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Chaque fleur offre :
i° . Une corolle (un calice) petite, blanche,
étalée, partagée profondément en fïx découpures
ovales, prefqu’égales.
z°. Six étamines plus courtes que le calice ; les
filamens très-courts, fubulés; les anthères alon-
gées, prefqu’en coeur, légèrement échancrées à
leur fommet.
3°. Ut> ovaire trigone., fupérieur ; le ftyle très-
court ; trois ftjgmates courts, recourbés, obtus.
fruit eft une capfule membraneufe, trigone,
arrondie, à trois loges ; les cloifons bifides. Chaque
loge renferme une , rarement deux petites
femences'courtes, en ovale renverfé, creufées en
follette en deffous, Convexes en defïùs, inégales
à leur furface.
Cette plante croît dans la Nouvelle-Georgie,
dans l'Amérique feptentrionale. ( V. f )
NOLINEA. ( Voye[ Noline, Suppl. )
NOMBRIL DE VÉNUS : nom vulgaire du cotylédon
umbilicus Linn..; quelques-uns le donnent
encore au cynoglojfum linifolium , Linn.
NONATELIA. ( Voye.r Azier. )
NONEA. Moench. ( Voye[ Echioïde. )
NOPAL. ( Voyei Cactier. )
NOMENCLATURE. NOMS DES PLANTES.
Les noms attachés à chacune des productions de la
nature, quand ils font infpirés par le fentiment,
diCtés par le bon goût, ou amenés par les propriétés
des chofes, ont un intérêt très-particulier;
ils éclairent l’efprit, rappellent des fenfations
agréables, flattent l'imagination $ mais lorsqu'ils
font infïgnifians par eux-mêmes, ils ne fervent
alors qu'à nous empêcher de confondre un objet
avec un autre, & , en général, telle eft leur principale
deftination; mais l'imagination riante qui
veut tout embellir, a cherché à peindre, autant
qu'il eft poflible, les# chofes en les nommant, à
les peindre fous les rapports qui nous flattent ou
nous intéreflent le plus.
Si nous parcourions la nomenclature des plantes
dans les différens âges, chez les différens peuples,
nous reconnoîtrions que telle eft la marche que
l'on, a fui vie, & cet examen ne feroit pas fans
intérêt ; mais je dois ici me borner à quelques
obfervations générales pour infpirér ce goût de
recherches , & èn faire fentir l'importance.
La nature, femontrant à l’homme avec Tes guirlandes
& fes bouquets de fleurs, étoit trop belle
pour ne point fixer les regards > mais fans doute
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l’homme, pendant long-temps, borna fon admiration
à l’enfemble de ce tableau, fans en examiner
les détails; il ne chercha à-connoître, àdiftinguer
que les,plantes qu’il pouvoit convertir à fon ufage.
Le nombre en étoit très-borné ; il n'augmenta
qu'à mefure que les plantes médicinales vinrent
fe réunir aux plantes alimentaires; & comme
alors ces plantes n'occupoient la penfée que par
leurs propriétés, la plupart d’entr*elles ne reçurent
que des noms relatifs à leur emploi, ou à
leurs vertus vraies ou fuppofées.
Ce fyftème de nomenclature, perpétué d’âge
enâge,.prefque jufqu’ànos jours,a flétri, comme
dit Roufleau, l'éclat des plûs belles fleurs; &
lorfqu'il s'agit de les indiquer par leur nom vulgaire,
cette nomenclature reffemble tellement à
l'inventaire d'une boutique de pharmacie, que
nous ne fommes plus frappés que des maux qui
affligent l'humanité. Ces fleurs, qui naiffent en
foule fur le bord des ruifteaux, à l'ombre des
bocages, qui embellifTent les prés, les coteaux,
les vallons, fi propres à récréer la vue, à égayer
nos .idées, converties en fimples , ne font plus
que des herbe a Vèfquïnancie, herbe aux poux, herbe
aux hémorroïdes, herbe aux téigneux, herbe aux
hernies , herbe aux verrues , &c. Ces lugubres dénominations
confirmoient le vulgaire de plus en
plus dans l'idée qu'on ne devo.it chercher dans les
plantes que des remèdes, & l’on dédaignoit toutes
celles dont on ne pouvoit pas citer les propriétés.
A ces noms ridicules on en joignit d’autres qui
ne l'étoient guère moins. On compara quelques
parties des plantes à celles des animaux, & d'après
une refîemblance très-vague, plus fouvent nulle,
on vit paroître les noms de pied de loup, pied de
lion, pied d'oifeau, pied d3alouette , pied de veau ;
langue de ferpent, langue de chien, langue de cerf y
mufle de veau ; queue de fouris , de rat, de renard;
barbe de bouc y oreille de fouris; pas-d'âne ; oeil de
boeuf; dent de lion ; bec de grue ; crête de coq ,
Ces noms, du moins, font moins dégoûtans, plus
fupportables que les premiers; mais l'efprit humain
s'égarant de plus en plus dans le vague de
ces dénominations, l'extravagance fut portée juf-
qu'au point de croire que les plantes, où les parties,
des plantes qui reflembloient à quelques-uns
des organes des animaux, étoieht très-utiles dans
les maladies qui affeétoient ces mêmes organes
dans le corps humain : ainfi, l'herbe au poumon
( la pulmonaire ) , qui porte fur fes feuilles des taches
d’un blanc-livide; la pulmonaire du chêne
( lichen pulmonarius ) , dont les feuilles reflem-
blent en quelque forte à un poumon defféché; ces
deux plantes, quoique très-différentes, ont été
employées, comme favorables, dans les maladies
du poumon; elles font encore aujourd'hui indiquées
comme telles dans la plupart des livres de
matière médicale. .
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Il fe trouva cependant des imaginations plus
riantes, des efprits plusjuftes, quel’eclat des fleurs
frappa avec plus de vivacité que leurs douteules
propriétés. Se livrant alors aux charmes de la nature,
ils cherchèrent à rendre leurs fenfations
par les noms qu'ils appliquèrent aux plantes qui
les occafionnoient. La mythologie -, en pofltllion
depuis long-temps de tout animer dans l'Univers,
quelle fembloit embellir par Tes charmantes fictions,
vint aufli s’emparer du règne végétal, &
les belles formes des plantes furent comparées a
celles de la plus belle des déefles , V u aux meubles
deftinés à fa toilette : les unes furent defignées
fous le nom de fes cheveux , de fes lèvres , de Ion
nombril’, d'autres furent jugées dignes de lui fer-
vir de miroir, de peigne, de fabot. La couleur variée
des iris fut comparée à l'arc-en-ciel ; ell s
prirent le nom de la déefîe qui le repréfente. Les
mu fes, les naïades, les napées, les nymphes les
plus aimables, les personnages célébrés dans la
poéfie paftorale, vinrent de nouveau habiter les
prés & les bois dans les plantes qui leur étoient
confacrées. On y retrouve les noms de Phyllis, de
Narciffe, d'Amarillis, du bel Adonis, de l'inté-
reffante Andromède, &c. Les héros & les rois de
l’antiquité ne furent pas oubliés; Achille, Chiron
Ton inftituteur, les Satyres, Teucer, Lyfimaque,
Artémife, Sérapias, Mercuïe , Àfclépias, & c . ,
défignérent autant de plantes différentes.
Si la fcience ne gagnoit rien à cette réforme,
du moins elle écartoit de la penfée cette dégoûtante
nomenclature qui, en l'aurifiant , le promenoir
d'erreurs en erreurs. Ce n'eft plus ici la
fraude de, l’empirifme, mais le premier mouvement
d'une ame qui s'épanouit à la vue d’une belle
fleur, & qui fe complaît à l'aflimiler à tout ce que
la nature offre de plus aimable : là , c'eft la reine
des prés qui brille avec élégance par-deflùs toutes
les autres, récréant la vue par fes fleurs virginales,
& l'odorat par fon doux parfum; ailleurs, notre
regard eft frappé par une fleur d’une grandeur
impofante, c’eft le difque rayonnant du foleil ;
auifit’ôt elle en porte le nom : ces expreflïons font
autant d’images agréables. Que m'importe Y herbe
au cancer 3 a l'efquinancie , que je -dédaigne fi je
me porte bien, qui ne me'guérit pas fi je fuis
malade 1 mais la reine des prés y le fabot de Vênus 3
la fleur du foleil y excitant ma curiofité, me promettent
des jouiffances , & déjà je fuis à leur recherche
au milieu des campagnes. En vain j’ef-
fayerois de peindre le plaifir attaché à ce genre
de recherches; il brille dans les yeux, dans l'ex-
prefflon animée, dans l'enthoufiafme qui tranf-
porte tous ceux qui fe livrent à cet aimable délaf-
fement.
Mais cette belle nomenclature fut interrompue
par l’établiffement du chriftianifme. Des efprits
atrabilaires crurent qu'il falloit anéantir, jufque
dans les plantes, le nom de ces aimables déités;
Botanique ; Supplément. Tome IV.
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ils allèrent chercher, dans de pieuTes légendes,
des noms de martyrs & de confeffeurs pour les
donner aux plantes ; alors elles reparurent décorées
d'une nouvelle nomenclature : il ne fut plus
queftion que de Y herbe de Saint-Jean , de Saint-
Laurent, de Saint-Quirin , de Saint-Chriftophe, de
Saint-Paul, de Saint-Etienne, &c. Le fabot de Vénus
devint le fabot de Marie ou de la mère du Ch ri fl; il
y eut la fleur de la Pajjion , de la Trinité; on en
vint à Jéfus lui-même. Des plantes furent appelées,
les unes, oeil, main de Chrifi; d'autres, épi-,
nés ; lance de Chrift , &c. Enfin, ôn y trouve 1*0 -
raifon dominicale ; une efpèce de fouchet fe
nomme Pater no(1er; la gratiole, grâce de Dieu
{ gracia Dei). Le diable ne fut pas oublié; la fca-
bieufe porte le nom de morfure du diable ; le millepertuis,,
celui de chaffe-diable; le grand liferon,
celui de boyaux du diable , &c. C'eft ainfi qu’a-
bufant de ce que la religion leur offroit de plus
refpeétable, des efprits fuperftitieux & grofliers
profanoient des noms facrés qui ne doivent trouver
place que dans les expreflions de la reconnoif-
fance envers l’auteur fublime de la nature.
Un nom mal appliqué eft plus que ridicule ; il
entraîne, l'efprit humain dans des erreurs que la
lumière de plufïeurs fiècles peut à peine détruire.
Le merveilleux marche toujours à la fuite
de l'ignorance, ou plutôt il en eft la conféquence.
Nous avons vu plus haut que les noms des différens
organes donnés aux plantes avoient porté
à croire que cette prétendue relîemblance indi-
quoit des végétaux propres à guérir dans le corps
humain les maladies des organes correfpondans.
ii en a été de même, lorfqu'au lieu de noms pharmaceutiques,
on donna aux plantes des noms
religieux. Pendant plufïeurs fiècles, le peuple, a
été perfuadé que le millepertuis , nommé chaffe-
diable 3 arrêtoit les effets des enchantemens, des
maléfices, s'oppofoit à l'apparition des démons;
on y joignoit aufli.la bruyère & l’origan. Les Grecs
& les Romains avoient également leurs herbes
magiques ; la verveine, le moly, la circee, la mandragore,
&c. Célèbre par fes propriétés, l'herbe
de Saint-Jean (l'armoife) l'eft encore dans certaines
contrées , par fa vertu de garantir les édifices du
tonnerre, lorfqu'elle eft recueillie la veille de Saint-
Jean, & placée au-deffus de la porte des maifons.
J’ai vu cette pratique encore en ufage dans quelques
villages de Picardie. M.nhiole J après avoir
vanté les propriétés de la fcabieufe fuccife dans lés
maladies peftilentielles, ajoute qu'on ne la nomme
mors ou morfure du diable, que parce que celui-
c i , jaloux de l'efficacité de cette plante , en ron-
geoit les racines pour effayer de la détruire. Ces
exemples, & beaucoup d’autres que je pourrois
y ajouter, fuffifent pour faire fentir l'influence
des noms fur la croyance du peuple.
On voit avec étonnement les plantes conferver
pendant plufïeurs fiècles cette bizarre nomencla