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aux répanduës, fans aucun égard aux difficultés
dont j ai fait mention ; il en refte. encore d’autres,
qui s oppofent à ce qu’une telle hipothéfe foit re çue.
Les Pierres, par exemple, formées d’un fable
durci ôc lié par des molécules criftalines, fup-
pofent lexiftence du fable déjà antérieure à ces
Pierres mêmes ôc aux rochers, dont elles ne fe-
roient que des débris plus ou moins arrondis, ou
applatis par le mouvement de l ’eau. Phénomène
qui mène néceflàirement à une circulation éternelle,
fans que l ’on puiffe y trouver un point fixe.
Les pierres Ôc les rochers auront été avant le fable
, ôc celui-ci à fbn tour aura été avant les rochers
ôc avant les Pierres, fans qu’on puiffe dire
lefquels ont précédé.
Les montagnes auront été amenées dansla mer,
enfùite les bancs de nouvelle date ( fi tant eft que
des bancs qui auront été vingt, trente, quarante,
cinquante ôc cent mille ans à fe former, fbient récens
) auront pris la place des anciens. Ceux-ci fe
feront cachés fous les ondes de la mer, laquelle
occupera la place qu’occupoit le continent. A lternative
qui aura eu lieu une infinité de fois, fans
qu on puiffe lui affigner aucun commencement :
Alternative qui fuppofe une chofe impoffible, c’eft-
à-dire le changement du point de pefanteur. En
effet, comment faire changer ce point dans un
Globe, qui, s’il eft creux, doit avoir néceffairer
ment une voûte concentrique, qu’aucun pouvoir
naturel ne peut enfoncer t
DES PIERRES. i î
Que la croûte fùpérieure de ce Globe, cornpo-
fée d’une certaine quantité de matière fluide ôc fo-
-lide, fouffre divers changemens ; que tantôt le
fluide occupe les lieux où une portion de la partie
folide étoit placée fort au-deflùs du niveau du fluide
H ôc que tantôt le folide remplilfe les lieux que
le fluide occupoit ; il ne fe fera qu’un changement
lent, qui tout au plus produira peu à peu une
inondation générale, parce que les eaux fe répandront
de tous côtés, à rnefùre que les pierres ôc les
fables prendront leur place. Quel point déterminé
affigner au progrès des matières folides entraînées
dans le lit de la mer, pour dire qu’alors précifé-
ment fe fera tout d’un coup l’enfoncement de l’ancien
continent, ôc l'élévation du nouveau 1
Accordons encore cet article, qu’un certain
jour les bancs ou les couches qui avoient été tant
de milliers d’années à fe former dans le fein de la
mer, s’élevèrent tout à coup, ôc que les eaux qui
s’étoient arrêtées je ne fçai où, s’enfoncèrent ailleurs
; la ftruélure des Continens ôc des montagnes
qui occupent tant de place aujourd’hui, convient-
elle à ce mécanifme ? Conçoit-on comment il a pû
fe faire dans cette hipothéfe, que les continens ôc
les montagnes ayent une double pente, au Nord
ôcauSud, ou àl’Orient&: à l’Occident? Un mouvement
febit, ôc fi corifidérable pourtant que l’a
dû être celui qui a élévé du fond de la mer les continens
ôc les Ifles, comment a-t-il pu donner au
contour des montagnes, une forme auffi régulière