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S i l’intrépidité et le courage sont les caractères moraux qui distinguent les
aigles des autres oiseaux de proie, sans contredit celui dont il est question
ici est autant un aigle que celui dont nous avons parlé sous le nom de grif-
fai’d; car il est le tyran de tous les grands oiseaux qui habitent ses états;
c’est un vrai despote, qui, abuscint de ses moyens, fait la guerre à tout ce
qui l’environne, et immole tout ce qui l’approche. Destiné à faire la chasse
au peuple ailé, la nature l’a doué d’une grande aisance dans son vol ; une
très-longue queue lui sert admirablement bien pour se diriger avec agibté,
et parer aux revireraens fréquens et prompts qu’emploient les oiseaux qui
cherchent à éviter ses cruelles serres ; écarts brusques , qui, presque toujours,
les font échapper à tout autre oiseau de rapine, mais qui deviennent
inutiles avec celui dont nous parlons.
C ’est à la poursuite des ramiers que l’on peut admirer l’adresse du Blan-
chaid ; il semble mCmc de préférence chasser ces oiseaux, dont le vol est
le plus rapide et le plus varié ; et c’est sur-tour de l'espèce que j’ai décrite
sous le nom de ramron dont il fait sa proie ordinaire. J’ai vu des faucons,
des autours, des éperviers, des hobereaux, etc., poursuivre nos ramiers
en Europe ; mais je les ai peu vu réussir dans cette chasse, morne en se jetant
dans des volées entières de ces oiseaux. Leurs moyens étoient, à la vérité
, différens de ceux qu’emploie le Blanchard avec tant de succès. Les
oiseaux de haut vol poursuivent à tire d’aîle leur proie, et cherchent à
l’aborder, soit par dessus, soit de coté, afin de s’en saisir ; celui-ci, au contraire
, mesure son vol, se domine et ne donne rien au hasard. Le ramron,
comme on peut le voir dans sa description, s’élève au-dessus des grands arbres,
et semble s’amuser d’une singulière manière de voler qui n’appartient
qu’à lui : c’est alors que le Blanchard part de l’endroit où il étoit en embuscade
; et s’il peut arriver sous le ramron avant que celui - ci ait eu le
tems de se précipiter dans le bois, pour se cacher dans les broussailles,
c en est lait de lui : tous ses détours, tous ses mouvemens brusques et réitérés
lui deviennent inutiles; son ennemi parc à tout, et semble chercher
plutôt à le lasser qu’à le poursuivre. Toujours au-dessous de lu i, son unique
soin est de l’cmpecher de gagner les arbres; et plutôt le ramion s’y
précipite,