à des écueils i 8c de là fans doute eft née
chez les. pêcheurs du Nord , l’idée de ce
prétendu kroken ou poijjion-montagne , q u i ,
d ifen t- ils s ’élève des fonds de la mer comme
une efpèce d’île flotante * 8c attire fur fes
flancs une infinité d’animaux qui viennent y
établir leur demeure. Quelle q.ue foit la confiance
que méritent ces relations, il eft certain
que les Baleinesqu’on prenoit dans les mers
du N ord, il y a deux cent foixante ans,-étoient
beaucoup plus grandes que celles qu’on y
trouve à préfent r. fans doute parce qu’elles
étoient plus vieilles; car à peine peut-on mettre
des bornes à la vie de ces grands animaux.
L ieux ou se trouvent les cétacés.. Selon
le témoignage des Anciens, on voyoit autrefois
beaucoup de cétacés dans l’Océan;,
mais depuis que les voyages aux Indes font
devenus fi fréquens , ces animaux y qui aiment
la paix 8c la tranquillité, fe. font retirés
dans les régions du Nord, ou ils font moins
expofés au bruit des navigateurs 8c aux pour-
fuites des pêcheurs. Les Baleines-TTramhes
habitent les mers de Groenland tirant à
J’oueft , le détroit de Davis , les côtes de'
Spîtzberg , cflffande, die Norvège : on en
(i) Pline, Hijl. Nat. lib. 3*.
pêche au nord de Co ré e , près dë IflW d e
Mayën , fur les côtes de Labrador , darisc le
golfe Saint-Laurent , & autour de l’île de
Terre-Neuve. Selon le Maire , on en voit
beaucoup aux Philippines, fur-tout proche
la terre des- Etats : il y en a à- Socotéra, île
peu éloignée de l’Arabie heitreufe'-, & au
cap- de Galles ,-qui fait la pointe de J’île' de
Ceylan. Ou lit dans le dixième volume“ de
YHifioire des voyages , que Mendés Pinto
vit attaquer, dans une île du Jaoon , une hL
Baleine monftrueufe, que le Roî de Pile
aida lui-même à la prendre, 8c qu’il la Iliade
fa propre main. Il exifte auiïi fans doute
des Baleines- dans les mers de la Chine
mais nous fournies bien éloignés de croire
qu’elles aient les dimenfions- exagérées que
quelques voyageurs leur ont attribuées.
Les Cachalots font leur féjour ordinaire1
dans les mers Boréales , vers le détroit’ de'
Davis, au cap du Nord, 8c vers les côtes
de Finmarchie : c’èft la famille la plus
vagabonde de la clafîe des cétacés : ainfi oiî'
en trouve fréquemment dans-les autres mers
* §c il en vient allez fouvent dans nos parages*.
Selon quelques papiers anglois , on a’ découvert
en 1787- une baie fort étendue fur
la péninfule méridionale d’Afrique, à quarante
lieues environ du cap de Bonne-Efpé--
rance,, ou les Cachalots font en très-grand
nombre. Il relie à favoir, en fnppolànr
! que cette, découverte foit vraie ,, quelle eft
l’ëfpèce de Cachalot qu’on a vue dans ces
contrées.
Les Dauphins appartiennent prefque à toutes
les mers : on en trouve dans l’Océan-, la;
Méditerranée,, le canal de Mëflïhe, 8c dans;
la mer Adriatique; ‘d’bù il en paffe dans-les*
lagunes de Venife, fur les côtes de G a lice ,
8c même dans le port dé la Gôrogne. Oh-
afîure que dans la Côchinchine, on en fait'
des pêches confîdérablës* qui produifent une'
grande quantité d’huile.-
En général* on peut conclure, d’après le ’
témoignage des pêcheurs ,- que les Baleines-
proprement dites 8c les Monodons fe trouvent
habituellement vers les pôles , entre les
fo i xante-d ix-hu i t ièm e'& foixan te-di x-n euvième'
degrés- de' latitude ; 8c que les autres familles
' font plus-’ ou1 moins répandues dans les mers
" tempérées. Il femble dbnc que les productions
die la1 nature’ foient difpofées dans; un
ordre contraire & dans une- fuccelfion oppo-
fée^puifque tousles-grands animaux terreikes j
fek que réléphant, le rhinocéros, fe trouvent
actuellement dans les contrées du midi ; tandis
que les plus grofles bêtes marines ont
fixé leur féjour dans les régions polaires.
V oyages. Cependant , quoique le féjour des
cétacés paroiffe généralement déterminé, il y
a des circonftances qui les obligent quelquefois
de quitter leur féjour ordinaire. Le temps
de leurs amours , une tempête furieufe ,
tin ennemi acharné à les pourluivre, le défaut
dë nourriture , un froid exceffif les obligent
fouvent d’abandonner leur demeure ; 8c ils
parodient alors tantôt feuls, tantôt en troupes
nombreufes, félon lâ nature des caufes
qui ont déterminé leurs migrations. Suivant
le rapport de quelques voyageurs , tous les
ans au mois de novembre, les Baleines-
Tranches s’éloignent du détroit de Davis ,
entrent dans le fleuve Saint-Laurent, 8c vont
mettre bas leur petit dans l’eau faumâtre,
entre Camourafca 8c Quebec. De là , au
mois de mars, elles repalfent régulièrement
avec le Baleineau vers les mers du pôle.
Il paroît donc qu’elles fe tiennent conf-
tamment dans les> mers du N o rd , 8c qu’elles
ne quittent ce féjour que pour mettre bas-,.ou
ïorfqu’elles font- poursuivies par leurs ennemis..
Dans ce dernier cas , on n’en trouve
ordinairement qu’une à la fois , a moins
qu’il n’y ait le mâle & la femelle , ou la
mère & fon petit. Celle- qui fut prife près
de l’îie'.de' C o r fe , & celle qui échoua- au
mois de décembre 1726 au cap de Hour-
. dec , dans la baie d e Somme, étoient feules.
Lés Cachalots au contraire fe plaifent à
changer de demeure , 8c à voyager par troupes
dans les mers étrangères. On en trouva en
*670 trois cents échoués* fur les côtes* de
l ’île Tireia;. en 16^0, cent deu-x animaux
de la même efpèce relièrent à fec dans le
port de Kairfton ;. & en 1784 * trente-un
grands Cachalots vinrent: échouer .fur la côte
occidentale d’Audierne,- en Rifle-Bretagne ,
dans la grève nommée Très~Couaren. Voici
les détails que j’ai reçus à ce fujet. ce Le
. ».dimanche iq mars,, à fix- heures du matin ,
»-.la mer étant fort grofîe 8c les vents fouf-
»- fiant dix fud’-oueft avec violence , o u en-
» tendit vers- le Cap-Ejlain des- mu gifle mens
» extraordinaires, qui fe propageoient à plus
» de trois quarts de lieues dans les terres.
» Deux hommes qui côtôyoient alors le ri-
» vage pouc fo rendre a une- chapelle voifine ,
» connue dans le pays fous le nom de Sai-nt-
» Huge-n, furent iaifis de frayeur ; 8c ayant
» porté leurs regards vers l’endroit d’où ve-
» noit ce bruit, ils aperçurent, un peu' au
» large, des animaux d’une grofleur énorme*
» qui s’agitoient avec violence dans la mer.
» G. s monflres, roulés par les vagues , s’ap-
» prochoient de la côte, en faisant un bruit
» épouvantable avec leurs queues,- dont ils
» battoient les flots v 8c avec leurs évents, par
» lefquels ils rejetoient avec fifflement une eau
»• éeumante* En voyant les premiers de ces
» animaux arriver fur labié, les deux fpe&a-
» teurs furent tentés de fuir. Leur effroi aug-
» menta encore, lorfqu’à ceux-là, ils en virent
» fuccéder une multitude d’autres * dont leur
» imagination frappée augmenta fans doute
» le nombre 8c la grandeur- Ils fe tranfpor-
» tèrent auffi-tôt à l’églife voiftne, pour an-
» noncer un évènement fî extraordinaire aux
» perfonnes qui s’y étoient raïïemblées pour
» entendre la melfe. Cette nouvelle fe ré-
» pandit bientôt jufqu’à Quimper,, qui- eft
»: diftant de huit lieues; 8c on vint en foule
» pour voir ces animaux *encore peu con-
» nus dans nos contrées ». En effet, ce dut
être un fpeétacle bien impofant de voir
réunis dans un petit efpace, ces trente-.uiï
animaux, dont le plus petit avoit au moins
trente-quatre pieds de lo n g u e u r& le plus
grand, quarante-cinq ils étoient difpofés
comme les arbres^ d’une forêt qu’on aur-oit
abattus pèle mêle. Ils ont vécu fur le fable
au moins vingt-quatre heures ;• on- dit même
qu’un d’entre eux n’eft mort que le mardi
matin. l’Abbé le Coz-, que j’ai- confulté
fur la caüfe de cet évènement, préfume'que
le froid rigoureux que nous éprouvâmes
dans les mois de janvier 8c de février ère
1784. ,, obligea c es animaux de quitter les
plages du Nord, 8c qu’en pourfuivant quel--
que banc de harengs• ou d’autres poiflons *
ils avoient échoué fur ces côtes.- « L e i j
» mars * d it-il, veille de leur arrivée ore
» vit avec furprife une multitude de petits
» poiffons fo jeter à la côte : ils étaient' lï
» effrayés , qu’on les prenoit à la main»
» Il entra aulîi ce même jour, dans le port
»’ d’Audierne, plufieurs Marjàuins>y dont fo
» nombre étonna ».-
Les Dauphins font en fî grand' nombre. 8c
fî répandus dans toutes les mers, qu’il n’effi
pas poffible- de lavoir s-’ils- entreprenaient des
voyages^