S’il était encore besoin d ’apprendre aux naturalistes
combien les mers les plus voisines de nous sont riches en
olijets in co n n u s, combien toutes les plages, on p o u r r a it,
sans h y p e rb o le , dire toutes les v a g u e s, en fourmillent
p o u r ceux do n t l’oeil saurait les voir et la main les recueillir,
le Mémoire dont nous faisons l ’analyse en serait une
preuve.
Dans cette relâche de quelques jo u r s , outre to u t ce
que MM. Quoy et Gaimard o n t recueilli d ’objets deja
d é c rits , ils o n t observé vingt-sept espèces qui leur ont
pa ru entièrement nouvelles, et do n t une partie leur a
semblé assez différente de to u t ce que l’on connaît, p our
q ii’ils aient c ru devoir former dix genres nouveaux.
Ce qui expliquera ce gran d nombre d ’espèces, c est
(ju’ils se sont attachés principalement à cette classe de
Zoophytes que leur ténuité, leur transparence en quelque
sorte cristalline dérobe depuis des siècles aux y e u x , non-
seulement du commun des p é cheurs, mais de presque
tons les naturalistes. Forskal, lorsqu’il se ren d it en Arabie,
avait commencé à en étudier et à en décrire quelques-
uns ; mais depuis la publication de ses manuscrits, il s’est
écoulé plus de tren te ans jusqu’à ce que l’on se soit
remis à cette étude. P é ro n fut le premier qui la re p rit lors
du voyage de B au d in , d ’après les instructions qui lui
fu ren t données p a r l ’Académie. 11 enrichit la science dans
la relation de ce voyage de plusieurs belles espèces, et
l’on aura long-temps à re g re tte r que sa mo rt ait privé le
public d ’une multitude d ’autres q u ’il avait recueillies dans
la Méditerranée, et qui sont restées enfouies dans quelque
lieu inconnu avec les autres collections q u ’il y avait faites.
Cet inconvénient n ’aura pas lieu pour celles que
MM. Quoy et Gaimard ont découvertes ; ils en ont envoyé
de nombreux échantillons, q u ’il sera facile de comparer à
leurs figures, et même au besoin d ’étudier encore plus à
fond q u ’ils n ’o nt p u le fa ire , dans les circonstances peu
commodes où ils se trouvaient.
Le premier de ces animaux q u ’ils aient observé, est ce
mollusquesingulierqueForskalavaitnomméPiero^rÆcAo;«,
et que l’on a re co n n u , dans ces derniers temps , être le
même qui p o rte cette jolie coquille conique, transparente
comme du v e rre , que l’on a nommee Carinaire.
L’un de nous en avait commencé l’anatoinie, mais
d ’après un exemplaire incomplet. MM. Quoy et Gaimard,
qui n ’en ont pas eu n o n plus un individu en tier, en confirmant
ce que le p remier observateur y avait rem a rq u é ,
ajoutent quelques faits à ce q u ’il en avait d i t , notamment
sur la structure de la langue qui se trouve ressembler
beaucoup à celle des Gastéropodes p a r les crochets dont
elle est g a rn ie , et sur celle des yeux où ils se sont assurés
de la présence d ’un cristallin globuleux et d u r comme
celui des Poissons. Ils n ’o nt p u suivre le système alimentaire
plus loin que l’oesophage, à cause de l ’imperfection
de leur individu ; mais comme nous avons eu le b o n h eu r
d ’en obtenir un en tie r, avec sa coquille, nous pouvons
annoncer que l ’organisation de cette espèce re n tre dans
celle de l’o rd re des Mollusques auquel elle appartient. Elle a
un long in te s tin , un foie, u n coeur, en un mot l’appareil
observé dans cette classe d ’animaux. La masse charnue
qui entoure sa bouche et fait jo u er ses organes de la déglutition
, ressemble même beaucoup à celle de l ’Aplysia.
Nous mettons provisoirement une préparation de cet
individu sous les yeux de l’Académie, et nous nous p ro posons
de lui lire incessamment un Mémoire sur ce sujet
dont nous nous occupons depuis long-temps. Nous y coin