monde ne feroit capable de les retenir un inftant de plu£
dans un lieu dont ils voudraient s’éloigner. D ’ailleurs
la plulpart font à demi - fauvages , ne connoiffent pas
leurs maîtres, ne fréquentent que les greniers & les toits;
& quelquefois là cuifine & l’office, lorfque la faim les
preffe. Quoiqu’on en élève plus que de chiens, comme
on les rencontre rarement, ils ne font, pas fenfation
pour le nombre, auffi prennent-ils moins d’attachement
pour les perfonnes que pour les maifons : lorfqu’on les
tranfoorte à des diftances affiez confidérables, comme à
une lieue ou deux, ils reviennent d’eux-mêmes à leur
grenier, & c ’eft apparemment parce qu’ils en connoiffent
toutes les retraites à fouris, toutes les iflùes, tous les
paffiiges, & que la peine du voyage efl moindre^ que
celle qu’il faudrait prendre pour acquérir les mêmes
facilités dans un nouveau pays. Ils craignent 1 eau, le
froid, & les mauvaifes odeurs ; ils aiment à fe tenir au
foleil, ils cherchent à fe gîter dans les lieux les plus
chauds, derrière les cheminees ou dans les fours, ils
aiment auffi les parfums, & fe laiffient volontiers prendre
& careffer par les perfonnes qui en portent: l’odeur de
cette plante que l’on appelle l'Herbe-aux-chats, les remue
fi fortement & fi délicieufement, qu ils en paroiffent
tranfportés de plaifir. On efl oblige, pour conferver
cette plante dans les jardins, de l’entourer d un treillage
formé; les chats la fentent de loin, accourent pour s y
frotter, pahênt & repaffent fi fouvent par-deffus, qu ils
Ja .détriüfent en peu de temps.
A
A q u inze ou d ix-h uit m o is, ces animaux o n t pris tout
leur a c c ro iffem en t ; ils fo n t auffi en état d ’eng endre r
avant l ’â g e d ’un a n , & p eu v en t s ’a c co u p le r pendant toute
leu r v i e , qui ne s ’é tend gu è re au d elà d e n e u f ou dix
ans ; ils fo n t c ep en dan t trè s -d u r s , tr è s - v iv a c e s , & on t
plus d e n e r f & d e re ffo r t que d ’autres animaux qui
v iv e n t plus lo n g - tem p s .
L e s chats ne p eu v en t m â ch e r que len tem en t & d iffic
i lem e n t , leurs dents fo n t fi cou r te s & fi mal p o fé e s
q u ’ elles ne leu r fe rv e n t q u ’à d é ch ir e r & non pas à
b ro y e r le s a limen s; auffi ch e r ch en t- ils d e p ré fé r en c e
le s viandes les plus te n d r e s , ils a iment le p o if lo n & le
m ang ent cu it ou c rud ; ils b o iv e n t fr éq u em m en t; leur
fom m e il e fl lé g e r , & ils d o rm en t moins q u ’ ils ne fon t
ferrîblant d e d o rm ir ; ils march ent lé g è r em e n t , prefqu e
toujours en filen c e & fans faire aucun bruit ; ils fe
c a ch en t & s ’é lo ig n e n t p o u r rendre leurs exc rém en s &
le s re co u v ren t de terre. C om m e ils fo n t p r o p r e s , &
que leur ro b e e fl toujours fé c h e & lu r tré e , leur p o il
s ’é le é tr ife a ifém e n t , & l ’on en v o i t fo r tir des é tin c e lle s
dans l ’o b fcu r ité lo r fq u ’on le fro tte a v e c la main : leurs
y e u x b r illen t auffi dans les té n èb r e s , à peu près com m e
le s diamans , qui ré flé ch iffen t au d eh o rs pendant la nuit
la lumière d o n t ils fe f o n t , p ou r ainfi d ir e , imbib é s
pendant le jour.
L e ch at fauvage p ro d u it a v e c le ch at d om e f t iq u e ,
& tous d eu x ne fo n t par c o n féq u en t q u ’une feu le &
m êm e e lp è c e : il n ’ eft pas rare d e v o ir des chats mâles
Tome VI. B