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moins tumultueux qu’une précipitation tranquille; et, s’il y a quelques
bancs pierreux et réguliers un peu considérables au-dessous ou
au-dessus de ces terrains de transport, ils donnent généralement
des marques d’avoir été déposés dans l’eaü douce.
Presque tous les os connus de quadrupèdes vivipares sont donc,
ou dans ces terrains d’eau douce, ou dans ces terrains de transport,
et par conséquent il y a tout lieu de croire que ces quadrupèdes n’ont
commencé à exister, ou du moins à laisser de leurs dépouilles dans
les couches que nous pouvons sonder, que depuis l’avant-dernière
retraite de la mer, et pendant l’état de choses qui a précédé sa dernière
irruption.
Mais il y a aussi un ordre dans la disposition de ces os entre eux,
et cet ordre annonce encore une succession très-remarquable entre
leurs espèces.
D’abord tous les genres inconnus aujourd’hui, les palæothériums,
les anoplothériums, etc., sur 1&.gisement desquels on a des notions
certaines, appartiennent aux plus anciens des terrains dont il est
question ici, à ceux qui reposent immédiatement sur le calcaire
grossier. Ce sont eux principalement qui remplissent les bancs réguliers
déposés par les eaux douces ou certains lits de transport, très-
anciennement formés, composés en général de sables et de cailloux
roulés, et qui étaient peut-être les premières alluvions de cet' ancien
monde. On trouve aussi avec eux quelques espèces perdues-de genres
connus, mais en petit nombre", et’quelques quadrupèdes ovipares et
poissons qui paraissent tous d’eau douce. Les lits qui les recèlent sont
toujours plus ou moins recouverts par des lits de transport remplis
de coquilles et d’autres produits de la mer.
Les plus célèbres des espèces inconnues, qui appartiennent à des
genres connus ou à des genres très-voisins de ceux que l’on connaît,
comme les éléphans, les rhinocéros, les hippopotames, les mastodontes
fossiles, ne retrouvent point avec ces genres plus anciens.
C’est dans les seuls terrains de transport qu’on les découvre, tantôt
avec des coquilles de mer, tantôt avec des coquilles d’eau douce,
mais jamais dans des bancs pierreux réguliers! Tout ce qui se trouve
avec ces espèces est ou inconnu comme elles, ou au moins douteux.
Enfin les os d’espèces qui paraissent les mêmes que les nôtres ne
se déterrent que dans les derniers dépôts d’alluvions formés sur les
bords des rivières, ou sur les fonds d’anciens étangs ou marais desséchés,
ou dans l’épaisseur des couches de tourbes, ou dans les fentes
et cavernes de quelques rochers, ou enfin à peu de distance de la
superficie dans des endroits où ils peuvent avoir été enfouis par des
éboulemens ou par la main des hommes"; et leur position superficielle
fait que ces os, les plus récens de tous, sont aussi, presque
toujours, les moins bien conservés.
. Il ne faut pas croire cependant que cette classification des divers
gisemens soit^ussi nette que celle des espèces, ni qu’elle porte Un
caractère de démonstration comparable : il y a des raisons nombreuses
pour qu’il n’en soit pas ainsi.
D’abord toutes mes déterminations d’espèces ont été faites sur
les os eux-mêmes, ou sur de bonnes figures; : il s’en faut au contraire
beaucoup que j’aie observé par moi-même tous les lieux où
ces os, ont été découverts. Très-souvent j’ai été obligé de m’en rapportera
des relations vagues., ambiguës, faites par des personnes
qui ne savaient pas bien elles-mêmes ce qu’il fallait obsèrver : plus
souvent encore je n’ai point trouvé ;de renseignemens du tout.
Secondement, il peut y avoir à cet égard infiniment plus d’équivoque
qu’à l’égard des os eux-mêmes. Le même terrain peut paraître
récent dans les endroits où il est- superficiel , et ancien dans
ceux où il est recouvert par les bancs qui lui ont succédé. Des terrains
anciens peuvent avoir été transportés par des inondations partielles,
et avoir couvert des os récens; ils peuvent s’être éboulés sur
eux et les avoir enveloppés et mêlés avec les productions de l’ancienne
mer qu’ils recelaient auparavant ; dés os anciens peuvent
avoir été lavés par les eaux et ensuite repris par dès alluvions récentes;
enfin des bs-récens peuvent être tombés dans les fentes ou les
cavernes d’anciens rochers., et y avoir été enveloppés par des stalactites
ou d’autres incrustations. Il faudrait dans chaque cas analyser
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