des efpèces de monftres. Les différences que nous
venons d’indiquer étant générales & confiantes, nous
croyons pouvoir afïiirer que le pangolin & le phatagin
font deux animaux d’efpèces diflinéles & féparées ; nous
avons reconnu ces rapports & ces différences non feulement
par i’infpeétion des trois fujets que nous avons
vus, mais auffi par la comparaifon de tous ceux qui ont
été obfervés par les Voyageurs & indiqués par les Natu-
raliftes.
Le pangolin a jufqu’à fix, fept & huit pieds de grandeur
, y compris la longueur de la queue, lorfqu’ii a
pris fon accroiffement entier ; la queue qui efl à peu
près de la longueur du corps, -paraît être moins longue
quand il efl jeune ; les écailles font auffi moins grandes,
plus minces & d’une couleur plus pâle, elles prennent
une teinte plus foncée lorfque l’animal efl adulte, &
elles acquièrent une dureté fi grande qu’elles réfiflent à
la balle du moufquet. Le phatagin e fl, comme nous
l’avons dit, bien plus petit que le pangolin; tous deux
ont quelques rapports avec le tamanoir & le tamandua;
comme eux, le pangolin & le phatagin ne vivent.que
de fourmis ; ils ont auffi la langue très-longue, la gueule
étroite & fins dents apparentes, le corps très-alongé,
la queue auffi fort longue & les ongles des pieds à peu
près de la même grandeur & de la même forme; mais
non pas en même nombre ; le pangolin & le phatagin
ont cinq ongles à chaque pied, au lieu que le tamanoir
le tamandua n’en ont que quatre aux pieds de devant;
ceux - ci
ceux-ci font couverts de poils, les autres font armés
d’ccailles , & d’ailleurs ils ne font pas originaires du
même continent; le tamanoir & le tamandua fe trouvent
en Amérique, le pangolin & le phatagin aux Indes orientales
& en Afrique où les Nègres les appellent Qjwgelo *;
ils en mangent la chair .qu’ils trouvent délicate & faine ;
ils fe fervent des écailles à plulieurs petits ulàges. Au
refie le pangolin & le phatagin n’ont rien de rebutant
* On trouve dans les bois un animal à quatre pieds que les Nègres
appellent Quogelo. Depuis ie cou jufqu’à l’extrémité de la queue il elt
couvert décaillés faites à peu près comme les feuilles de l’artichaut, un
peu plus pointues : elles font terrées, allez épaifles & fuffifàmrnent
fortes pour le défendre des griffes & des dents des animaux qui l'attaquent.
Les tigres & les léopards lui donnent fa chafïè fins ' relâche,
& n’ont pas de peine à le joindre, parce qu’il s’en faut bien qu’il aille
auffi vite que ces animaux ; il ne laide pas de fuir, mais comme il eft
bien-tôt attrapé, & que les ongles & fà gueule lui fêroient devfoibIes
défenfès contre des animaux qui ont de terribles dents & des griffes bien
fortes & bien aigues, la Nature lui.a enfêigné de fè mettre en boule
en pliant fà queue fous fbn ventre & fe ramadant de telle manière
qu’il ne préfènte dé tous côtés que les pointes de fes écailles. Le tigre
ou le léopard ont beau le tourner doucement avec leurs griffes, ils fe
piquent dès qu’ils veulent le fajre un peu rudement, & font contraints
de le laidèr en repos. Les Nègres i’alîbmment à coups de bâton,
i’écorchènî, vendent fà peau aux Blancs & mangent fà chair : ils difènt
qu’elle efl blanche & délicate. Sa tête & fbn mufèau, que fà figure
pourroit faire prendre pour une tête & un bec de canard, renferme
une langue extrêmement longue, imbibée d’une liqueur onétueufè &
tenace ; il cherche les fourmilières & les lieux de pafîage de ces infectes;
il étend fà langue & la fourre dans leur trou, ou l’aplatit fur le paflàge ;
ces infeétes y courent auffi-tôt attirés par Todeur, & demeurent empéu-és
dans la liqueur , onétueufe, & quand l’animai fènt que fà langue eft bien
Tome X. A a