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 descriptions  incomplètes,  lors  sur-tout  que  pour  établir  des  especes  on  
 s'en  rapporte  uniquement  aux  différences que  présentent  ces  descriptions.  
 Nous  avons  figuré le  kottoréa  de  grandeur  naturelle :  ainsi  quant à sa  
 taille  on  peut  s'en  rapporter à celle  de nos  planches  qui  le  représente.  Nous  
 avons  vu  plus  de  trente  individus  de  divers  sexes  et  âges  de  l'espece,  qui  
 provenoientde  l'isle de Ceylan. Nous  en avons vu  aussi plusieursqui  avoient  
 été envoyés  de  Java  et d'autres  parties  de  l'Inde. Nous  en  avons vu  un  enfin  
 que  Sonnerat  avoit  apporté  de  Mahé ;  et  c'est  la  comparaison  que  nous  
 avons  faite de  tous  ces  individus  entre  eux  qui  nous a  mis à même  de  rectifier  
 les erreurs  que  les nomenclateurs  avoient commises à son  sujet.  Nous  
 avons  aussi  beaucoup  de  raisons  pour  croire  que le  dessin  que  Latham a  
 vu  de  cet oiseau  dans  la  collection  de  lady Impey a  étc  fait  d'après  un  individu  
 qui  fait  aujourd'hui  partie  de  mon  cabinet;  individu  que  j'ai  acquis  
 à  Amsterdam,  et auquel  on  avoit  en  effet.peint  le  tour  des  yeux  en  rouge,  
 les  préparateurs  ayant  en  général,  sur-tout  en  Hollande,  la  mauvaise  
 habitude  de  colorier  ainsi  les  parties  nues  des  oiseaux.  J'ai  même  vu  un  
 de  ces  barbus  dont  le  tour  des  yeux  avoit  été  peint  en  bleu ;  ce  qui  probablement  
 nous  auroit  encore  procuré  une  cinquième  espece  du  même  
 oiseau,  s'il  avoit  été  remarqué  par  certains  ornithologistes.  
 Le  kottoréa  est caractérisé  par  un  bec  long,  large,  et  épais à sa  base,  où  
 la  mandibule  supérieure  est  évasée,  et  emboîte  l'inférieure;  celle-ci  est  
 arquée,  de  sorte  que  le  bec  est convexe  en  dessus  et  en  dessous;  l'une  et  
 l'autre  mandibule  se  terminent  en  pointe  acérée ;  de  très  longs  poils,  qui  
 vont  jusqu'au-delà  des  deux  tiers  de la  longueur  du  bec,  en  obstruent  
 toute  la  base.  Le  tour  des  yeux  est  entièrement  nu ,  et  les  ailes  ployées  
 dépassent à  peine  la  naissance  de  la  queue, si  légèrement  étagée  qu'elle  
 s'arrondit  au  bout  lorsqu'elle  est  étalée.  La  tête  est grosse comme  chez  tous  
 les  barbus,  et  les  pieds,  robustes,  n'ont  rien  de  particulier  dans la  distribution  
 des  doigts.  Quant à  la  couleur  du  plumage,  il  varie  un  peu  de  
 nuance,  suivant le  climat,  le  sexe  ou  l'âge.  Dans  l'état  parfait,  le  mâle a  
 toute  la  tête,  le  cou  et  la poitrine,  d'un  brun  plus  ou  moins  foncé,  ondé  de  
 blanc  sale  ou  fauve  qui se  dessine  sur  chaque  plume  en  coups  de  pinceau  
 alongés  suivant  la  longueur  de  ces  plumes :  cependant  sur  le  haut  de la  
 tête  et le  derriere  du  cou  le  brun  est  un  peu  plus  foncé,  et  les  ondes  sont  
 d'un  brun  roux ;  le brun  plus  léger  de la  poitrine  est nuancé  d'un  verd  pâle  
 qui,  prenant  toujours  un  peu  plus  de ton,  colore  tout  le  dessous  du  corps ,  
 les  couvertures  du  dessous,  et  le revers  de la  queue;  sur  le haut  du  dos  le  
 verd  prend  une  légere  teinte  du  brun  du  derriere  du  cou.  Les  scapulaires,  
 le  croupion,  les  couvertures  supérieures  de  la  queue,  toutes  celles  des  
 ailes ,  tout  ce  qui  est  visible  des  pennes  de  ces  dernieres ,  le  dessus  de  
 la  queue,  sont  d'un  verd  un  peu  plus  foncé  que  celui  du  dessous  du  
 corps;  cependant  le bout  des pennes  de  la  queue  et  celui  des pennes  alaircs  
 se  chargent  d'un  ton  brunâtre,  et  sur  les plus petites  couvertures  des  ailes  
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 ainsi  que  sur  le  milieu  de  quelques  unes  des  grandes,  on  remarque  un  
 trait  blanc  sale.  Le  bec  est  d'un  brun  rougeâlre ;  les  pieds  sont jaunes,  et  
 les  barbes  noires.  Pour la  peau  nue  qui  entoure  les  yeux,  elle  étoit  jaune  
 dans  tous  les  individus  que  j'ai  vus  de  l'espece  dans  toute  leur  pureté ;  
 individus  au  nombre  de  plus  de  trente,  envoyés  de  Ceylan à M.  Boërs,  le  
 fiscal,  pendant mon  séjour  au Cap.  Tous  ces  individus,  qui  n'avoient  subi  
 d'autre  préparation  que  celle  d'être  simplement  desséchés,  sans  même  les  
 vider,  in'avoient  fourni  l'occasion  de  reconnoître,  par  la  dissection  que j'en  
 fis,  les  sexes  de  l'espece.  Les  femelles  étoient  un  peu'plus  petites  que  les  
 mâles, et leurs  couleurs  étoient généralement  par-tout un peu moins foncées  
 que celles  de ces derniers. Chez  les jeunes,  le brun  de la tête  tiroit  beaucoup  
 au  roux,  et tout  le  dessous  du corps,  au  lieu  d'y  être  d'un  verd  clair, y  étoit  
 ondé  de brun  roux,  et d'un  blanc  sale à peu près semblable à celui du  devant  
 du  cou  et  de  la  poitrine  des  vieux;  chacune  des couvertures  de  leurs  ailes  
 portoit  un  trait  blanchâtre  sur  son  milieu :  leur  bec  enfin ,  n'ayant  pas  
 encore  acquis  tout  son  développement,  étoit  plus  court  que  celui  des  
 adultes. Il  est  facile  de  juger,  d'après  les  observations  scrupuleusement  
 exactes  que  nous  venons  de  faire ,  que  ce  sont  ces  variations  qui  ont  
 donné  lieu  aux  nomenclateurs  de  faire  autant  d'especes  d'une  seule  et  
 même  espece  que  les  ornithologistes y  en  avoient  vues  d'après  les  différents  
 âges  et  sexes  des  individus  qu'ils  en  avoient  examinés  séparément  
 et  décrits  les premiers.  Nous  observerons  enfin que le verd  du  plumage  du  
 kottoréa  est  très  sujet à se  dénaturer  par  les  préparations,  et  qu'il  n'a  qu'à  
 vieillir  dans  une  collection  pour  prendre  un  ton jaune, et  finir par  devenir  
 feuille  morte;  ce  qui  au  reste  arrive à  tous  les  barbus  verds  des  Indes  en  
 général.