88 HISTOIRE N A T U R E L LE
descriptions incomplètes, lors sur-tout que pour établir des especes on
s'en rapporte uniquement aux différences que présentent ces descriptions.
Nous avons figuré le kottoréa de grandeur naturelle : ainsi quant à sa
taille on peut s'en rapporter à celle de nos planches qui le représente. Nous
avons vu plus de trente individus de divers sexes et âges de l'espece, qui
provenoientde l'isle de Ceylan. Nous en avons vu aussi plusieursqui avoient
été envoyés de Java et d'autres parties de l'Inde. Nous en avons vu un enfin
que Sonnerat avoit apporté de Mahé ; et c'est la comparaison que nous
avons faite de tous ces individus entre eux qui nous a mis à même de rectifier
les erreurs que les nomenclateurs avoient commises à son sujet. Nous
avons aussi beaucoup de raisons pour croire que le dessin que Latham a
vu de cet oiseau dans la collection de lady Impey a étc fait d'après un individu
qui fait aujourd'hui partie de mon cabinet; individu que j'ai acquis
à Amsterdam, et auquel on avoit en effet.peint le tour des yeux en rouge,
les préparateurs ayant en général, sur-tout en Hollande, la mauvaise
habitude de colorier ainsi les parties nues des oiseaux. J'ai même vu un
de ces barbus dont le tour des yeux avoit été peint en bleu ; ce qui probablement
nous auroit encore procuré une cinquième espece du même
oiseau, s'il avoit été remarqué par certains ornithologistes.
Le kottoréa est caractérisé par un bec long, large, et épais à sa base, où
la mandibule supérieure est évasée, et emboîte l'inférieure; celle-ci est
arquée, de sorte que le bec est convexe en dessus et en dessous; l'une et
l'autre mandibule se terminent en pointe acérée ; de très longs poils, qui
vont jusqu'au-delà des deux tiers de la longueur du bec, en obstruent
toute la base. Le tour des yeux est entièrement nu , et les ailes ployées
dépassent à peine la naissance de la queue, si légèrement étagée qu'elle
s'arrondit au bout lorsqu'elle est étalée. La tête est grosse comme chez tous
les barbus, et les pieds, robustes, n'ont rien de particulier dans la distribution
des doigts. Quant à la couleur du plumage, il varie un peu de
nuance, suivant le climat, le sexe ou l'âge. Dans l'état parfait, le mâle a
toute la tête, le cou et la poitrine, d'un brun plus ou moins foncé, ondé de
blanc sale ou fauve qui se dessine sur chaque plume en coups de pinceau
alongés suivant la longueur de ces plumes : cependant sur le haut de la
tête et le derriere du cou le brun est un peu plus foncé, et les ondes sont
d'un brun roux ; le brun plus léger de la poitrine est nuancé d'un verd pâle
qui, prenant toujours un peu plus de ton, colore tout le dessous du corps ,
les couvertures du dessous, et le revers de la queue; sur le haut du dos le
verd prend une légere teinte du brun du derriere du cou. Les scapulaires,
le croupion, les couvertures supérieures de la queue, toutes celles des
ailes , tout ce qui est visible des pennes de ces dernieres , le dessus de
la queue, sont d'un verd un peu plus foncé que celui du dessous du
corps; cependant le bout des pennes de la queue et celui des pennes alaircs
se chargent d'un ton brunâtre, et sur les plus petites couvertures des ailes
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ainsi que sur le milieu de quelques unes des grandes, on remarque un
trait blanc sale. Le bec est d'un brun rougeâlre ; les pieds sont jaunes, et
les barbes noires. Pour la peau nue qui entoure les yeux, elle étoit jaune
dans tous les individus que j'ai vus de l'espece dans toute leur pureté ;
individus au nombre de plus de trente, envoyés de Ceylan à M. Boërs, le
fiscal, pendant mon séjour au Cap. Tous ces individus, qui n'avoient subi
d'autre préparation que celle d'être simplement desséchés, sans même les
vider, in'avoient fourni l'occasion de reconnoître, par la dissection que j'en
fis, les sexes de l'espece. Les femelles étoient un peu'plus petites que les
mâles, et leurs couleurs étoient généralement par-tout un peu moins foncées
que celles de ces derniers. Chez les jeunes, le brun de la tête tiroit beaucoup
au roux, et tout le dessous du corps, au lieu d'y être d'un verd clair, y étoit
ondé de brun roux, et d'un blanc sale à peu près semblable à celui du devant
du cou et de la poitrine des vieux; chacune des couvertures de leurs ailes
portoit un trait blanchâtre sur son milieu : leur bec enfin , n'ayant pas
encore acquis tout son développement, étoit plus court que celui des
adultes. Il est facile de juger, d'après les observations scrupuleusement
exactes que nous venons de faire , que ce sont ces variations qui ont
donné lieu aux nomenclateurs de faire autant d'especes d'une seule et
même espece que les ornithologistes y en avoient vues d'après les différents
âges et sexes des individus qu'ils en avoient examinés séparément
et décrits les premiers. Nous observerons enfin que le verd du plumage du
kottoréa est très sujet à se dénaturer par les préparations, et qu'il n'a qu'à
vieillir dans une collection pour prendre un ton jaune, et finir par devenir
feuille morte; ce qui au reste arrive à tous les barbus verds des Indes en
général.