3 4 $ V o y a g e e s S i b é r i e ,
J’ai établi la partie Géographique de cette contrée »
d’après un canevas fondé fur des obfervations agronomiques
; mais j’ai borné mon travail à la feule route que j’ai
parcourue ; parce qu’il n’eft pas poffible de conftruire une
carte de la Ruffie d’après les feuls éclaircilTements qu’on
peut tirer de ces peuples,fur-tout pour les endroits dont
ils font éloignés. J’apportai d’autant plus de foin au détail
de ma route, que les cartes Rufles qui forment l’Atlas publié
en 1745, ne préfentent qu’un canevas très imparfait
de la Géographie de ce pays. On y voyage quelquefois
fans trouver fur ces cartes une feule pofitiondans des ef-
paces de près de cent lieues. La route de Cafan a OiTa eft
dans ce cas, quoique l’on traverfe une partie de pays
très peuplée, & qu’on rencontre à chaque quart de lieue
des poteaux où les diftances font marquées.
Cet Atlas Rufle, malgré fon imperfeâion, fait honneur
à ceux qui l’ont publié, & il fuffiroitfeul pour immortali-
fer Pierre 1“. Avant le regne de ce grand homme, il étoit
défendu, fous peine de mort, d’acquérir les plus petites
connoiflances de cet Empire. Depuis fon regne, l’Académie
de Saint-Pétersbourg a ramafle des matériaux con-
fidérables pour perfectionner la Géographie de la Ruffie :
des perfonnes habiles travaillent, depuis plufieurs années,
à les rédiger ; & fans doute le Public jouira bientôt du
fruit de leurs travaux,
Je donne, dans cette partie de mon Ouvrage, le détail
des matériaux que j’ai employés, afin qu’on puiffe juger
du degré de précifion de mesréfultats, &les refrifier par
les nouvelles connoiflances qu’on peut acquérir avec le
temps.
Il feroit bien à délirer que les Géographes accompa-
gnaflent leurs Cartes de mémoires inftruflifs, qui miflent
le Le&eur en état de juger des fondements de leurs travaux.
Quelques-uns l’ont fait dans certaines parties de leurs
Ouvrages, & en particulier MM. Delifle, Buache, Dan-
ville &Bellin. C eft la feule route qu’on puifle fuivrepour
faire des progrès dans la Géographie. On ignore, fans ces
mémoires, quelles font les parties perfeâionnées d’une
Carte, celles qui demandent de l’être ; fouvent , en
croyant les reélifier, on dénaturé les contrées connues ,
on iubftitue des erreurs a des vérités, par l’ignorance des
travaux, peut-êtreimmenfes, de ceux qui ont difcuté les
Voyageurs. C’eft ce qui eft arrivé à l’égard de la communication
de rOrénoque avec la riviere des Amazones î
communication établie par les anciens Géographes, fup-
primée par leurs Succeffeurs, & rétablje par les Modernes
d’après des témoignages authentiques : e’eft ainfi que
la Californie eft redevenue de nos jours une Péninfule,
comme on l ’avoit reconnue au temps de fa première découverte
, quoique regardée depuis long-temps comme
une Ifle fur les Cartes.
Lesnouveaux Voyageurs fe font beaucoup occupés
e la Géographie : des perfonnes très inftruites dans les
langues étrangères, fe font empreffées de procurer ces
voyages a leurs concitoyens ; mais plufieurs, dans l’intention
d en rendre la lefture plus agréable, ont fuppri