P A CH YD E RM E S .
Quoique les animaux qui forment aujourd’hui cet
ordre aient toujours été plus ou moins rapprochés l’un
de l’autre par les naturalistes qui ont eu quelque idée
des rapports naturels, cependant ils n'ont définitivement
été réunis que par les travaux de mon frère sur
les animaux fossiles, lesquels, ayant fait connaître
plusieurs genres nouveaux, ont établi des points d’union
qui n’existaient pas, et effacé des lacunes que
l’esprit ne pouvait remplir.
Linnæus composait cet ordre des chevaux ; des hippopotames,
parmi lesquels il rangeait le tapir ; des cochons,
auxquels il réunissait le cabiai; et des rhinocéros.
Erxleben, qui ne forma point d’ordres, mit
cependant immédiatement à la suite l’un de l’autre, les
cochonsyles hydroeherus, qui comprenaient le tapir et
le cabiai; les hippopotames, les rhinocéros, les éléphans
et les chevaux. Plus tard, Storr constitua cet ordre
des cochons, du cabiai, des rhinocéros, des éléphans
et de l’hippopotame. Cette variation annonçait la difficulté
du sujet, san,s que les rapports principaux fussent
toutefois méconnus ; aussi est-ce ce fonds-là quia été fécondé
par les travaux subséquens. Le cabiai, qui n’est
point un pachyderme, à étérenduà l’ordre des rongeurs,
et le daman a été tiré de cet ordre, par mon frère,
pour être rapproché des rhinocéros. Il a séparé les
pécaris des cochons, et moi-même j’en'avais tirélespha-
•coclioeres. Enfin, cet ordre a pris un grand caractère
de fixité depuis que mon frère l’a considéré comme
devant être composé de la réunion de tous les mammifères
qui ne peuvent se servir de leurs pieds que
pour se soutenir, dont les doigts sont immobiles dans
des sabols, et qui ne ruminent point. Ces caractères
ont confirmé des rapprochemens qui n’étaient dus
qu’à un sentiment obscur des rapports naturels ; et aujourd’hui
les pachydermes, en comptant les animaux fossiles,
constituent quinze genres. Nous nous bornerons
à parler des pachydermes vivans(i), c’est-à-dire des
éléphans, des hippopotames, des cochons, des dico-
tyles et des babiroussas, des phacochoeres, des rhinocéros,
des damans, des tapirs et des chevaux.
Considérés sous le rapport des dents, ces animaux
nous présentent de grandes variétés de forme et de
structure. Chez les uns les incisives sont simples et,
tranchantes, chez les autres en forme de défenses, d’autres
en sontotout-à-fait privés. Il en est de même des canines
: elles ressemblent chez quelques-uns aux canines
ordinaires; elles sont pour d’autres de puissantes et dangereuses
défenses ; d’autres, enfin, en manquent tout-à-
fait. Les mâchelières sont à surface large, irrégulières et
propres à broyer. Toutes ces sortes de dents sont tantôt
pourvues et tantôt privées de racines proprement dites,
et rien n’est régulier dans leur nombre, qui, dans plusieurs
genres, varie d’une espèce à l’autre; enfin, les
mâchelières diffèrent quelquefois de nombre avec l’âge
des individus.
Au milieu de tant d’anomalies, on trouve cependant
(i) La description des dents fossiles des pachydermes, ainsi que
celle des dents des autres animaux antédiluviens, se trouve dans les
Recherches de mon frère sur les ossemens fossiles , 5 vol. in-4".