les observer dans les forêts du Brésil, sans avoir
jamais ouï le moindre son sortir de leur gosier.
Le soir et le matin ils abandonnent les forêts
ombreuses pour se répandre dans les buissons ;
mais dans le milieu du jour ils y rentrent pour
se garantir des atteintes du soleil; et c’est alors
qu’ils se perchent sur les branches, et même sur
les plus grosses, sans pour cela rester paisibles.
La plupart des espèces vivent solitaires, et ne se
trouvent sur les mêmes arbres qu’accidentellement
; mais quelques unes se réunissent, et forment
des essaims que les mêmes besoins, que les
mêmes fleurs attirent. Nous avons très souvent
vu au Brésil des oiseaux-mouches groupés par
douzaines dans un grand arbre de corail alors
chargé de fleurs, dont ces volatiles recherchaient
le suc miellé qu’il leur présentait en abondance
dans le mois d’octobre. «Les oiseaux-murmures,
dit Stedman dans la relation de son voyage à
Surinam et dans l’intérieur de la Guiane, se plaçaient
en tel nombre sur les tamariniers, qu’on ! 3
les eût pris pour des essaims de guêpes. On en
faisait tomber plusieurs chaque jour, en leur jetant
des petits pois ou des grains de mais avec
une sarbacane. »
Ces volatiles ont les plus grands soins de leurs
petits, et possèdent la plus grande industrie pour
façonner les nids qui doivent recevoir leur famille,
a Le nid qu’ils construisent1 répond à la
délicatesse de leur corps ; il est fait d’un coton fin
ou d’une bourre soyeuse recueillie sur des fleurs.
Ce nid est fortement tissu, et de la consistance
d’une peau douce et épaisse; la femelle se charge
de l’ouvrage, et laisse au mâle le soin d apporter
les matériaux ; on la voit empressee a ce travail
chéri, chercher, choisir, employer brin à brin les
fibres propres à former le tissu de ce doux berceau
de sa progéniture; elle en polit les bords
avec sa gorge, le dedans avec sa queue; elle le
revêt à l’extérieur de petits morceaux d’écorces
de gommiers qu’elle colle à l’entour pour le défendre
des injures de l’air, autant que pour le
rendre plus solide; le tout est attache a deux
feuilles ou à un seul brin d’oranger, de citronnier
(ou sur les feuilles d’ananas, d’aloès, de ca-
feyer), ou quelquefois à un fétu qui pend à la
couverture de quelque case. Ce nid n’est pas plus
gros que la moitié d’un abricot, et fait de meme
en demi - coupe ; on y trouve deux oeufs tout
blancs , et pas plus gros que des petits pois ; le
mâle et la femelle les couvent tour à tour pendant
douze jours ; les petits éclosent au treizième,
et ne sont alors pas plus gros que des
mouches. »
A ce tableau plein de fraîcheur et de vérité, et
: 1 Buffon, hist. de l’oiseau-mouche.