
i 3 6 LETTRE SUR UN ELEPHANT
» Ce fat-là qu’au mois de Décembre de l’année
» on déterra des os prodigieux qui faifoient
» partie des jambes de derrieûe de l’animal, 8c
» dont l’un était du poids de dix-neuf livres.
» On en trouva enfuite un autre de fiOgure ronj.
de, avec fon emboëtement plus gros'que la tête
» d’un homme, & pefant neuf livres -, 8c après ce-
« lui—là un plus grand encore , appartenant à la
» cuifîè., & de la pefanteur de trente-deux livres.'
« Au commencement de l’année lui vante, après
« que le grand froid lut palfé, on le remit à creu-
» 1er dans le même endroit, 8c on découvrit Té—
» pine du dos avec les cotes qui y étoient adhé-
» rentes, & dans une plus grande profondeur deux
» os lphériques plus vaftes encore, avec les os des
» jambes de devant .& Celui de l’épaule long de
» quatre pieds 8c larges de deux palmes & demie.
» On rencontra bientôt après les vertèbres du col,
» & l’os pointu qui en forme le v e r t e x , ou le lom-
» met. Enfin, on découvrit une tête énorme avec
» quatre dents macheliéres, chacune du poids de
»» douze li y ses, & deux greffes dents ou cornes
» Portant de cette tête, larges de deux palmes 8c
« demie , 8c longues de huit pieds.
» Pour éclairer le lieu où étoit cette tête, afin
» qu’on pût la confidérer plus exaélement, on per-
» ça la colline, 8c il fallut pour cet effet, creufer
» à la profondeur de vingt-quatre pieds : ce qui
» étant exécuté, le Prince de S a x e -G o th a s’y ren-
» dit le 2 2 . de Janvier, 8c U voulut que M. T e n tÎ
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:,, ^ e liu s , auteur de cette Lettre, fût du nombre de
„ ceux qui l’accompagnoient. Mais fi, d’un côté,
„les Spéculateurs confidérérent avec admiration
„cette tête, avec lès prodigieulès dents, ils eu-
„ rent d’un autre côté, le chagrin de voir que la
„carie avoit rendu fi fragiles tous ces os, à l’exception
des dents macheliéres, & qu’ils avoienc
„ tellement fouffert dans la fituation violente où
ils s’étoient trouvés, qu’on ne put en emporter
„ aucun qui fût parfaitement fain & entier, la plû-
.„ part étant rompus, & d’autres tout brifés.
,, Le bruit s’étoit d’abord répandu que ces os
„ étoient ceux d’un Géant, mais il s’évanouit à la
„ vûe de la tête, de les lèntimens le réduifirent en-
„ fuite à ces deux. Les uns loutenoient que c’é-
„ toit-là un fquelette d’éléphant que le tems avoic
„pétrifié, car ill’étoit prelque entièrement. Les
„ autres vouloient que cette maffe fût une Licorne
„ fofiile, ou une produéHon minérale de la terre ,
„ & dont la forme étoit un jeu de la Nature.
„ M. T en t^ e liu sy qui fe déclara pour le premier
„ de ces lèntimens, compare d’abord les dimen-
„ fions 8c la figure des os du fquelette avec celles
„ qui fe trouvent dans l’anatomie d’un éléphant,
„ donnée par A . Adaulinus à Dublin l’an 168 r. 8c
„avec les oblèrvations de J . B ^a y , autre Auteur
„ Anglois ; &îl découvre une parfaite conformité
„ entre les unes 8c les autres. Il s’attache enfuite à
„faire voir que ce fquelette pétrifié n’étoit pas de
„la nature de ces folfiles minéraux, qui ont des
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