le monde venait au-devant de nous quand nous débarquions ; aujourd’hui
nous n’avons vu personne. Nous étant avancés, les indigènes
se sont éloignés; nous en avons appelé quelques-uns
qui se sont arrêtés et nous ont attendus d’nn air craintif et tremblant.
Cependant l’amitié parvint à se rétablir; alors ils nous
prièrent de ne plus lancer de feu sur file ; ensuite ils nous montrèrent
toujours de la défiance.
Le II (aS), nous avons quitté les iles Saltikoff; elles sont
peuplées au moins trois fois autant que les iles Roumanzoft.
Étant mouillés près de Aïrik, nous avions aperçu du haut
du màt, dans le sud-ouest , un groupe nommé Aour par les
insulaires ; nous finies voile de ce cô té , et à trois heures nous
avions franchi une passe située sous le vent, où nous avons jeté
l’ancre. Plusieurs pirogues s’approchèrent aussitôt, et sur notre
invitation , les insulaires montèrent à bord. Ils étaient tous tatoués
cà l’exception de deux hommes, qui avaient en outre le teint
beaucoup plus clair. L’un d’eux qui nous faisait sans cesse des
signes d’amitié , portait néanmoins sur le bras , des figures de
poissons. Il nous dit qu’il voulait rester avec nous . le soir lorsque
les pirogues se disposèrent à retourner à ter re, les autres insulaires
l’appelèrent et s’efforcèrent de le dissuader de sa résolution,
mais il y persista. Il nous apprit qu’il s’appelait Kaclou, et qn’il
était natif de l’île d’Oulea, c’est une des Carolines ; étant parti
pour la pêche .avec trois de ses compatriotes , nn coup de vent
les poussa très-loin en me r , et ils ne purent plus retrouver leur
ile. Ils furent ainsi ballottés pendant huit lunes; enlin ils aperçurent
les iles Aonr. Ils y furent reçus très-amicalement, cependant
on voulait les dépouiller des morceaux de fer qu’ils avaient;
le chef les protégea. Kadou vivait depuis quatre ans dans ces Iles
avec ses camarades; et quoiqu’il y fût bien traité, il de.sirait de
venir avec nous parce qu’il avait entendu [larler dans son pays
de erands bâtiments comme le notre.
Le soir à souper, Kadou fut invité à nous suivre dans la
chambre; les miroirs, les assiettes, les divers ustensiles dont nous
faisions usage à notre repas, ne parurent lui causer aucune surprise.
Il attendit que nous eussions commencé à nous en servir,
pour imiter notre exemple; enfin il se conduisit comme un
homme qui a constamment été habitué au genre de vie des Luropéens.
Il mangea de bon appétit, mais modérément, de tout ce
que nous lui offrimes; il regarda d’abord la viande salée, et ne
se hasarda à en manger qu’après nous. Il aimait beaucoup le ris
au sucre, et prit grand plaisir à boire un verre de vin de Madère.
Il admira la transparence du verre. Il alla ensuite se coucher sur
le lit qu’on lui avait préparé, et y dormit tranquillement. A compter
de ce jour , Kadou nous a constamment accompagnés, tous les
insulaires paraissaient avoir pour lui beaucoup d’estime et d’affection.
Ceux-ci nous apprirent que les iles O td a , Oudirik, Medid,
Kaben, étaient alliées avec Aour, contre Arno,Medouro et d’autres
auxquelles elles faisaient la guerre. Celles-ci avaient, l’année précédente,
envoyé beaucoup de pirogues armées qui avaient pillé
Aonr et les iles confédérées; « les brig.ands, ajoutèrent les insulaires
, ont tout détruit. Mais actuellement notre confédération
arme, nous préjiarons des provisions, nous équipons nos pirogues.
Lamari, le grand chef, visite toutes les iles qui lui obéissent,
pour rassembler les hommes de guerre. » Les insulaires
finirent par nous inviter à prendre part .à la guerre et nous
jirier de leur donner du secours. Aour est situé par 8°. 18. 4^ ■
nord et 188°. 5 i ’. 3o”. à l’ouest de Greenwicb (191°. 11’. 45”. o.
de Paris).
Le i 5 (27) , nous en sommes partis et le 17 février(i". mars),
nous nous sommes approchés d’un groupe que les insulaires
nomment A ï lu , et que nous avons appelé iles Krusenstern.
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