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fe préfentoit comme pour demander des eareffes; il
aimoit prodigieufement les bonbons, tout le monde
lui en donnoit ; & comme il avoit une toux fréquente
& la poitrine attaquée, cette grande quantité de chofes
fucrées contribua fans doute à abréger fa vie : il ne
vécut à Paris qu’un été , & mourut l’hiver fuivant à
Londres ; il mangeoit prefque de tou t, feulement il
préférait les fruits mûrs & fecs à tous les autres alimens ;
il buvoit du vin, mais en petite quantité, & le laiffoit
volontiers pour du lait, du thé ou d’autres liqueurs
douces. Tulpiits * qui a donné une bonne defcription
* Erat hic fatyrus quadrupes, fed ab humanâ fpecie quam prre fe fcrt
vocatur Indis Oarang-outang, Homo fdvejlris, uti Africanis Quojas-
morrou ;. exprimera longitudine puerum trimum ; ni crajfide fexermem,
corpore erat nec obefo nec gracili, fed quadrato, habilijfmo tamen ac per-
niciffimo. Artubus ver) tam friéiis & mufculis adeo vafis, ut quidvis àd
emderet Ù" pojfet. Anterius vndique glaber at porte hirfutus ac nigris cri-
nibus obfitus. Faciès mentiebatur hominem , fed Tiares firme à “ adunece
rugofam i f edentulam anum. Aures veto nil difcrepant ab humanâ forma
uti neque peâus ornatum utrinque mammâ prcetumidâ ( erat enim fexus
fceminei ). Venter habebat umbilicum profundiorem, & arlus , cum fupe-
riores tum inférions, tam exaâam cum homine fimilitudinem ut vix ovum
pvo videris fimilius, Nec cubito défait débita commijfura, nec manibus di-
gitorum ordo ; nedum pollici fgura humana vel cruribus farce vel pedi
calcis falcrum. Qute concinna ac decens membrorum forma in caujfa fa it,
qu'od multoties incederet ereâus, neque attolleret minus gravât), quam
transferret facile qualecumque graviffîmi oneris pondus. Bibiturus prcehen-
debat canthari anfam manu altéra ; alteram vero vafis fando fupponens,
flbfeigebat deinde madorem labiis relidlum........... Eandem dexteritatem
obfervabat cubitum iturus ; inclinons caput inpulvinarù“ corpus flragulis
çgmcnlcnter operiens, & c. Tulpii, Obferv. Medicce, lib. I II , cap. l y î .
avec la figure d’un de ces animaux qu’on avoit préfenté
vivant à Frédéric Henri, Prince d’Orange, en raconte
les mêmes chofes à peu près que celles que nous avons
vues nous-mêmes, & que nous venons de rapporter ;
mais fi l’on veut reconnoître ce qui appartient en propre
à cet animal , & le diftinguer de ce qu’il avoit reçu
de fon maître ; fi l’on veut féparer la nature de fon
éducation , qui en effet lui étoit étrangère, puifqu’au lieu
de la tenir de fes pères & mères , il l’avoit reçue des
hommes , il faut comparer ces laits , dont nous avons
été témoins, avec ceux que nous ont donnés les Voyageurs
qui ont vu ces animaux dans leur état de nature r
en liberté & en captivité. M. de la Brolfe qui avoit
acheté d’un Nègre deux petits orangs - outangs qui
n’avoient qu’un an d’âge , ne dit pas fi le Nègre les,
avoit éduqués ; il paraît affûter au contraire que c ’ctoit
d’eux-mêmes qu’ils, faifoient une grande partie des
chofes que nous avons rapportées ci -delfus. « Ces
animaux, dit-il, ont l’inltinét de s’alfeoir à table comme «
les hommes ; ils mangent de tout fans diftinétion ; ils «
fe fervent du couteau , de la cuiller & de la fourchette
pour couper & prendre ce qu’on leur fert fur l’alfiette ; «
ils boivent du vin & d’autres liqueurs: nous les portâmes «
à bord ; quand ils étoient à table , ils fe faifoient en- «
tendre desMouffes lorfqu’ifs avoient befoin de quelque «
chofe; & quelquefois quand ces enfàns refufoient de «
leur donner ce qu’ils demandoient, ils fe mettoient en »
colère, leur faififfoient les bras, les mordoient & les»