
Z5+ L 'A N T IQ U IT E ' E X P L IQ U E E ; &c. L i v . II;
C H A P I T R E XI.
I, Les waifieaux énormes , çÿ même ceux quipajjoient cinq rangs de fumes , regarde^
comme inutiles, ou de peu d’ujage chez les Anciens, I I. guiftion, f i les
SAnciens ne mettaient qu'un rumeur i chaque rame, même dans les plus grands
vaifleaux. Sentiment de Scaliger réfuté. / I I . Sentiment de Schiffer réfuté auflï.
IV. Celui de M.. Fabretiplusplaufihle. V. Les biremes (dp les tnremes ria'Voient
qu un rameur a chaque rame.
I- TT Ors ces vaifleaux du roi Dcmetrius, qui font les feuls qui paroiflène
T X réufli, cous les autres grands navires donc les Auteurs parlent,
a feize, & meme a douze, a dix, à neuf, Sc julqu’à (ix rangs de rames, étoienc
des machines Ii difficiles a remuer , qu elles n etoient pas de grand fervice a.
ceux qui en compofoienc leurs flores. Tire Live diloit ci devant que le
navire de Philippe roi de Macedoine a leize rangs de rames, étoit d’une
grandeur qui le rendoic inutile, & qui cauloit même la perte des batailles.
Nous avons vu ci devant un autre vaiffeau à dix rangs, qui aiantune fois
perdu le mouvement, ne put jamais le recouvrer depuis, quelques efforts
que put faire le pilote ; ce qui fut lacaule de fa perce, florus dit de la flote de
Marc Antoine , avec laquelle il alloit combattre contre Augufte ; qu’elle
etoit compo/èe de vinge vaifleaux , depuis fix julqu'à neuf rangs de rames,
C]ui etoient avec cela munis de tours & de ponts -. enlorte qu’ils reflembloient
a des châteaux & a des villes, quils failoienc gémir la mer, que les vents
avoient peine a les remuer, & que leur grandeur énorme fut lacaulède leur
perte.
II. Il leroit inutile de rechercher comment ces vaifleaux à moins de
rangs, pouyoient aller lùrmer: tous les efforts qu on pourroit faire n’abou-
tiroient qua des conjeétures fujetes à mille difficultez. Je laifle donc cela
pour venir a une queftion ; lavoir , h dans ces grands vaifleaux chaque
rame n avait qu un rameur ; ou fi cl le en avoic plufieurs , comme en ont au-
jourd hui les rames de nos galères: Scaliger & Scheffer foutiennent le pre-
‘ c A P u T x i .
/. /Laves abmrmis mayeituiinis, ctiamque ea
omnes qua quinque ■ remotum ordines fuge.
Tarent, ut inutiles , vel ut minus habiles a
veteribus habita. 1 1. Quajlio num veteres
unum tantum remiqcm ad unumquemque re-
mum adhibuerint : opinio Scaliqcri refutatur.
I I I . Schefferi opinio etiam refutatur.
I V . Fabretti fententia probabilior. F'. In
biremibus atqv.e trircmibus remises finyili
fingulis remis hoenbant.
T ) illas immanes Demerrii naves , quæ
X Pol* agi & far le in.ufum admoveri porue-
•runt, alias omnes infolitæ magnitudinis a Sctipto-
flbus memoratæ, fexdecim nempe , duodecim,
decem , novem , imo & fex quoque verfuum , ranta
cum difficulrate moveri poruiflr dicunrur , ureas ad-
hibentibusfcrc inutiles imo &damnofæ quoque eflent.
Paulo ante dicebat Livius regiam Philippi navem
fexdecim verfuum ipfa mole inutilcm fuiiTe. Vidimus
quoque paulo ante decerem feu decem verfuum
navem , quæ amiflum femel motum, ncqu/cquam
curante laboranteque navarcho, recuperare nunquam
potuit,quæ ipfi etiam caufa perniciei fuit.Floras 4. n»
de M. Antonii,qua cum Augufto pugnavit,claffc loq
u e s , ait : fed numerummagnitudo penfabat ; quippe
a finis in novenos remotum ordinibys : ad hoc turribus
atque tabulât is allevata ; caftellorum & urbium Specie
non fine gémi tu maris , & labore vent or umferebantur ,
qua quidam >vfa moles exitio fuit.
I I. Inutile foret quxrere quo pa6to navespauciori-
bus,quam eæ quas fupra diximus, remorum ordinibus
inftru&æ , aeerenrur ut marinas undas fulcarent ; res
enim nonnin conjeéturis levibus arque inccrtis trac-
tari poflet. Hac miffa quæftione ad aliam pergo, num
feilicet in majoribus illis navibusremos fingulos re-
miges finguli agerenr, num vero remis fingulis rémiges
plures tra&andis federenr.ur hodie in iisnavibus
quas galeas vocamus *, Jofephus Scaliger arque Schcl:-
ferus pro priore liant fententia , pofteriorem tuctur
ïnier fcntiment : M. Fabreti eftpourle fécond. Ce qui caufecette diverfite
de fentimens entre ces Auteurs , c’eft que les anciens Hiftoriens n’ont rien die
qui décide clairement la queftion. Scaliger s’appuie fur le paffage de Memnon
rapporté ci deflus, qui dit qu’un navire à huit rangs de rames , appellé Leon-
tophore avoir cent rameurs qui menoient chaque rang de rames -, enforce
que l’on comtoit huit cens rameurs de chaque côté, ôc feize cens en tout.
L. Fabreti foutient que Scaliger n’a pu rien tirer de là qui favorife fon fendillent
; car Memnon ne dit pas là qu’il n’y eut qu’un rameur à chaque rame î
il ne le dit pas en effet^ mais on ne peut pas nier que ce paffage n’ait quelque
difficulté. S’il y avoit cent rameurs à chaque rang, & fi plufieurs rameurs
ne menoient qu’une rame} il y avoit donc autant de rameurs pour mener
chaque rame du plus bas rang des Thalamites, qui touchoient prefque l eau
même de la partie de la rame qui fortoit du vaiffeau j qu’il y en avoit au plus
haut rang des Thranites, qui allant plonger leurs rames fort loin, avoient incomparablement
plus de peine que les autres. On ne peut pas , ce me femble ,
nier que cela ne faffe quelque difficulté -, ce qui ne m’empêche pourtant pas de
croire que dans ces vaiffeaux a tant de rangs il ne fallut plus d’un rameur à
chaque rame, du moins dans les rangs les plus hauts.
III. Scheffer dit d’abord que la queftion ne peut pas regarder les petits
vaiffeaux à un feul rang de rames, ni les vaiffeaux légers qui alloient en cour-
fe : les témoignages font trop clairs pour pouvoir prétendre que dans ceux là
chaque rame eut plus d’un rameur. Le Scholiafte de Thucydide dit que le
triacontore , qui eft un vaiffeau à trente rames, a trente rameurs. Etl’Etymo-
logi que dit de même que l ç pente contore., vaiffeau à cinquante rames, a cinquante
rameurs. La queftion roule donc fur les vaiffeaux a plufieurs rangs de
rames. Scheffer croit qu’il faut dire de ceux-ci comme des autres , que chaque
rame n’avoit qu’un rameur pour la mener. Il en apporte cette preuve tiree du
témoignage des Auteurs : Silius Italicus, dit 3 félon lui, que la quïnquenme, ou
le vaiffeau à cinq rangs , a quatre cens rames ; & Pline affure qu’elle a quatre
cens rameurs : il y avoit donc autant de rameurs que de rames. Si cela fe trou-
voit ainfi aux quinqueremes, à plus forte raifon en fera-t-il de même pour les
cjueidrinmes , les triremes, & les biremes, ou pour les vaiffeaux a quatre, a deux,
èc à trois rangs de rames. Une autre preuve, félon, lui, eft, que les Thrani-
Raphael Fabrettu’s. Caufa varietatis opiniônum hæc
eft., quod videlicet Scriptores nihil unquamclare di-
xerint, quo quid fit fentiendum ftatuatur. Nitituf
Scaliger Memnonis teftimonio^quod fupra retulimus,
ubi dicitur navem o&o remorum verfibus inftrudtam
nomine Leontophoron , centum in fingulis verfibus
remiges habuifle, ita ut in quovis latere o&ingenti
remiees eftent, & mille fexcenti remiges totam navim
afferent. Non putat Fabrettus ex his verbis quidpiam
Scaligerianæ tuendæ fententiæ opportun um educi pof-
fe : non ait quippe Memnon eo loco unum tantum re-
migem unicuique remo hæfiflTe > non dixit utique ,
led fatendum in cjus didtis aliquid ineffe difficultatisj
nam fi centum in fingulis verfibus remiges erant, 8c
ex iis plures remos fingulos agebant, tot ergo rémiges
remis infimis thalamitarum, qui aquam pene
ex utraque remi parte contingebant, hælerint, quot
remis fummis thranitarum, qui aquam longe pecentes
admodum laborabant, quod fane verifimile non vi-
detur : aliquid ea in re difficultatis ineffe fatendum
eft , qua ramen nihil obftante difficulrate, credere
malira in hujufmodi navibus plures uno in agendo
rertto fuifîe remiges, quam unum tantum vel in fubli*
mioribus remis admit tere.
I I I . Schefferüs ftatim ait in hac qua:ftione non agi dd
minoribus navibus, q u i uno tantum remigüm verfu
gauderçnt, vel de navibus aliis velocibus, quales erant
myoparones 5 apertiora quippe funt veterum teftimo-
nia , quam ut credi poflit plures fuiffe etiam in iftis
naVigiis ad remos fingulos remiges. Scholiaftes quippe
Thucydidis ait triacontoron , triginta feilicet remorum
navigium, triginta remiges habere : etymo*
logicumfimiliterait, pentecontoron navemefle quin-
quaginta remorum & quinquaginta remigüm. Quæ-
ftio igitur eft de navibus plurimis remorum verfibus
inftrudtis. Has vero perinde arque alias ünum ad fingulos
remos remigem habuiffe putat Schefférüs ; at-
ue hoc argumento utitur ex Scriptotum teftimoniis
efumeo j Silius Italicus ait quinqueremem quadrin-
gentos habere remos, Pliniüfque narrat qüadringen.
tos in quinquèremibus elfe remiges j tôt igitur remiges
quot remï erant j fi in quinqueremibus fie fit ltâ-
tuendum,multo magis in quadriremibus , triremibus
atque biremibus. Alio etiam nititur Schefferus argu