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est située à deux lieues de la còte. La route est droite en plusieurs
endroits, et constamment bordée de beaux cocotiers. La
bonne odeur exhalée par les orangers et les citroniers en (leurs
anima nos matelots.
Il était tard quand nous arrivâmes à Agaiia. Le gouverneur
Don José de Medinalla y Pineda, nous reçut très-bien. Sa maison
réunissait le luxe de l’Europe à celui des Indes. Durant notre
séjour chez lui nous fûmes traités de la manière la plus somptueuse.
Nous cherchâmes vainement les habitans indigènes de l’ile:tous
ceux que nous vimes sont devenus à peu près espagnols ■. ils savent
à peine leur langue ; au moins comptent-ils dans celle de leurs
maîtres.
Comme nous désirions connaitre quelqu’un des usages des indigènes,
le gouverneur fit exécuter, un soir, devant nous, par une
soixantaine de jeunes gens, la danse de Montezunia, qui est de
bon goût et très-figurée.
En 1783, la population de cette ile était de 3 ,2 3 i ; en 1816,
de 5,38g; il y a donc eu en trente-trois ans une augmentation
2,158 individus. Quelle différence du nombre primitif, que les
anciens voyageurs portent à 44>ooo !
A l’exception de l’espèce de chauve-souris nommée vampire, le
seul mammifère indigène de cet archipel est le rat, si généralement
répandu aussi sur toutes les iles dn Grand-Océan. Les espagnols
ont introduit à Guajan et dans les Carolines nos animaux
domestiques, le guanaco du Pérou , et le cerf des Plnhppines.
Plusieurs de ces derniers animaux sont devenus sauvages. On y
voit divers oiseaux terrestres, entre autres des faucons ; nous observâmes
parmi les amphibies un iguane et une grande tortue de
mer; et parmi les zoophytes quelques espèces d’holothuries qm
sons le nom de trèpang, biche de mer et balate , forment une
blanche de commerce si importante avec la Chine. On recueille
ce zoo])byte sur les rochers; quelquefois il a jusqu’à deux jneds
de longueur et la grosseur du bras; il est tout noir; on lui ouvre
le ventre, on en fait sortir toute la partie aqueuse, puis on le met
sécher au soleil. Bien desséché, il a à peine la longueur du doigt.
Pour le manger on le coupe en morceaux très-minces, on le fait
bouillir et il se transforme en une gelée qui est très-recherchée des
Chinois et qu’ils préfèrent même, pour les vertus qu’ils lui attribuent,
aux nids d’oiseaux. Ces zoophytes étaient très-communs a Badak.
Les habitants n’en connaissaient pas l’usage. Aux Mariannes on n’cn
prépare pas lieaucoup ; mais les habitants des Carolines y en apportent
une grande c[uantité. Nous avons vu vendre à Manille
une piastre, une piastre et demie, et jusqu’à deux piastres, la livre
de cette substance.
Cette particularité me rappelle le goût des chefs des iles
Sandwich pour les nageoires des requins, qu’ils regardent comme
aphrodisiaques.
L’indigo et le cotonnier sont des plantes très-conmmnes aux
îles Mariannes ; mais on n’en tire aucun parti, et l’on est obligé de
faire venir de Manille les toiles de coton blanches, ou teintes en
bleu. En revanche on cultive beaucoup de tabac; les deux sexes
en fument également la feuille. Cette colonie est la seule de celles
qui appartiennent à l’Espagne où l’on puisse librement cultiver
le tabac, qui est ailleurs nn monopole du gouvernement.
Le 17 ( 2 g ) novembre nous partimes de Guajan; le 27 (8 décembre),
nous aperçûmes l’ile Bicbmond ou Ballingtang, les
Babnyaiines, et les iles Bachi ; toutes ont un aspect volcanique,
et |)lusieurs sont trés-luuites.
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