
ÎJ6 L’ANTIQUITE' EXPLIQUEE, Sec. Liv. IL
tes qui ramoient au plus haut rang, avoient une plus forte paie que ceux qui
ramoient dans les bas rangs , parce quils manioienc des rames plus longues
& plus pelantes. S ils n avoient pas été lèuls , & il d autres avoient partagé le
travail avec eux; pourquoi auroient ils reçu une plus grande paie que ceux
quimenoient feuls une rame, puifque ceux ci avoient autant & peutêtre
plus de peine qu'eux ; Il conclut que dans tous les vaifleaux quels qu'ils fut
lent, cliaque rameur menoit fa rame. Il croit pourtant qu en certaines occa-
fions ou il étoit belbin d une plus grande diligence, on aura pu mettre plusieurs
rameurs à la même rame.
M. Fabreti quifoutient le fentiment contraire, dit que celui de Scheffer
jette dans une autre difficulté auffi grande que les precedentes ; car comment
dans les vaifleaux dont nous venons de parler,'1 un leul homme auroit il pu
mener une rame, par exemple de cinquante pieds, puifqu’à peine auroit il
pu la foulever tant foit peu; il prétend que le paffage de Silius italicus qu’il
cite ne peut lui fervir de rien. Ce poëte dit qu'un navire plus grand que les
autres ^ dont le feul alpeét cauloit de 1 econnement ; & tel qu’on n’en avoir jamais
vu de pareil dans les cotes d Afrique, avoit quatre cens rames, & un
grand nombre de rameurs ; que ce navire, dis je , alloit bien à la voile & à
la faveur des vents ; mais fort lentement, quand il n’alloit qu’à la rame.
Le poëte, dit M Fabreti, ne parle point des rangs de rames , & ne dit point
que ce fut une quinquereme ou un vailïeau a cinq rangs de rames ; car, félon
le meme poète, il devoir en avoir un beaucoup plus grand nombre, puifi.
quil commandoit aux autres & étoit le plus grand de tous; & cependant
il y avoit dans la même Ilote des Htxeres ou des vaifleaux à fix rangs de
■ rames lelon le meme poëte. L e navire, dit i l , qui portoit l image eL'Elifi, allait
a fix rangs de rames.
IV. M. Fabreti pouvoir ajouter que les termes mêmes de Silius femblent
marquer que le nombre des rames n étoit pas égal à celui des rameurs.
Le vailïeau avoit, dit il , quatre cens rames, & un grand nombre de rameurs,
cela pourroit lignifier que le nombre des rames n étoit pas égala celui
des rameurs : or dans 1 inégalité il faut toujours que le nombre des rameurs
1 emporte ffir celui des rames ; puilque dans un fi grand vailïeau, un
menro 3 thranitar qui in alriore verfu remigibanr, améliore.
donabantur me^cede, quam ii, qui in deroif-
ïioribus verfibus fcdebanc, quod longiore* gravioref
que remos agerent ; fi vero ii non foli fui (Tent, fique
alios labons confortes fccum habuifient, -cur majori
rui fient mercede donati , quam inferiores ordines qui
remos füll agerent, cum hi pari, imo fortafl~e majore
onere premerentur? Hinc autem concludit in fingulis
navibus, quantatvis illae magnitudinis eflbnt, fingulos
remiges fingulostradavific remos. In quibufdam tarnen
cafibus, ubi majore diligentia velocitateque eflet
opus, plures fuiffeunoin remo pofitos remiges arbi-
tratur.
Fabrectus contra pugnat Schefferi fententiam in
alias majorefque difficultares conjicere ; quomodo
emmin majoribus illis nav.bus, de quibusfupra re-
m« unus majores illos remos agere tradareque po-
ZZCl’llZh! Cm s’\ loT rutlincquinqii’ginra pCl;um>
quos vix vei tantillum loco movere quanrumvis robu
fins eile porerar? Locum autem Silii Irai ici ad Schef
feri tuendam fenreniiam nullius momenti cfle contenait
: en ipnim locum lib 14.
. Médias inter fubUmior ibat
t Jcmbilts vifu puppis , qua nulla per omnes
eft Lybicis major nttvalibus £vum.
Sed quater h<tc centum mrarrofo remige pontum
Pulfab a tremis j veloque fuperba cap act
Cum rapiium hau^iret Boream , & cornibus omtlCf
C flatus , lento fe corpore age bat,
Intraret f lutins folis ft pulra lacertis•
In hi fee veriibus , inquit Fabrettus , non agîtur de
remorum ordinibus, nec dicitur navem illam fuifle
quinqueremem, imo fecundum Silium Italicum ,
longe majorem numcrum cam ordinum habuifle opor-
tu it , quandoquidem ea aliarum princeps cxccrifque
major erat, in iliaque claife hexcres erant feu naves
fex remorum, ut ait idem ipfe Poëta.
. . » . Qua S Monies vultus port abat E lifte
Bis ternis ratis ordinibus graffat a per un das.
I V» Addere pocuit Raphael Fabrettus ex Verbis
Silii conjedari pofle tonlarum numcrum verfuum
numéro non fui fie parem, nam ait :
S t i m w hoc emum, twmenfo remise, pantum
Pu'fab at ton fis. '
Queis fignificari videtur alium tonfarum feu remorum
, alium remigum numerum efie Si vero non
par numerus erat, majorem ccrrc fuilTe op rmit re-
migum numcrum î irj tarn ingenti quippe navcf<
rameur ne peut jamais mener deux rames, & qu’une rame peut admettre plü-
fieurs rameurs.
M. Fabreti prétend avec raifon que le filence des Auteurs fur le nombre
des rameurs à chaque rame, n’eft pas une raifon pour dire qu’il n’y en avoit
qu un a chacune. Il ne s arrête pas la : il croit meine avoir trouve uu exemple
qui prouve qu 011 mettoitplufieurs hommes à une rame; c’efl: dans les Tacîi.
ques de 1 Empereur Leon, fils de Bafile : car quoiqu’en ce tems la les rangs
de rames les uns lur les autres ne fulîènt plus en ulage, cet Empereur les
rétablit, G)ue chaque dromon, dit-il, ( c’étoitle nom d’un vailTeau de courfe)ySzt
d une be Lie longueur {g) bien proportionné $ & qu il ait deux rangs de rames, l ’un en
haut (gfr l autre en bas. Il ajoute plus b a s On mettra cinquante hommes au plus bas
rang de ramis, & cent cinquante au p lus haut■ , tous en armes pour combattre. Il ne
faut point douter, dit M. Fabreti, que ceux du plus haut rang ne fulfenc
deftinez au combat ; puifque quand quelques-uns venoient à manquer,
on en prenoit du rang de delfous pour fuppléer. Si ’vous vous a p p e r c e v e x dit
Leon plus bas , que quelques-uns des Joldats ne gagent pas bien leur devoir en-
voyétalés auplus bas rang de rames : & f i quelqu'un des foldats efl tué ou blejféi
faites monter quelqu'un du rang dien bas pour le remplacer.
Tout cela ne peut guere fervir à prouver qu’il y avoit plufieurs rameurs à
une rame. M. Fabreti ne prétend pas auffi que ces paffages foient fort concluants.
Ils nous apprennent feulement qu’il y aVoit du tems de l’Empereur
Leon, des biremes ou des vaifleaux à deux rangs de rames, les uns plus élevez
que les autres ; foit que l’ulàge en ait duré jufqu à fon tems, foit qu’il l’ait
rétabli: carl’HiftorienZofime qui dit dans le paflage rapporté ci-devant,
qu’on ne faifoit plus de triremes depuis longtems, ne parle point là des biremes
, qui étoient feulement compofées de deux rangs de rameurs, les uns
plus élevez que les autres ; au lieu que les triremes l’étoient de trois»
V. Mon fentiment fur ce nombre de rameurs efl tel s ■ je crois que dans les
biremes & dans les triremes il n’y avoit qu’un rameur à chaque rame ; 6c cela
auxrangs les plus hauts comme aux plus bas. Nous le voions clairement aux
biremes & aux triremes de Trajan tirées de fa colonne : non feulement il
n y a là qu’un rameur à chaque rame, mais les chofes y font difpofées de
maniéré qu il n y en peut pas avoir davantage ; en ne mettant ainfi qu’un raremex
idem iiunquam poteft duos agere rcliios ; at
remus unus plures poteft admittere remiges.
Jure ait'Fabrettusex filentio feriptorum * non in-
dicantium utrum ad quemlibet remum plures fede-
renc remiges, argui non pofle unum tantum ad quem-
libec remum adhibitum fuiffe rëmigém. Neque tarnen
hîc gradum fiftit, putat enim fe in locum in*
cidifie, quo probatur plures ad quemlibet remum
pofitos fuifle remiges , in Ta&icis Videlicet Impera-
toris Leonis Bafilii filii cap. i j . num. 7. ubi dicitur
quemlibet dromonera ( erant dromones naves ve-
loces ) fat efie longum oportere, habereque duos
temigum verfüs, fuperiotem nempe Si inferiorem.
Infta vero adjicit Leo , e quibus quinquaginta in inferiore
remorum ordinc locabuntur, centum c/uinquàginta
fuperius , omnes adverfitm hoftes armati pugnabunt.
Nec dubitmijinquic Fabrettus, qüod Sc ipfî fuperiores
ad remum & ad pugnam infimul deftinati fuerint,quia
infra num. xxx. eorum fupplementum ex inferioribus
quinquaginta , five milites five nautâs dicamus, pro-
movet. S in quos, inquit Leo ex militibus ignaviores
cjfc deprehcnderisteos in inferiorem oràinem remorufn de-
pelle 3 & fi quam plagam fuperiores milites acceperint,
eorum loca ex inferioribus necejfario fupplebiu
Hæc certe bmnia perquam minimi funt moménti
ad probandum plures fuifle in quolibet remo remü
gës 3 neque contendit Fabrettus rem adeo clàre exs
primi, ut ita fe habere liquido conftet; Inde folum
difeimus fuifle tempore Léonis Imperatoris biremes ,
feu naves duobus remorum Verfibus inftru6tàs, qui
verfus noh eodem gradil nec eadem altitudine efient ,
five Imperator ipfe biremium ufum reftituerit, five
üfus ille ad fuüm ufque tempüs perduravÈrit. 2ofi-
mus enim, qui fupra dicebat jamdiü triremes hori
fuifle conftrudlas , de biremibus nihil profert : biremes
vero duorum , ut diximus, verfuum , triremes
trium erant.
V. Ut autem meafti ciirca multos, remiges cuique
temo hairentes fetlcentiam eXpromam , puto quideni
in biremibus triremibufque fingulis remis fingulôs
bxfifle remiges : quod in biremibus triremibufque
Trajani Imperatoris in columna eîchibitis yidere eft i
non modo enim quilibét remeX ibi füurn agit remum^
fed ita res funt iri havigiis compofitx, ut non videan-*
tur plures remiges cuique remo hærere pofle : fie au«»
tern facilius intelligitur quo paéto pofiint remoruiti