H I S T O I R E P H Y S I Q U E
JVcitfeuioue ies Rivages élevez, & les bas. Au refte les divers horizons, que
j ’ai établis, dans cette partie, demandent naturellement qu’on faffe
cette réflexion, qui importe; favoir que tout ce qu’on a dit, qu’en
certains lieux la Mer n’avoit point de fond , eft une fable & une
faufleté evidente.
D a k s le Trajet que nous examinons, cette fuppofition commence
de la Côte fous l’Eau. Les Pêcheurs fortans, dans cette pente, où ils
ont coutume de tirer du Corail à i j o . & 200. Brafles, & n’étant
pas conduits au fond par cette meflire de Corde, s’imaginent qu’il
n’eft pas trouvable, & difent en leur jargon par une exagération grof-
fiere, que VAbîme n’a point de fo n d , & qu’il n’y a nulle efperance
de le trouver. Cette penfée que des perfonnes expérimentées, pour
ce qui regarde la Mer, ont eue, auffi bien que de Amples pêcheurs, me
UquXoTnc P11"0' 1 extravagante, & fondée feulement flir ce qu’aucun n’a voulu
îcfondf'&'de encore fe donner la peine, & faire la dépenfe de préparer ce qu’il
?eonk™oor- faut, pour cette fonde; laquelle apparemment ne fe fera jamais, fi
roit rouver. q u e | q u e prjnce n’ordonne, pour cela, des bâtimens particuliers &
des Inftrumens proportionnez. Car pour ce qui eft des Mariniers,
ils ne cherchent jamais le fond, qu’à peu de profondeur, & ne le
foucient guere de prendre les loins de rechercher plus avant, d’abord
qu’ils trouvent quelques brafles d’Eau de plus qu’ils ne s’é-
toient propofez , ou qu’ils ont de la difficulté à faire defcendre
leur fer.
Qae dans le No u s trouvons par les Coupes, que nous avons faites, deux
o™trom?“ principaux horizons dans le fond. L e premier eft celui de la plaine,
paux hori- qUe l’on diftingue parfaitement du Rivage du Continent, & qui s’é-
“o'nrroïen tend jufques à l’autre Rivage, fous l’eau. C ’eft-là où commence le
trouverd'au- fecond ; mais comme il ne m’eft connu qu’à i jo. Brafles de la fuper-
ficie de l’Eau, je dirai feulement qu’il arrive peut-être à 1000 Braf-
fes ou plus, & lors qu’on a palfé le plus grand fond les horizons peu
à peu s’élèvent en forme de degrez, pour fe joindre au Continent
d’Afrique ; qui eft à l’opofite de celui, que nous examinons. Il fèroit
néceflaire, pour la continuation des Coupes du fond de la Mer Mediterranée,
de connoître les lieux les plus profonds.; mais j ’ai déjà
dit que cela ne fauroit s’exécuter, fans l’aflîftance d’un Souverain.
Que les wo- M es diverfes obfervations pour les plus grandes élévations des
iêmteSü- Montagnes d’Europe, que je pris avec le Baromètre, m’inciterent à
montagnes, rechercher les plus grands fonds de la Mer, jugeant que fous l’Eau
cette propo- il fe trouvoit des abîmes d’une profondeur proportionnée à l’élevation
tion des Montagnes fur l’horizon. St. Gotard, dans laSuifle, eft
le Mont le plus élevé que j ’aye vu, jufqu’àpréfent; mais comme je n’ai
pas ici fa mefure,je paflerai au plus voifin de notre rivage, qui eft le
MontCanigou, que Mr. Caffint, en établiflant le Méridien de l’Ob-
fervatoire Royal de Paris, prolongé dans toute la longueur de la
France, trouva de 1400. Toifes d’élévation fur l’horizon de la mer.
J’en ai fait Implication en une profondeur, où commence l’Abîme &
en un lieu, où commence ce Mont Canigou, pour former une coupe
en laquelle on puifle voir, d’un coup d’oeuil, la convenance qui fe
trouve en ces deux parties ; qui font châcune à la même diftance de la
plus grande hauteur, & du plus grand fond de l ’abîme, & de la
Montagne. Cette démonftration prouve aflez, cemefèmble, que
la profondeur de la Mer qui nous eft inconnue répond à la plus
grande élévation des Montagnes fiir la T e r r e , car nous voyons
bien que tout cela fe forme également par des couches redoublées;
& dans un certain ordre de degrez, pour monter, & pour
defcendre.
J’ Ai eu la curiofité de m’informer des plus habiles Mariniers, qui oPwonfa
naviguent fur la Mediterranée, de l’endroit, où ils croyent que cette
Mer ait plus de profondeur. Us m’ont tous afluré que c’étoit à la *=■ »M e rT s
1 i n r i • • l a . . _ * que plus les
hauteur de Malte ; mais ils n en ont point de pofitives obfervations aêvcz
Les raifons même, qu’ils produifent, ne me femblent pas fort con- m , &paT
vaincantes. Cependant comme je n’ai pas là-deflus des obfervations conmirc'
plus certaines, je ne puis que m’en raporter à ce qu’ils m’en ont raconté.
C ’eft, difent-ils, une réglé générale, dans nos rivages particuliers,
qu’où les bords font élevez, & perpendiculaires, la Mer a
beaucoup de profondeur, & que là où ils font bas, comme ceux du
Languedoc, elle en a très-peu, & il eft par confequent très-difficile
en ces lieux-là de gagner la Terre avec les Batteaux. Il n’en eft
pas de même en ceux de Provence, car étant élevez, on en apro-
che fans peine.
L es lignes de Sel & de Bitume, qui donnent aux Eaux de la Queiai,^
Mer la diverfité de leurs go û ts , s’y étendent par les interftices Bitumé?
des couches de pierre , dans le même ordre, qu’en nôtre Con-
Tt i i * - nierequ’en
tment. Il y a aparence que les lignes des plus fins Métaux s3y ne£e q^Ï"
trouvent auffi, & peut-être y caufent toutes ces couleurs, qUe SSî
nous voyons fur plufieurs Corps folides, exiftans dans le fond de d“ ^
la Mer , & particulièrement fur les Plantes que nous apellons
pierreufes.
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