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(le pierrier à bord de nos canots, nous limes nu grand fèn , et,
après avoir pris quelques instants de repos, nous nous embarquâmes
au moment où il commençait à fiiire obscur. Nous étions
déjà assez éloignés de terre quand le vent devint très-fort; l'excès
de la lassitude ne permettait pas à nos matelots de ramer
avec assez de vignenr, nous avancions à peine ; la mer était très-
grosse; le canot du capitaine embarquait beaucoup d’eau que l’on
était sans cesse occupé à vider. Ce ne fut (pi’à quatre heures
du matin que nous arrivâmes à bord.
.4. sept heures plusieurs bateaux se détachèrent de terre, malgré
la force du vent. Quand les insulaires furent arrivés le lono
du navire, ils attachèrent de chaque côté de leurs bateaux des
outres de peaux de phoque gonflées d’air, afin de ne pas chavirer
par l’agitation de la mer. Ils se mirent à trafiquer avec nous.
Lorsque nous leur eûmes dit que nous allions quitter le pays, ils
nous invitèrent à descendre à ter re, en nous donnant à comprendre
que nous y trouverions des femmes pour notre service.
Le 3 août nous revîmes la baie de Chichmareff, et le 5 les iles
Gvosdeff. Le vent soufflait avec violence. Nous n’étions pas loin
de la côte d’Asie; la mer était couverte de morses. Le capitaine
donna son nom au golfe (|^ue nous venions de parcourir.
Nos communications avec ce peuple étaient assez difficiles par
la défiance mutuelle qui régnait entre uous, ce qui nous empêcha
d étudier leurs moeurs et leur caractère, n’ayant en aucune
occasion de les observer dans leur intérieur. Ils se montrèrent
toujours brusques, paraissant compter beaucoup sur
leurs forces. Dans le trafic qu’ils firent avec nous, ils témoignèrent
beaucoup d’avidité pour les objets que nous possédions ;
mais ils en calculaient d’abord la valeur; et, quelque fût leur extrême
désir de l’obtenir, ils s’obstinaient avec force à n’en point
donner plus (|uils ne l’avaient estimé; ils aiment beaucoup à se
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parer; mais, dans le choix des bagatelles que nous avions à
leur usage, ils préféraient avec raison le solide à l’agréable.
Malgré leur pauvreté, et le peu de connaissance qu’ils ont des
conlenrs, ils emploient avec beaucoup d’intelligence le peu qu’ils
ont à leur disposition. Le ronge, le jaune, le brun et le noir sont les
seides teintes qu’ils peuvent mettre en usage pour leurs vêtements;
mais ils les nuancent et les marient parfaitement. Leur goût pour
le dessin est très-prononcé. Les planches III, IV el V représentent
des objets dessinés et scidptés par eux, à la vérité bien grossièrement,
mais pourtant bien caractérisés.
Sur les rochers des hauteurs de l’île Saint-Laurent, nous avons
trouvé un crâne humain; dans la baie de Saint-Laurent, nous
trouvâmes aussi des restes d’ossements brûlés , rassemblés en
petits monticules, sans pouvoir déterminer à cfuels individus ils
durent appartenir. Plusieurs de nos compagnons conjecturèrent
que ce lieu était sans doute destiné aux funérailles : le fait esl
que les Tchoutkchis sont encore dans rusage de brûler leurs
morts.
Dans le golfe de Kotzebne, nous trouvâmes encore, sur une
hauteur, une grande quantité de tombeaux, qise l’on reconnaissait
de loin par les pilliers plus ou moins nondireux c|ui les
entouraient. Les ossements de chaque individu étaient ramassés
sous la mousse en un petit tas au pied de ce pillier. Dans chaque
tombeau, on voyait une grande quantité d’ustensiles brisés, de
traîntiaux, de flèches, et de ces cailloux taillés en pointes dont ils
forment le bout de leurs flèches. On avait enterré avec eux les
objets (pi’ils affectionnaient (fe leur vivant et dont ils se servaient
avec succès. Ce qui parait extraordinaire, c’est que nous trouvâmes
plusieurs têtes, mais jamais nous n’y vimes la mâchoire
inférienre. Le crâne que j’ai rapporté dut appartenir à une femme,
à en juger par sa forme allongée. .l’ai eu rbonneur de le présenter
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