
L’ANTIQUITE* EXPLI l o S QUE'E, &c. Liv. IL
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C H A P I T R E II.
ƒ. Bords de cliies mis Anciennement aux bateaux. 11. S’il y a jamais eu des
bateaux ou des barques faites de cuir feulement. I l I. Les barques de terre
cuite des Egyptiens. I V. Barques faites par les memes de feuilles de la plante
appellee papyrus. V. Barques fngulieres faites par les Indiens avec des
rofeaux Jèulement. V I. Les barques pliables.
L N navigeoit anciennement fur les radeaux. On s’avifa enfuite de les
y _ / border de claies faites d’ofier : telle étoit la barque fur laquelle alloit
Ulyfic , comme il eft dit au cinquième livre de 1 OdylTèe. Les peuples de la
grande Bretagne en faifoient ainfi, félon Cefar : ils font, dit-il, des carénés de
bois Ieger , tout le relie eft de claies d’ofier couvertes de cuir.
II. Une quellion s eleve, fi les anciens ou les barbares ont jamais fait des
barques de cuirs coufus enfemble ; & fi les barques de cuir des Sabe'ens, dont
parle Strabon , étoient faites feulement de cuirs coufus & poiflez , ou fi elles
étoient de bois, mais revêtues de cuirs coufus ; Scheffer ell de ce dernier fen-
timent, & apporte une raifon qui paroit fort plaufible ; c’ell que de même que
Strabon appelle les bateaux ou les barques des Sabe'ens, des bateaux de cuir •
Xiphilin appelle aulfi des bateaux de cuir ceux des peuples de la grande
Bretagne qui, félon Jules Cefar rapporte' ci-deflus, n’e'toient que révêtus
de cuir. Les canbies étoient de même tilfus d’ofier.
Scheffer croit aulfi que ce que les Auteurs grecs appellent ceiolov
cft la même choie que la ymba.futths , la barque coulue de Virgile. Un pafl
fage de Pline fert aulfi à l'expliquer en ce fens : encore aujourd’hui, dit-il on
fa it dans l Océan Britannique des vaijfeaux tout entoures\ de cuir , fort propres
pour la navigation.
III. Ce que Strabon dit des-Egyptiens, qu’ils faifoient des bateaux de terre
cuite paroitroit incroiable; fi cetAuteur, dont la bohne foi ell reconnue de tout
le monde , ne parloit pas d une choie qui le palloit de Ion teins ; ils navigent
dit-il, avec tant de facilité, que quelques-uns Je fervent même de bateaux de terre
C A P U T II.
J- Latera inivigiorum ex cratilus vimine textis
olim. I I . A n unquam navigia fuerint ex
corio tantum confecia. I I I . Navicula te-
fiace* Algyftiorum. IV . NavicuLc eorum.
dem ex papyro. V . XfavicuLe fngulares ab
Jndis ex arundine vel ex canna confeBa.
V I . Naviculee pli ca tiles.
I . T y Rifee , ut (iiximus, ratibus navigabatur : in—
J_ de vero coeptum eft rates illas cratibus vimi-
nc textiscingcre. Tails Ulyifis navis crat, ut in quinto
Odyftear libto dicitut. Briranni, tefte Caeiare ,
hujufmodi naves adornabant: Carina primitm. in quit,
ac fl alumina ex levi materia fmm, relicjtmm corpus
'vimimbies comexnm coriis intipitur.
I I. Quatftio exoritur num veteres unquam aut bat
bari ex pellibus cotiove tantum cymbas naviculafve
pararint j ac num Sabaeorum coriacea: naves quae me-
«ftotantura Strabone lib. 16. ex coriis folum confutis
pieeque oblitis , an vero ex lignis eflent, fed extror-
lum corio contedis. Poftremamfententiam ample&i-
tur SchefFerus , & argumento nititur certe non inva-
lido} nam ut Strabo cymbas naviculafve Sabæorum
pclliceas feu coriaceas vocat i ira Xiphilinus, coria-
cea navigia s//.Attvu wao?« appellat ea quels uteban-
rur Briranni , qui fccundum Julium Caefarem ligneis
urebantur navigiis, fed corio contedis. Carabia item
vimine texta eodem modo erant.
Putat etiam SchefFerus id quod Græci Scripcores
disp.ui.rnoy orholov vocant, idipfum efFe quod eft cymba
Futilis Virgtlii. Locus Plinii hujufmodi explicationi
favet lib. 6. cap. 56”» Etiamnum in Britatmico Ocea-
no utiles naves corio ctrcumfuto fiunt.
I I Ï . Quod de Ægyptiis inquit Strabo lib. 17. ip-
fos nempe naves fidiles five ex codili terra fecille
incredibile prorfus videretur e/Tc nifi de rebus qu*
fuo tempore gerebantur, Scriptor verax atque fince-
rus ageret • Tanta facilaitte , inquit, navi pant, ut
nonnulli teftaceis utantur cymbis. £0 fortafte referri
poteft id quod canit Juvenalis Sar. i j .
cuite.
L E S B A R Q. U E S. zoy
cuite. Cela revient à ce que dit JuvenaU, 'que les Agathyrles, peuples d’Egypte,
font des bateaux de terre cuite , qu’ils font aller avec des ram es.peintes.
IV. Il ell certain que les Egyptiens faifoient de petits bateaux de la .plante
qu’onappelloit papyrus, qui étoit la même dont on fe fervoit anciennement
pour faite des feuilles à écrire ; on faifoit une fi grande quantité de ce s feuilles
, que l’Egypte feule en fourniffoit à une bonne partie de la terre habitable.
De là vient que le tyran Firmus le vantoit d’avoir alfez de papyrus pour
nourrir toute fon armée : çe que-quelques-uns ont entendu, comme fi le pa_
pyrus étoit une choie bonne à manger, & dont une armée pût fe nourrir : mais
ce n’ell pas ainfi qu’il faut l’expliquer, félon- Calàubon ; cela veut dire que
Firmus avoir une fi grande quantité de ce papyrus , que de la fomme qu’il
pourroit tirer en le vendant, il auroit de quoi entretenir toute fon armée.
On fe fervoit aulfi du papyrus pour en faire des barques -. Strabon , Pline,
Lucain, Plutarque, & plufieurs autres le difent expreffement. Ce dernier, au
traité d’Ifis & d’Ofiris, dit des bateaux de papyrus une chofe fort finguliere:
qui e l l , que les crocodiles qui nuiloient fouvent à ceux qui alloient fur de
petites barques, ne faifoieilt jamais de mal à ceux qui alloient lûr celles qui
■ étoient faites de papyrus ; & la railon en étoit, félon ces peuples, qu’Ifis avoit
une fois navigé fur une barque de papyrus •; & que depuis Ce tems, la crainte
ou le relpeét qu’ils avoient pour cette déeffeles empêehoit de nuire à ceux qui
alloient lurune barque femblable. Les feuilles du papyrus étoient fort larges
& pleines de loiigs filamens, commél’on peut voir dans un livre très-rare com-
pofé de feuilles dé papyrus} -que Ton conlèrve dans cette Abbayie : il ell aile
a comprendre qu’en en coufant un grand nombre enfemble, cela pouvoir
faire une.barqué, en la poilfant enlüite de peur que l’eau ne la pénétrât:
V. Ce qui paroit plus incroiable, ell que dans les Indes, félon le témoignage
de plufieurs Auteurs , on faifoit des bateaux d’un feul rofeau ou d’une canne.
Ces cannes étoient à plufieurs noeuds & vuides en dedans,. comme font nos
cannes dé Languedoc ; mais d’une fi prodigieule grollèur, qu’en les coupant
d’un noeud à l’autre, dit Heliodore , & les fendant en deux., on faifoit deux bateaux:
quelques uns décès bateaux portoientjulqua trois hommes , dit Pline.
Diodore en parle aulfi ; mais il ne s’accorde pas tout-à-fait avec les Auteurs
précedens. «Dans l’Inde, dit-il, il y a une grande quantité de cannes, fi «
grofles qu’à peine un homme'en-peut-il embralïer une. On affure qu’on en «
veto metus reverenciaque qua crocoaili erga Ifidem
aiFe«5ti crâne, eos a Iædendis papyrearum cymbarum
ve«£toribus cocrcebat. Cum papyri folia latiffiraa ef-
fent j longifque filarainibus munira 3 ut videre eft in
papyreo libre tariffimo, qui ïn hujustcenobii Biblio-
thcca Fervatur facile intelligitur mulca fimul con-
Fuendo-, cymbam effici potuifle, quam picc poftea
illinirent, ne aquam folia imbibèrent. #
V. Quod autem magis inctedibile videatur y în
India, teftificantibiis plurirtiis Scriptbribus, ex arlin-
dine unira navigia parabantur : aruridines vero illæ
pldrifnis erant nodi's inftraétæ, intufquc vacuæ , ut
liiht hodie canna: noftræ- îüæ quæ ex Septimania ad-
vehuntur ; fed Indicæ illætam immanis erant ampii-
tudinis, ut ait Hèliodô'rus 10. 2.7. ut arùndo in auàs
partes fi/fd ex ejualibét feïlione navigiolum pnbere't. Ex
fais vero navigiolis quædam très etiam viros geftabanr,
Inquit Plinius 8. 2. Diodorus etiam hujufmodi fea-
-pfaas commémorât j fed a præcedentibus Scriptoribus
aliquantulum diflentiré videtur. In India, inquit
Ane. 1. 2. màgna vis eft arundinum, ijuarum craffttu-
dinem vixulnis vir compleBitur, ex ejuibus fatla n'aves
eximium dicmtkt habere ùfum, quantum carte non w?
•------» Imbelle 0 “ inutile vulgus
Pa'rvula ftfbilibus folitum dare vela fafelis
E t brevibus pilla remis incumbere tefta.
ï V. Certum etiam eft Ægyptios ex ea planta quàr
papyrus vocabatur , haviculas paraviïfe. Ek eà ipfa
planta ad ufque nonum decimùmve farculum chartæ
ad feribéndum cônficiebantur , tancaque copia, ut in
orbis partem maximam comportarentur, indequeeft
quod Firmus tyrannus Ægypti dicatur > tantum ha-
jpuijfe de chart is , ut publiée fape diceret exercitum fe
alere pofte papyro & glutino ; quod quidam ira inter-
prétantur, ac fi papVrus ipfa comedi poflet exercitum-
que alere : attlôn fie intclligenda res eft, utexiftimac
Cafaubohus j fed id dicit Firmüs , tantam habere fe
papyri & glutini aggeftam copiam , ut iis venditiscx
prccio exercicuifa alere pôïFet. Ad feaphas igitur etiam
adornandas papyro utebantur •, Strabo, Plinius , Lu-
canus, Plutarchus id exprefle narrant. PJutârchùs aii-
tem de Ifide 8c Ofiride rem fingularem memorat,
crocodilos nempe, qui eos qui in feaphis navigarenr,
frequenter infeftabanr, nunquam læfiife eos qui cymbis
papyreis uterentur ; eu jus rei eau fa erat, quod
Ifîs aliquando in papyrea navicula navigalFct j exhinc