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vinreiil au-devant de nous; leur eondnile fut très-ainieale; ils
nous présentèrent de l’eau avec de la glace: tous avaient un coutelas
au côté. Quand nous retournâmes à bord, plusieurs bateaux
nous accompagnèrent ; on leur fit présent de tabac. Ils
examinèrent notre navire en gens intelligents. Un vieillard nous
montra une tabatière avec le portrait de l’impératrice Catherine II,
qui provenait sans doute de l’expédition de Billings et Sarytcbeff.
Ce vieillard but volontiers de l’ean-de-vie, elle lit aussi très-
grand plaisir aux autres Tchonktchis. On dit que ce peuple, de
même que d’autres habitants de l’Asie boréale, sait préparer une
boisson enivrante avec des champignons.
En allant ensuite au sud vers la baie Saint-Laurent, nous vimes
la mer couverte de morses, qui jouaient à la surface; des baleines
entouraient le vaisseau et lançaient l’eau en l’air par leurs
évents. C’était un singulier spectacle que celui de tous ces animaux
monstrueux réunis en foule dans ces parages peu fréquentés.
Le vent contraire ne nous permit d’arriver que le 8 dans la
baie Saint-Laurent, où nous mouillâmes en vue d’un village
de Tcbouktcbis situé sur une hauteur.
Deux bateaux vinrent aussitôt nous accoster: ensuite on descendit
à terre et l’on visita le village; les maisons étaient en cuir.
Les Tcbouktcbis, sans nous témoigner beaucoup d’amitié, mirent
néanmoins des égards dans la réception qu’ils nous firent : les
femmes étaient présentes; ils nous servirent de l’eau fraîche el
de petits morceaux de chair de baleine. Nous étions dans la maison
d’un vieillard, qui paraissait exercer le commandement dans
cet endroit; car, au moindre signe qu’il faisait, cbacnn s’empressait
de lui obéir , il était comme un père de famille an milieu
des habitants de ce village.
Ayant avec nous un Kamtchadale qui avait été à Tighil, et qui
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savait (piekpies mots de Tclioiiktcliis, nous demandâmes au chef
s’il pouvait nous donner des rennes. Il iions en promit, et envoya
aussitôt des messagers dans l’intérieur pour amener quelques-uns
de ces animaux. Les Tcbouktcbis en ont des troupeaux nombreux
cjn’ils tiennent à quelque distance de la côte.
Ils vinrent à leur tour nous voir à bord. Nous fûmes très-satisfaits
de leur conduite; ils nous donnèrent des phoques el une
grande quantité d’oies sauvages. Enfin, ils nous annoncèrent
que les rennes étaient arrivés : il y en avait cinq en vie et deux
qui avaient été tués et préparés. Une foule nombreuse nous
attendait sur le rivage. On nous demanda s’il fallait tuer les
autres rennes; nous y consentîmes : aussitôt un homme i-obuste
prit l’animal par sa ramure, un antre le perça au coeur avec
une lance; puis ils le laissèrent courir en rond, attaché à la
longe qui le tenait. Tons les spectateurs regardaient avec beaucoup
d’attention ; quand le renne ne tarde pas à tomber et meurt
sans éprouver beaucoup de convulsions, ils en tirent des pronostics
favorables pour l’avenir. Nos cinq rennes n’ayant pas langui
long-temps avant d’expirer, les Tcbouktcbis en témoignèrent
leur satisfaction par des cris de jo ie , des danses et des chants
qu’ils accompagnèrent dn son du lambomin. Cet instrument est
le même que celui de l’île Saint-Laurent, du golfe de Kotzebue
et d’Ounalachka. Il consiste en un cercle de bois recouvert d’une
vessie, et muni d’nn manche pour le tenir d’une main; de
l’autre on a une baguette qui sert à le frapper; le son qu'il
rend paraît très-agréable à tous ces peuples.
Nous fîmes beaiicoiqi de présents <à ces Tchonktchis; les aiguilles
surtout furent très-bien reçues des femmes.
Le t6, étant retournés à terre poui- prendre congé de ces braves
gens et surtout du vieillard, nous les priâmes tous devenir nous
voir à bord de uolie vaisseau. Le vieillard écouta cette invitation
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