
proue contre l’ennemi, fe tenant toujours en pleine mer audélà des navires des
Romains, & fit avertir les autres vaiflèaux de faire de même. Quand fon arme'e
fut rangée , enforte quelle faiioit front aux Romains , il donna le lignai du
combat, & s’avança vers la Ilote ennemie. Les Romains fe tenoient toujours
rangez du côté de la terre, attendant que leurs vailTeaux fortiflènt l’un
apres l’autre du port pour prendre leur rang à mefure qu’ils fortoient ; cela les
obligea de combattre du côté de la terre, & à leur grand delavantage.
Lorlque les vailTeaux des deux partis furent venus à la portée des coups-', le
fignalfut donné des deux côtez. On combattit pendant quelque tems AVec
un avantage égal, parce que. les foldats étoient de .part 6e d’autre l’élite
de T'armée r mais la chance tourna bientôt en faveur des Carthaginois, parce
qu’ils avoient beaucoup d’avantage lur les Romains. Leurs vaifleaux étoient
beaucoup plus légers ,& conftruits de maniéré à aller plus vite & à tourner
plus facilement, leurs matelots étoient plus experts ; la fituation de leur flote
étoit encorebeaucOup^plus avantageulè, parce qu’ils combattoient du côté
de la mer ; de forte que quand l’ennemiles prefloit vivement., ils reculoient
lins aucun péril, & gagnoient le large ; ce qu’ils falfôient d’autant plus facile-
inent & plus vite-, que leurs vaifleaux étoient plus légers à la courîè. Si quelque
vaiflèau ennemi eh pohrfuivant s’éloignoit trop de la flore, ils fondoient
lur eux avecbeaucoup delegereté; & dans le tems que ces mafles trop pefan-
tes fe tournoient avec grande difficulté., ils les choquoient tant de fois qu’ils
lès coaloient à fond : ils en firent périr plufieurs en cette maniéré. Si quelqu’un
de leurs vaifleaux le troüvoit enperil, cette même légèreté leur donnoit
moien-dele lècourir promtcment,en failanc tourner leur vaiflèau derrière
Tapouppe des autres. Les Romains tout au contraire, quand ils fe trouvoient
preflez dè-Tennemi ne pouvoient reculer, parce qu’ils combattoient fort prés
de terre ; dè forte que quand un vaiflèau Carthaginois prefloit un vaiflèau
Romain, la pouppe de celui-ci fe trouvoitbiéntôt enfablee ; ou fi tout le vaif-
feau tournoit& prétoit le flanc, il fehrifoit contre terre. Une chofe qui aidé
fouvérit à gagner des viéloires lur mer, qui efl de faire couler des vaifleaux
aü travers de la flote des ennemis , pour revenir enfiiite les attaquer par derrière
: cela, dis-je, n’étoit nullement praticable aux Romains , dont les vaif-
feaUx étoient extrêmement péfans, & les rameurs mal-habiles fâjoutez àcela
qu’ils ne pouvoient point fecourir des vaiflèaux fi près de terre, ni tourner autis
,ab ea parte quæ altum tenebat, in hoftes navis
(uæ proram dirigit. Simul cura infequentium quif-
que in eociem fe collocaret ordine cum iis quibus fe
adjungébat, ut idem cun6ti facerent per mfniftros
imperat. Pdftquam erant omnes in frontem inftru<5ti,
data ad lignum teffera, in hollem primo, ordine fer-
vato 3 pergit ire ; Romanis intérim ad tcTram manen-
tîbus, quod prodeuntes paulatim naves e portu exci-
perent , ex quo fàâum ut magno fuo incommodo
Romani ad ipfum lictus decertarcnt. Ubi ventumeft
cominus, fublato figno ab utriufque exerclrus præ-
toria navi, initur certamen. Principio paribus mo-
mentis utrinque pugnatum eft ; etenim ab utraque
parte flos pedeftrium copiarum dimicabat. Paulatim
tarnen magis magifque fuperior res Pornorum elfe
coepit y quoniam toto illo certamine longe melior eo-
rum conditio fuit quam Romanorum. Jam primum
velodtate navigandi longe vincebant, cum fabrica
ipfa navium, turn ufu ac peritia remigum. Iplcdein-
de locus pugnar multum cos adjuvabat, quod ab ilia
parte quæ pclagus fpe&abat, aciemfuam cxplicaflenr:
fi çfttm hpftis inftaret veheraentius, retrorfura fe
nullopericulorecipiêbant in apertum , quod præ agi-
litatc naviujnfacile ipfis erar. Turn autem fi quis ho-
ftium inter perfequendum longius effet proved us ,
converfi ac modo circumnaÿigantes, modo ad latus
occurrences; dum fe hoftis circumagerer, 8c cum im-
mani .gravitate navium fuarum remigumque imperi-
tiâ ludaretur j continuos impetus cum darent mul*
tas naves demergebant. Si vero aliquispartium fuarum
periclitaretur, pronum erac fine fua fraude ac fecure
ferre opem , nave poft aliarum puppes perque altum
circumduda. Romani contraria his omnia experie-
bantur, qui, fi premerentur, rétro ferecipere, cum
ad terram pugnarent, ncquibant. Quocies autem
aliqua navis a pugnantibus ex adverfo urgeretur in-
feftius, aut a puppe fidebat, fi in brévia incideret;
aut fi in terram ferretur, folo illidebatur. Quod autem
in praelionavali plurimumad vidoriam folctcon ferre,
per médias adverfariorum naves fuam tranfmittcre, &c
a tergo ilios invadcre-, qui jam in pugna cum aliis
func occupati : hoc vero quominus a Romanis fïeret,
navium gravitas fimul & remigum imperitiaprohibe-
bant. Poftrcmo ne fuppetias quidem laborantibus ire
cour
toùr d’eux pour les dégager. Le Conlul Publius Voiant toutes ces chofes, &
qu’une grande partie des vaifleaux étoient déjà ou échouez , ou brifez contre
terre, prit la fuite tout le long du rivage , accompagné de trente vaiflèaux 5
cous les autres aü nombre de quatre-vingt-treize furent pris parles Carthaginois
avec tous les hommes, qui étoient dedans , hors quelques-uns eh petit
nombre , qui fe voiant échouez , 's'enfuirent,dans les terres. Adherbal s'acquit
une grande gloire par cette viétoire qu’il avoit gagnée par fa conduite
& par fa valeur. Publius ah contraire fut chargé . de malédictions par les
Romains ; parce que, par fa témérité & par fon imprudence , il avoit eh perdant
une fi grande flote , apporté un dommage confiderable a la Republique,
a rergo navigantes po'tetant, qui a terga e fient con-
clufi , &c 11e minimum quidem fpàTium vacuum ha-
berenc, ad fuccurrendum fi cui ôpus effet. Tantis hif-
ceincommodis fuos confluftari con-fpicatus Romanus
Conful, cum -alise naves inter brévia fiderént, aliæ
terræ allideren'tur , a læva fugam ‘capèffit, ac ei'rcum
lirtus fe evolvit, rrigvnta navibus, quas habebat pro-
xlmas, comitatus. Cafteras ad très & nonàginta, cum
omnibus qui intu's erant ceperunt Poe.ni, paucis vlrorum
exceptîs, qui e navibus fuis, quas ad littus im*
pegèrun't, aufügeïe. Ex hoc pràelio magnam apud
i'uos gloriam confequurus eft Adherbal, ut qui lolus
providentia ae fortitudin’e fihgülari ufus j audor vi*
(ftoriÎE extitifiet. Publiüm contra ïaeerare maledi&is
Romani , vehe'menrerque ineufare , quod lemeritatè
fua atque imprudèntia male rem geflifiet, & quantum
ïn îpfo fuerat > magnis Rémpublicatn detriment
tis affeciffetw
C H A P I T R E XII.
Emilie navale des commànde^par Lutatius contre les Carthaginois $'
£ÿ la wiÛoire des Romains^
NOus venôhs de Voir une viétoirè rèmportée fur les Roïhaihs pàr les Carthaginois
; en voici unè que les Romains remportèrent lût les Carthaginois
, laquelle mit fin à la prèmierè guerre Punique. ..
Lutatius Conlul fachant l’arrivée d’Hahüon, & n ignorant pas le deffèiii
qu’il avoit d’aller promtement à Eryx décharger lès vaifleaux ,& prendre les
meilleurs foldats pour revenir enfuice au combat avec avantage -, prit l elitè
de foh infanterie & s’en alla en Tille d’Egufe , qui eft aloppofire dé ï-ily—
bée; & après avoir parlé auxlôldats conformément à la conjoncture prelente,
il commanda aux pilotes de difpofer leurs vaifleaux pour combattre le lendemain.
A la pointe du jour luivanr, Lutatius voiant que le vent ( fort favorable
aux ennemis) lui étoit contraire , & quê là mer etoit en grand mouvement
; il fut pendant quelque tems incertain fur le parti qu il devoit prendre
: mais faifant réflexion que fi , nonobftanc le mauvais vent , il hazar-
doit une bataille , il n’auroit à faire qu a Hannon, aux troupes qu il ame-
noit , & à des navires chargez de Vivres 5 St que f i au contraire il attendoit
C A P U T % ï I.
tugna Romanorum duce tutatiö contra Poenos,
viHotia Romanorum*,
V l&oriam vidimus Carthaginënfium de Romanis
reportatam : en aliam quâ Romani de Carthagi-
n en fi bu s rriumpharunt, quâ vidloriâ terminatum fuit
primum Punicum beüum. .
Lutatius Conful Î-Iannonis cognito adventii , qùid
in animo ille haberet facile conjiciens, fortiflîmum
qu ein que e pedeftribus copiis fumit, & infulam Ægu-.
Tom, J K*
fam Lilybæo oppofitam petit : ibi prô tempore milices
alloquutus , fequeriti die prælium navale commifluni
iri navium gubernatoribus denunciar. Mane vero ib
lucefcente jam die, videns Lutatius fe'cundum hofti-
bus ac profperum flare ventum j fuis vero diflkilehi
navieationem futuram ventis adverus, & mari modo
àehilcehte, modo afperiüs intumènte j hæ'rere pfifflo
anceps animi, 8c quid confilii caperet iheertus. Sed
reputans fi per tempeftatein peticuli aleattî fubiret ,
cum Hannône tantum rem fibi fututanii & iis quas
adducebat navalibus copiis , ac præterea oneratis
commeatu navibus > fin exfpe»ftarec donee defieviies
O O