faite à Rome. Saumaise sur Solin ne dit rien qui se rapporte à la
question actuelle.
Quant à l’ibis noir qu’Aristote place seulement auprès de Pé-
luse (1), on a cru long-temps que Belon seul l’avait vu (2). L ’oiseau
qu’il décrit sous ce nom est une espèce de courlis à laquelle il attribue
une tête semblable à celle du cormoran, c’est-à-dire apparemment
chauve, un bec et des pieds rouges (3); mais comme il
ne parle point de l’ibis dans son voyage (4), je soupçonne qu’il n’a
fait ce rapprochement qu’en France, et par comparaison avec des
momies d’ibis. Ce qu’il y a de certain, c’est que l’on ne connaît pas
en Egypte ce courlis à bec et pieds rouges (5), mais qu’on y voit très-
communément notre courlis vert d’Europe (scol. fa cinellus, Linn.,
enl.819), qu’il y est même plus abondant que le numenius blanc (6);
et comme il lui ressemble pour les formes et pour la taille, et que
de loin son plumage peut paraître noir, on ne peut guère douter
que ce ne soit là le véritable ibis noir des anciens. M. Savigny l’a
aussi fait peindre en Egypte (7), mais d’après un jeune individu
seulement. La figure de Buffon est faite d’après l’adulte; mais les
couleurs en sont trop claires.
L ’erreur qui règue à présent touchant l’ibis, blanc a commencé
par Perrault, qui même a le premier, parmi les naturalistes , fait
connaître le tantalus ibis d’aujourd’hui. Cette erreur, adoptée par
Brisson et par Buffon, a passé dans la douzième édition de Linné,
où elle srest mêlée à celle d’Hasselquist, qui avait été insérée dans
la dixième pour former avec elle un composé tout-à-fait monstrueux.
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(1) Hist. anim., lib. ix, cap. xxvii, etlib. x , cap. xxx.
(2) Buffon. Histoire naturelle des oiseaux, in-4.0, tome vin , page 17.
(3) Belon, nature des oiseaux, pages 199 et 200 ; et Portraits d’oiseaux, folio 44 > vers.
(4) Observations de plusieurs singularités, etc.
(5) Savigny. Mémoire sur l’ibis, page 37.
(6) Idem, ibid.
(7) Voyez le grand ouvrage sur l’Égypte, Histoire naturelle des oiseaux, planche vu,
figure 2. .
Elle était fondée sur l’idée que l’ibis était essentiellement un oiseau
ennemi des serpens, et sur cette conclusion bien naturelle,
qu il fallait pour dévorer les serpens un bec tranchant et plus ou
moins analogue à; celui de la cigogne et du héron : cette idée est même
la seule bonne objection qu’on puisse faire contre l’identité de notre
oiseau avec l’ibis. Comment, dira-t-on, un oiseau à bec faible, un
courlis, pouvait-il dévorer ces reptiles dangereux?
On pouvait répondre que des preuves positives, telles que des
descriptions, des figures et des momies, doivent toujours l’emporter
sur des récits d habitudes trop souvent imaginés: sans autre motif
que de justifier les différensï pultes rendus aux animaux; on pouvait
ajouter que les serpens dont les ibis délivraient l’Egypte nous sont
représentéseomme très-venimeux, mais non pas Comme très-grands.
Je croyais même avoir obtenu une preuve directe que les oiseaux
momifiés qui avaient un bec absolument semblable à celui de notre
oiseau, étaient de vrais mangeurs de serpens; car j’avais trouvé dans
une de leurs momies des débris non encore.digérés de peau et d’é-
cailles de serpens que je conserve dans nos galeries anatomiques.
Mais aujourd hui M. Savigny, qui a observé vivant, et plus d’une
fois disséqué, notre numenius blanc, l’oiseau que tout prouve avoir
été l’ibis, assure qu’il ne mange que dès vers, des coquillages d’eau
douce et d’autres^petits animaux de cette sorte. En supposant que
ce fait n ait pa||*d’exception, tout ce que l’on peut en, conclure,
c’est que les Egyptiens, comme cela est arrivé plus d’une fois à eux et
à d autres, avaient inventé pour un culte absurde une raison fausse.
Il est vrai qu’Hérodbte dit avoir vu dans un lieu des bords du désertai)
près de Buto , une gorge étroite où étaient amoncelés une
infinité d’os et d’arêtes, qu’on lui assura être les restes de ces serpens
ailés qui cherchent à pénétrer en Egypte au commencement
du printemps, et que les ibis arrêtent au passage; mais il ne nous
(.) Eaterpe, cap. x « v . Hérodote dit ■ lieu æjrabie; mai. on ne ■ comment un
DeHa ^ a“ ralt P“ * l° viUe:de Bul° > 1 ai était dans la occidentale du