yd H i s t o i r e Na t u r e l l e
faire le tour, on la foule de nouveau ; 6t lorfque le
cerf ne s’y trouve pas, il ne relie d’autre moyen que
d’imaginer la refuite qu’il peut avoir faite, vu le pays
où l’on ell, 6c- d’aller l’y chercher. Dès qu’on fera
retombé fur les voies, 6c que les chiens auront relevé
le défaut a, ils chalferont avec plus d’avantage, parce
qu’ils fentent bien que le cerf ell déjà fatigué ; leur
ardeur augmente à melùre qu’il s’affoibiit, & leur fen-
timent ell d’autant plus diltinét 6c plus vif, que le cerf
ell plus échauffé ; aulfi redoublent-ils 6t de jambes &
de voix, & quoiqu’il falfe alors plus de rufes que ja^
mais, comme il ne peut plus courir aulfi vite, ni par
conféquent s’éloigner beaucoup des chiens, fes rufes
& fes détours font inutiles , il n’a d’autre relfource
que de fuir la terre qui le trahit, & de fe jeter à l’eau
pour dérober fon fentiment aux chiens. Les piqueurs
traverfent ces eaux, ou bien iis tournent autour, 6c remettent
enfuite les chiens fur la voie du cerf, qui ne peut
aller loin dès qu’il a battu 1 l’eau, 6c qui hien-tôt ell
aux abois c, où il tâche encore de défendre là vie,
& blelfe fouvent de coups d’andouillers les chiens &
même les chevaux des chaffeufs trop ardens , jufqu’à
ce que l’un d’entre eux lui coupe le jarret pour le
* Relever le défaut, c’eft retrouver les voies du cerf, & le lancer
une fécondé fois.
fc Battre l’eau, battre les eaux, c’eft traverfer, après avoir été longtemps
chafle, une rivière ou un étang.
c Abois, c’eft lorfque le cerf eft à l’extrémité & tout à fait épuilé
de forces.
faire tomber, & l’achève enfuite en lui donnant un
coup de couteau au défaut de l’épaule. On célèbre en
même temps la mort du cerf par des fanfares, on le
faille fouler aux chiens, 6c on les fait jouir pleinement
de leur viéloire en leur fàifant curée \
Toutes les làifons, tous les temps ne font pas également
bons pour courre le cerfb : au printemps, lorfque
les feuilles naillàntes commencent à parer les forêts,
que la terre fe couvre d’herbes nouvelles, & s’émailie
de fleurs , leur parfum rend moins fur le fentiment des
chiens ; & comme le cerf ell alors dans là plus grande
vigueur, pour peu qu’il ait d’avance, ils ont beaucoup de
peine à le joindre. Auiïi les chalfeurs conviennent-ils
que la faifon où les biches font prêtes à mettre bas,
ell celle de toutes où la chafle ell la plus difficile, 6c
que dans ce temps les chiens quittent fouvent un cerf
mal mené, pour tourner à une biche qui bondit devant
eux ; 6c de même au commencement de l’automne ,
lorfque le cerf ell en rut c, les limiers quêtent fans
ardeur; l’odeur forte du rut leur rend peut-être la voie
plus indifférente ; peut-être aulfi tous les cerfs ont-ils
dans ce temps à peu près la même odeur. En hiver,
pendant la neige, on ne petit pas courre le cerf, les-
limiers n ont point de fentiment, & femblent fuivre
Faire curee, donner la curée, c’eft faire manger aux chiens fe
cerf ou la beie cju’ils ont prife.
Courre le cerf, chàflèr le cerf avec des chiens-courans.
* Rut, chaleur, ardeur d’amour.