jolies promenades de découvertes nous avons faites sur les deux rives de ce torrent, à
la recherche des plus beaux points de vue et des plus inédits !
Nous sommes à Willigen où aboutit la route du Grimsel et celle que suit le tram
qui relie la gare de Meiringen aux gorges de l’Aar. Ces dernières, d’entre les plus
grandioses de la Suisse, méritent le petit écart nécessaire à droite; en trente minutes
dès leur entrée, on les parcourt tout entières et l’on en sort à l’autre extrémité sur la
route du Grimsel près d’Innertkirchen d’où l’on peut revenir à Willigen; leur largeur
varie de un à quarante mètres et leurs parois atteignent une centaine de mètres de
hauteur. Meiringen lui-même, autrefois un petit village, est actuellement une petite
ville reconstruite en pierre depuis l’incendie de 1891 qui lui fit tant de mal. Tôpffer
s y arrêtait déjà, il descendait au « Sauvage » qui a longtemps été le principal hôtel
du lieu ; aujourd’hui il a toute une nuée de concurrents. C ’est un pays à pa rt; en
effet, ce n est plus la montagne proprement dite, quoiqu’elle en soit à proximité
immédiate ; ni la plaine non plus, quoique la vallée soit assez plate. Meiringen tient
de ces deux caractères, on y rencontre en foule de jolis tableaux, des sites agrestes
ou d un e réelle sauvagerie, où l’on peut faire chaque jour et pendant longtemps de
nouvelles excursions. Il faut citer au moins en passant les cascades et les Gorges de
1 Alpbach, le plateau charmant du Hasleberg, où passe la route qui mène au
Brünig.
C est le pays des contrastes et ils en sont le grand charme. Qu’est-ce, en
somme, qui nous fait le mieux réaliser la beauté spécifique des paysages qui
passent sous nos yeux, sinon la loi même des contrastes ? E t n’est-ce pas là aussi ce
qui fait l’intérêt particulier d’un voyage en Suisse, quand il est bien combiné ? On ne
saurait trop insister sur la nécessité de préparer avec soin ses programmes de voyage
en ayant toujours soin d’en faire quelque chose de varié, dans lequel un certain genre
de tableaux fera valoir par contraste des aspects qu’autrement l ’on n’aurait pas su
apprécier ou simplement remarquer. L a variété seule rend impossible la satiété ; il ne
faut pas comme certaines personnes se cantonner dans un genre unique de nature, ne
pas se borner à parcourir par exemple les bords des lacs ou leur surface, ou ne voir
de beau que les glaciers, ou ne rechercher que les pics scabreux; il ne faut pas même
se confiner dans les vallées du versant Nord des Alpes, il faut aussi aller voir celles
du versant méridional. Il doit y avoir de tout dans un programme de voyage bien
conçu : des plaines et des montagnes, des lacs et des gorges, des glaciers et des
pâturages, des cimes austères et des sommets audacieux, des vallées sauvages et
bouleversées, des vallons riants et doux; il faut qu’il y ait des jours chauds, des jours
froids ; de la pluie, de la neige, de l’orage, de la tourmente, comme de ces journées
où tout est lumière et gloire; il faut quelques petites aventures, tournant bien au bon
moment, cela va sans dire, autant que de ces heures dans lesquelles tout s’arrange
au mieux ; il faut savoir s’arrêter une fois dans un Palace, si l’on n’a pas la bourse
trop plate, rien que pour voir ce que c’est, quitte à y toiser avec dignité le splendide
ROSENLAUI-MEIRINGEN-BRIENZ ET R0THH0RN. --- DU GIESBACH A LAUTERBRUNNEN I I I
Monsieur qui croit très chic d’y dépenser jusqu’à mille francs par jo u r (authentique !)
entouré d’amis très intéressés; mais il faut savoir en même temps utiliser le moindre
des hôtels, les lits de camp de nos cabanes, le foin de nos chalets, les planchers des
masures abandonnées, ou même le sol pierreux de quelque haute barme inconnue,
ou, c est le dernier cri ! ■—■ la hutte de neige hâtivement construite sur un glacier
où la nuit vous a surpris.
Malgré l’intérêt que présenterait un séjour prolongé en ces lieux, il nous faut
aller plus loin, car notre tâche n est pas terminée. Un ami nous a vivement conseillé
l’occasion, par les reflets du cou-
courir la surface d’un bleu-gris, souou
à telle partie de celui des Quatre-
0?. . - ' h ' i i plein d’un charme discret, plus ré-
— * « S servé dans son accueil que le lac
^ de Thoune, plus mélancolique, mais
' AfejiS plein de caractère.
Meiringen. Gorges de l’Aar. Quand, après avoir poussé jus