rapport de reffemblance corporelle qu’eft appuyé le
préjugé de la grande opinion qu’on s’eft formée des
facultés du finge ; il nous reffemble, a-t-on dit, tant à
l ’extérieur qu’à l’intérieur ; il doit donc non-feulement
nous imiter, mais faire encore de lui - même tout ce
que nous faifons. On vient de voir que toutes Les
aétions qu’on doit appeller humaines, font relatives à la
fociété , qu’elles dépendent d’abord de lame & enfuite
de l’éducation dont le principe phyfique elt la nécelfité
de la longue habitude des parens à l’enfant ; que dans
le finge cette habitude elt fort courte, qu’il ne reçoit
comme lés autres animaux qu’une éducation purement
individuelle, & qu’il n’eft pas même fufceptible de
celle de l’efpèce ; par conféquent il ne peut rien faire
de tout ce que l’homme fait, puifqu’aucune de fes
aétions n’a le même principe ni la même fin ; & à
l ’égard de l’imitation qui paraît être le caraétère le
plus marqué, l ’attribut le plus frappant de l’efpèce du
finge, & que le vulgaire lui accorde comme un talent
unique , il faut avant de décider, examiner fi cette
imitation elt libre ou forcée ; le finge nous imite-t-il,
parce qu’il le veut, ou bien parce que fans le vouloir
il le peut i j’en appelle fur cela volontiers à tous ceux
qui ont obfervé cet animal fans prévention, & je fuis
convaincu qu’ils diront avec moi, qu’il n’y a rien de
|ibre , rien de volontaire dans cette imitation ; le finge
pyant des bras Sc des mains s’en fert comme nous,
pisfis fans fonger à nous : la fimilitude des meniferej
6c des organes produit nécelfairement des mouvemens
6c quelquefois même des fuites de mouvemens qui ref-
femblent aux nôtres ; étant conformé comme l’homme,
le finge ne peut que fe mouvoir comme lui ; mais fe
mouvoir de même n’elt pas agir pour imiter : qu’on
donne à deux corps bruts la même impulfion ; qu’on
conftruife deux pendules, deux machines pareilles, elles
fe motiveront de même, & l ’on aurait tort de dire que
ces corps bruts ou ces machines ne fe meuvent ainift
que pour s’imiter; il en efl de même du finge relativement
au corps de l’homme, ce font deux machines
conftruites , organifées de même, qui par néceffité de
nature fe meuvent à très-peu près de la même façon :
néanmoins parité n’cfl pas imitation ; l’une gît dans la
matière 6c l’autre n’exifte que par l’efprit ; l’imitation
fuppofe le deffein d’imiter; le finge efl: incapable de
former ce deffein, qui demande une fuite de penfées ,
& par cette raifon l’homme peut, s’il le veut, imiter le
finge, & le finge ne peut pas même vouloir imiter
l ’homme.
Et cette parité qui n’efl que le phyfique de l’imitation
, n’eft pas auffi complète ici que la fimilitude,
dont cependant elle émane comme effet immédiat; lé
finge reffemble plus à l ’homme par le corps 6c les
membres que par biffage qu’il en fait; en l’obfervant
avec quelqu attention on s’apercevra aifément que
tous fes mouvemens font brufques, intermittens, précipités;
& que pour les comparer à ceux de l’homme,