ou de la Guiane, on est émerveillé des proportions
gigantesques des arbres chargés de fleurs
et de fruits, supportant sur leurs rameaux des
plantes étrangères, qui forment, comme les jardins
de Babylone, des parterres aériens. La variété
de ces végétaux a les plus grands charmes,
et les beaux dessins du comte de Clarac et de
M. Ruggendas peuvent à peine en donner une idée
complète. Les moindres buissons sont formés de
lantana, de mélastômes ; des bignonia serpentent
ou s’enlacent sur les troncs des arbres, grimpent
jusqu’à leur cime, retombent, se relèvent, pour
former dans les ravins, sur les fondrières, des
arches de verdure et de fleurs, des berceaux aussi
élégans que variés. A ce mélan'ge ou a cet heureux
assemblage de la nature vegetale, aux epi-
dendrum parasites, aux larges heliconia, aux
bolets d’un rouge fulgide, ajoutez les tangaras
de toute couleur, des guits - guits azurés, des
oiseaux-mouches resplendissans, et vous aurez,
encore une idée bien imparfaite de la rare beaute
de ces sites lointains.
Parmi les morceaux littéraires qui sont relatifs
aux oiseaux-mouches du Brésil, nous citerons
de préférence un extrait emprunte a notre ami
Ferdinand Denis. Il est tire de ses Scenes de la
nature entre les tropiques. «Le papillon, chez
p les Grecs, était, dit ce jeune voyageur, l’em-
« blême de l’ame; on ne sera donc point surpris
« de voir que le plus léger et le plus charmant
« des oiseaux ait renouvelé la même croyance
« chez un des peuples brésiliens1. Combien de
« fois n’ai-je point admiré les gracieux oiseaux-
« mouches sur les aigrettes blanches des jemrosa ;
« s’ils passent d’un arbre à l’autre, le regard a
« moins de rapidité ! »
Les noms que reçurent les oiseaux-mouches
dans leur patrie, et de la part des Indiens et
de celle des Européens transplantés dans le
Nouveau-Monde, varient sans doute suivant le
génie de chaque peuple; mais partout ils sont
l’expression mnémonique de leurs qualités, de
leurs habitudes ou de leurs attributs. Les Indios,
ou ces tribus nomades qui vivent dans les profondeurs
des forêts, que nous décorons du nom
de sauvages ; ces hommes livrés toute leur vie
aux observations instinctives, dont les idées de
poésie sont l’image des objets qui frappent leurs
yeux, ont adopté des noms qui signifient le plus
souvent et par métaphore, rayons du soleil, cheveux
de l’astre du jour, diseaux murmures, et
* M. de Humboldt [Monumens des peuples de l’Amérique) rapporte,
en parlant de la religion des Mexicains, que l’épouse du
dieu de la guerre, nommée Toyamiqui, conduisait les âmes des
guerriers morts pour la défense des dieux dans la maison du Soleil,
et qu’elle les transformait en colibris.