
F r u i t mûrissant eh hiver, gros on très-gros, turbiné, régulier ou
irrégulier, en forme de Doyenné; à pédoncule inséré dans l’axe du
fruit ou sur le côté et dans une dépression entourée de petites bosses,
assez gros, droit ou courbé, brun, de longueur variable ; pcaw jau-
. nâtre à l’ombre, parsemée de nombreux points entremêlés de quelques
marbrures fauves sur la partie du fruit voisine de l’oeil, le côté du soleil
de couleur roussâtre; l’ensemble du fruit rappelle quelquefois les
poires de Pentecôte ou de Bordeaux; oeil placé au milieu d’une dépression
assez profonde, unie ou accompagnée de- légers sillons ou
do côtes, à divisions linéaires, dressées, glabres; coeur petit, entouré .
de granulations; loges moyennes ou grandes; pépins bruns; lacune
centrale nulle ou étroite, subéreuse.
C h a ir blanche, peu juteuse, âpre ou astringente quoique sucrée,
cassante, sans parfum. — Fruit à cuire, analogue au Catillac.
Cette variété n’a aucune ressemblance avec la Poire de Curé, à laquelle
âl. Willermoz l’a réunie.|'En voici l’histoire, qui m’a été transmise
pai’M. l’abbé Mongein liii-méme, à la date du 4 décembre 1864 :
« J ’étais cu ré de Sermet, canton de Castel-Moron (Lo t-e t-Ga ro n n e), lo rs q
u ’un jo u r de l ’an 1848 ou 1849 un d e mes paroissiens m ’a p p o rta p o u r
é tren n es douze poires d ’un volume én o rme e t d ’u n e forme extraordinaire .
Je fus frappé de la forme de c e tte poire, dont tous les échantillons éta ie n t
semblables e t rema rq u a b le s p a r les grosse s côtes ré g u liè res qui en to u ra ien t
l’oeil. P a rm i ces douze poires il y en avait u n e d o n t le poids dépa ssait
1500 grammes. Je l ’envoyai àM. Tourrès, mon voisin, p o u r en avoir le nom.
F ra p p é comme moi de la conformation de ce fruit, qui lu i é ta it in c o n n u , il
s’empre ssa d ’en em p o rte r d e u x , du poids de 1000 gramme s c h a c u n , q u ’il
envoya à Gand à M. Van Houtte ; mais ces fruits ayant souffert dans le voyage ne
p u re n t ê tre étudiés. M. Van Houtte écrivit à M. T o u rrè s p o u r lui d em a n d e r
d ’au tre s spéc imens, qui lui fu ren t expédiés- en 1830; mais ils éta ie n t moins
beaux q u e les p rem ie rs, atten d u q u ’il y en avait au- moins trois tombereaux
su r l’arb re e t qu e les plus petits a tteig n a ien t encore 500 gramme s. A la vue de
P . ABBE MONGEIN.
ces f r u its , dont p lu sie u rs d ép a ssaien t encore 1000 g ramme s, M. Van Houtte
souscrivit p o u r en o b ten ir u n e centaine de p i e d s . ^ Cette m êm e anné e 1830 je
fus nommé m em b re du ju ry de l’exposition d ’au tom n e de la Gironde, et, en
ra ’y re n d a n t, je donnai à M. Tourrès, qui é ta it au n om b re des exposants,
douze Poires énormes qui figurè rent dans son loi comme P o ire nouvelle h o rs
concours. Quarid le ju ry passa devant ce lo t, le volume d e ces P o ire s a ttira
n a ture llement son a ttention e t les m em b re s voulurent d o n n e r le p rix à
M. T ourrès; je m ’y opposai en alléguant q u ’elles é ta ie n t h o rs co ncours e t
q u ’elles n ’avaient été exposées p a r moi q u e p o u r o rn e r l ’exposition. Cette
déc lara tion a ttira l ’a ttention des pomologistes, et, p e rso n n e n ’a y a n tre c o n n u le
fr u it, séance ten a n te on lui donna mon nom. — M. To u rrès en a c h e ta la
p ro p rié té. C’est lui qui l ’a mise en v e n te , mais le p rix en é ta it si élevé que
plusieurs pépiniéristes en pro fitè ren t p o u r trom p e r leurs c lien ts, e t toutes
les grosses poires fu ren t livrées sous le nom de P. Abbé Mongein ; ce
qui û t que le Congrès pomologtque de Lyon la ra p p o rta com m e synonyme
à la Belle A n g e v in e , etc. — Le pied m ère est si fe rtile q u ’on e st o bligé d e
l’étftyer. Les paysans qui n ’avaient pas la patienc e d ’a tte n d re la com p lète
m atu rité du fru it le désignaient sous le nom d 'Eiranglo bieillo, en patois
étrangle vieille, e t n e conservaient l ’a rb re q u ’à cause de son excessive fe rtilité,
qui leu r p e rm e t d ’en d o n n e r les fru its aux p o rc s p e n d a n t l’biver. »
Lettre de l ’ab b é Mongein, datée de Monvezin, 4 déc em b re 1864.