2 j q H i s t o i r e N a t u r e l l e
récent que celui de M. du Pratz. Voici ce qu’il en dit
dans fon hiftoire de la Louifiane \ v L ’ours paroîtb
« l’hiver dans la Louifiane , parce que les neiges qui
« couvrent les terres du nord, l’empêchant de trouver là
« nourriture , le chaflent des pays feptentrionaux ; il vit
** de fruits , entr’autres de glands 6c de racines, 6c lès
J> mets les plus délicieux font le miel 6c le lait : lorfqu’il
» en rencontre, il~ fe lailferoit pluflôt tuer que de quitter
» prife. Malgré la prévention où l’on elt que l’ours efl
f carnalfier, je prétends, avec tous ceux de cette province
» 6c des pays cireonvoifins, qu’il ne l’eft nullement. Il
* n’eft jamais arrivé que ces animaux aient dévoré des
» hommes, malgré leur multitude 6c la faim extrême qu’ils
» louffrent quelquefois, puifque même dans ce cas ils ne
» mangent point la viande de boucherie qu’ils rencontrent.
» Dans le temps que je demeurois aux Natchés, il y eut
« un hiver fi rude dans les terres du nord, que ces ani-
» maux defcendirent en grande quantité ; ils étoient fi
» communs qu’ils s’aflàmoient les uns les autres, 6c étoient
» très-maigres ; la grande faim les fai foi t fortir des bois
a qui bordent le fleuve ; on les voyoit courir la nuit dans
J> les habitations, 6c entrer dans les cours qui n’étoient
» pas bien fermées ; ils y trouvoient des viandes expofées
” au frais ; ils n’y touchoient point, 6c mangeoient leule-
3> ment les grains qu’ils ponvoient rencontrer. C ’étoit
Voyez I’Hiftoire de la Louifiane, par M. le Page du Pratz.
P(iris, i J ) 3 , in-12 , tome I I , page y y èf fuhantes.
1 Obfèrvez qu’il s’agit ici de l’ours noir, & non de l’ours brun.
aflurément dans une pareille occafion, 6c dans un belbin
aufli preflànt, qu'ils auroient dû manifefter leur fureur
carnalfière , fi peu qu’ils eulfent été de cette nature.
Ils n’ont jamais tué d’animaux pour les dévorer , 6c’pour
peu qu’ils fulfent carnafliers , ils n’abandonneroient pas
les pays couverts de neige , où ils trouveroient des
hommes 6c des animauîc à diferétion , pour aller au
loin chercher des fruits 6c des racines , nourriture que
les bêtes carnaflièrés refulènt de manger. » M. du Pratz
ajoûte dans une note , que depuis qu’il a écrit cet
article , il a appris avec certitude que dans les montagnes
de Savoie il y a deux fortes d’ours , les uns
noirs , comme ceux de la Louifiane, qui ne font point
carnafliers ; les autres rouges, qui font aufli carnafliers
•que les loups. Le baron de la Hontan dit ( tome 1 de
f is voyages, page 86) que les ours du Canada font
extrêmement noirs, 6c peu dangereux ; qu’ils n’attaqueftt
jamais les hommes , à moins qu’on ne tire defliis 6c
qu’on ne les blefle. Et il dit aufli ( tome I I , page y o j
que les ours rougeâtres font méchans , qu’ils viennent
effrontément attaquer les Chafleurs , au lieu que les
noirs s’enfuient.
Wormius a écrit * qti’on connoît trois ours en Norvège
: le premier ( Brejfdmr) très-grand , qui n’efl
pas tout-à-fait noir, mais brun-, 6c qui n’efl; pas fi
nuifible que les autres , ne vivant que cl’herbes 6c de
feuilles d’arbres ; le fécond ( Iîdgierfiliur) plus petit,
* Vid. Muf. Worm, pag. g i 8.