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ILE DE PAQUES
ou VAIHIOU,
ET ILE RUMANZOFF.
L e 16(28) mars de bon matin nous eûmes connaissance de l’ile de
Pâques ou Vaïhiou. On voyait sur la côte septentrionale des espaces,
qui avaient l’air d’être couverts d’arbres, mais ce n’étaient
probablement que des bananiers. Bientôt on aperçut, à l’aide des
lunettes d’approche, les monuments dont Cook et la Peyrouse
ont parlé ; ensuite on découvrit de la fumée dans plusieurs endroits.
Nous marchions lentement, de sorte c[ue nous n’attei-
gnimes qu’à midi la baie de Cook.
Deux Pirogues chétives, pourvues de balanciers, et portant
chacune deux hommes, s’avancèrent vers nous. Les hommes nous
faisaient des signes et poussaient de grands cris en montrant la
terre, et tenant des filets de pêche à la main. Malgré toutes nos
invitations, ils refusèrent de s’approclier, et bientôt rebroussèrent
chemin.
On envoya aussitôt un canot pour sonder la baie et trouver
un mouillage. Les insulaires étaient rassemblés en foule sur le
( )
rivage. Un grand nombre se jetèrent à la nage, et apportèrent
des bananes, des ignames, des cannes à sucre, cju’ils échangèrent
contre du fer; ils ne faisaient pas grand cas des bagatelles qu’on
leur offrait. Un insulaire, après avoir reçu des ciseaux qui étaient
le prix des bananes qu’il tenait à la main, se mit à fuir sans
avoir livré sa denrée. On l’appela inutilement. Ses camarades,
qui entouraient le canot, semblaient se moquer de nos gens,
de sorte que l’officier qui commandait l’embarcation fut enfin
obligé de tirer à plomb sur le fuyard. Celui-ci jeta les fruits et
se hâta de gagner la terre, ses camarades le suivirent.
L’aspect de l’île était assez aride; toutefois-elle nous parut
moins misérable qu’à Cook et à la Peyrouse. Toutes les pentes
des hauteurs étaient partagées en champs plantés de différents
végétaux, dont les nuances variées produisaient un effet très-
agréable; sans doute ils doivent aux bienfaits de Fexpédition
française commandée par la Peyrouse plusieurs ]ilantes utiles qu’ils
cultivent aujourd’hui. On apercevait de tous côtés des hommes
qui couraient au rivage; la plupart étaient nuds; il y en avait
cependant cjuelques-uns qui portaient des espèces de manteaux
jaunes et blancs de différentes dimensions.
Dès que nous eûmes laissé tomber l’ancre, deux canots montés
par vingt-deux hommes bien armés , se dirigèrent vers la terre.
Nous nous en approchions, lorsque les insulaires se mirent à
nous jeter des pierres; les uns criaient, les autres nous faisaient
des gestes menaçants. Le rivage était couvert au moins de six
cents hommes qui avaient l’air de vouloir s’opposer à notre dé-
barc|uement. On tira quelques coups de fusil à poudre; alors
on en vit un grand nombre se réfugier derrière les rochers ; le
bruit passé, quand ils reconnurent n’avoir point de mal, ils sortirent
de leur cachette , en riant et en se moquant de nous.
On ne pouvait pas raisonnablement se venger des plaisante