Bientôt nous laissâmes tomber l’ancre cà Otdia; la pirogue nous
accosta: Laghédicak vint à bord; Il nous r<aconta que Rarick, et
la plupart des habitans mâles du groupe, avcaient cavec leurs pirogues
accompagné Lamai'i qui était allé faire la guerre aux insulaires
d’Arno; il ajouta que Lamari avait emmené les chèvres
que nous avions laissées i c i , et qu’il avait mangé les ignames que
nous avions mises en terre; Les cochons étaient morts faute d’eau.
Nous ne tardâmes pas non plus, cà notre grcand chagrin, à voir
que le petit jardin que nous avions cultivé, et où nous cavions
semé des melons d’eau et des potirons, avait entièrement disparu.
Kadou était toujours dans l’intention de nous accompagner, surtout
sachant que nous avions le projet de visiter les iles Carolines,
ce qui lui donnait l’espoir de revoir sa patrie. Mais dès qu’il eut
appris que son fils qui demeurait sur l’ile ifAour l’appelait souvent
par son nom et regrettait son absence, la tendresse paternelle
l’emporta. Il nous déclara aussitôt, qu’il voulait rester dans
cet archipel.
Cette résolution nous contrariait beaucoup; Ccar Kadou nous
aurait été très-utile pour notre voyage aux Carolines. Il commençait
à nous comprendre passablement; il savait des mots de toutes
les langues qu’on parlait à bord, et il nous en fit connaitre beaucoup
de celles qu’il parlait ; nous pouvions donc espérer d’apprendre
dorénavant de sa bouche une foule de choses intéressantes sur Radak
et notamment sur les Carolines, oit il était né. D’un autre côté il
n’était pas moins important qu’il restât sur l’arcbipel où il se trouvait;
car il était parfaitement au fait de nos bonnes intentions pour
les insulaires. Il savait combien tous les animaux, les chiens, les
chats, les cochons, les chèvres, ainsi que les différentes graines
que nous avions apportées, étaient des objets intéressans jioni ce
pays. Il nous promit de consacrer tout son temps à les soigner ,
et d’instruire les insulaires de leur usage. Nous ne réussîmes pas
dans fessai que nous en finies ; nous avions à bord des melons
d’eau, nous voulûmes leur faire goûter ce fruit si salubre et si ra-
fraicliissant, pensant bien qu’ils f aimeraient; nous étions dans une
grande erreur; ils en [irirent un morceau, firent semblant de le
goûter, et finirent par le jeter. Ils mangeaient volontiers le sucre et
la viande salée; ils trouvaient bon goût à celle-ci, dont ils ne
mangeaient pourtant qu’avec une espèce d’hésitation, peut-être
parceqii’ils la prenaient pour de la chair humaine ; cependant ils
s’en nourrissaient volontiers.
Kadou pouvait réellement devenir le bienfaiteur de cette peuplade ;
ce motif était d’un intérêt trop puissant pour que nous nous permissions
de nous opposer à son plan. Au contraire nous lui fournîmes
tous les moyens de feffectuer. Nous lui finies présent de
toute sa garde-robe, qui était très-nombreuse ; tout le fer et tous les
grains de verroterie qu’il avait rassemblés à bord, étaient pour lui
un trésor considérable. Nous lui donnâmes une quantité de couteaux,
de scies, de crochets, de pelles, de casseroles; parmi
toutes les choses précieuses que nous prodiguâmes aux habitans de
ces iles, nous mêlâmes aussi des armes. Malheureusement on avait
déjà distribué aux chefs d’Aour de longues piques de fer; nous leur
procurâmes de même des moyens de s’égorger beaucoup plus facilement,
ces armes ne pouvant exciter que la jalousie et la
guerre entre les pauvres insulaires; le chef qui en deviendra le
possesseur, sera le dominateur de farcliipel. D’autres ne lui feront
la guerre que pour s’en emparer; par conséquent, tant que le fer
durera, il n’y aura pas de repos pour ce peuple. Lst-ce un bienfait
qu’ils ont reçu de nous?
Lorsque nous étions au moment de partir de Radak, Kadou pria
le soir le capitaine de descendre sur le rivage et de dire aux insulaires
de respecter sa propriété, parceque, si quelqu’un et même
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