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rapports, le lama eft d ’une e fp èce très-d iftin éte & très-
d ifféren te d e c elle du cham eau ; d ’abord il eft beaucoup
plus p etit & n ’a pas plus du quart ou du tiers du v o lum
e du cham eau ; la form e d e fo n c o r p s , la qualité
6 la cou leu r d e fo n p o il fo n t auffi fort différentes ; le
tem péram ent l’eft e n co r e plus ; c ’eft un animal p ituiteux
, & qui ne fe plaît que dans les m o n ta g n es, tandis
q u e le cham eau eft d ’un tem péram ent f e c , & habite
v o lo n tiers dans les fab les brûlans : en to u t, il y a peu t-
être plus d e différen ces fpécifiq u es entre le cham eau
& le lam a, qu’entre le cham eau & la giraffe : c es trois
anim aux o n t plufieurs caraélères com m u n s, par lefquels
o n p ou rroit les réunir au m êm e gen re : m ais en m êm e
te m p s , ils diffèrent à tant d ’autres ég a rd s, qu ’on n e
fera it pas fo n d é à fuppofer qu ’ils fo n t iffus les uns des
autres, ils fon t vo ifin s & n e fon t pas parens. L a giraffe
a près du d ou b le d e la hauteur du ch am ea u , & le
cham eau le d o u b le du lama ; les deux prem iers fo n t
d e l’ancien co n tin en t & form en t des efp èces féparées;
à plus forte r a ifo n , le lama qui n e fe trouve que dans
le nouveau m o n d e eft-il d ’une e fp èc e é lo ig n é e de tou s
les deu x.
Il n ’en eft pas d e m êm e du p é ca r i, q u o iq u ’il foit
d ’une e fp èc e différente d e c elle du c o c h o n , il eft
cep en d an t du m êm e genre ; il reffem ble au c o c h o n
par la form e & par tou s les rapports apparens, il n ’en
diffère que par quelques petits caractères, tels que l’ou -
yerture qu ’il a fur le d o s , la form e d e l’eftom ac &
des inteftins, &c. On pourroit donc croire que cet
animal feroit iffu de la même fouche que le cochon,
& qu’autrefois il aurait paffé de l ’ancien monde dans
le nouveau, où par l’influence de la terre, il aura dégénéré
au point de former aujourd’hui une efpèce dif-
tinéte & differente de celle dont il eft originaire.
Et à l’égard de la vigogne ou paco , quoiqu’elle ait
quelques rapports avec la brebis par la laine & par
l ’habitude du corps, elle en diffère à tant d’autres
égards, qu’on ne peut regarder ces efpèces ni comme
voifines ni comme alliées ; la vigogne eft plutôt une
efpèce de petit lama , & il ne paroît par aucun indice
qu’elle ait jamais paffé d’un continent à l ’autre. Ainfi
des quatre efpèces ifolées qui font*particulières au
nouveau monde , trois; favoir, le tapir, le cabiai & le
lama, avec la vigogne paroiffent appartenir en propre
& de tout temps à ce continent; au lieu que le pécari
qui fait la quatrième femble n’être qu’une efpèce dégénérée
du genre des cochons, & avoir autrefois tiré
fon origine de l’ancien continent.
En examinant & comparant dans la même vue les
dix genres, auxquels nous avons réduit les autres animaux
particuliers à l’Amérique méridionale, nous trouverons
de même, non-feulement des rapports finguliers
dans leur nature, mais des indices de leur ancienne
origine & des fignes de leur dégénération ; les fapajous
& les fàgoins reffemblent affez aux guenons ou finges
à longue queue pour qu’on leur ait donné le nom