Jungfrau vue du Harder.
des glaciers ! E t il en a rapporté de très beaux souvenirs et beaucoup de connaissances
utiles. Il ne regrette donc pas cette marotte ; il a même la naïveté de penser
qu’un jour quelque illustre original découvrira à nouveau le charme des grands chemins
!' Quand les hommes lassés des courses, de la voiture, du cheval, de la bicyclette,
de l’auto, du ballon dirigeable, de l’aéroplane, se mettront en quête d’inédit,
d’un sport, en mesure de restaurer lés systèmes nerveux démolis, les muscles devenus
flasques, les teints fanés et sans v ie... notre original se lèvera et criera : Eurêka !
Retournons à la grande route !... Oh ! non pas à la grande route quelconque, mais à
Interlaken vu du Harder.
la route bien choisie, intelligemment distribuée en étapes, la route devenant peu à peu
chemin de dévestiture, campagnarde, remplie d’ornières et de mauvaises herbes ! Il y
aura même des primes aux cantonniers qui auront le mieux su cultiver la mauvaise
herbe en bandes sympathiques et molles au pied. D’ici là, essayez donc toujours des
routes qui relient Thoune à Interlaken, à Brienz, à Lauterbrunnen et à Grindelwald,
et vous verrez ! En été choisissez vos heures, vos jours, le matin de bonne heure et
l’après-midi trois à quatre heures avant le coucher du soleil ; toutes les heures du jour
sont bonnes pendant le reste de l’année ; commencez par des étapes relativement
courtes de deux à trois heures ; ne vous laissez pas rebuter par des premiers essais
qui ne réussiront pas nécessairement, persévérez et vous acquerrez un entraînement
suffisant pour que la question de la marche devienne lé côté secondaire et la jouissance
de la nature l’essentiel. Vous avez, par exemple* deux à trois heures à attendre
une correspondance dans une gare où vous vous morfondez ; eh bien ! partez et allez
à dix, douze kilomètres plus loin attendre votre train. Vous verrez comme c ’est intéressant
et que de choses l’on apprend en peu de temps !
Nous nous joindrons pour aujourd’hui à ceux qui trouvent le bateau le plus
agréable des moyens de locomotion et nous n’aurons garde de contester
cette vérité d’expérience. En b a - t e a u on avance, on voit, on respire,
on jouit, si l’on sait trou- ver une bonne place. Comme
nous choisissons la fin du printemps ou l’ a u tom n e
pour cette initiation aux char- mes du lac de Thoune, il y
a bien des sièges vacants, car l’on voyage peu dans
ces saisons-là, ce qui est un w H M I ■ I tort. Au sortir de l’embouchure
de l’Aar nous longeons la côte : voici Hilterfingen,
Oherhofen avec la haute tour < de son château au toit bariolé,
Gunten, blotti au pied des monts qui l’ abritent, comme
Merligen, tout autant de localités faisant partie de ce qu’on appelle la Riviera bernoise
et qui invitent les touristes à y séjourner. Plus en arrière sur la hauteur, le
regard s’en va chercher dans une sorte de corbeille agréablement tapissée de vergers
fleuris et de prairies et entr’ouverte du côté du midi les toits bruns et rouges de
Sigriswyl (800 m.). En s’avançant vers le promontoire de Beatenbucht, tapi au pied
des hautes falaises boisées de la Beatenbergerfluh, on jouit d’un coup d’oeil captivant
dans la direction de la rive opposée. Sur la longue arête aux molles ondulations qui
sépare la vallée de la Kander des bords du lac s’élèvent les clochers sveltes et aigus
de Spiez et d’Aeschi qui semblent vouloir arrêter au passage les messages de quelque
station de télégraphie sans fil.
Tandis que nous nous rapprochons peu à peu du canal de l’Aar par lequel tout à
l’heure nous pénétrerons au coeur même d’Interlaken, notre attention. est attirée par
une longue ligne de maisons égrenées en face de nous à mi-côte et au même niveau
sur un long espace de terrain compris entre deux masses de sombres forêts ; qu’est