LE CHEVREUI L. *
LE cerf, comme le plus noble des habitans des
bois, occupe dans les forêts les lieux ombragés
par les cimes élevées des plus hautes futaies : le chevreuil
, comme étant d’une efpèce inférieure , fe
contente d’habiter fous des lambris plus bas, & fe
tient ordinairement dans le feuillage épais des plus
jeunes taillis ; mais s’il a moins de nobfoffe , moins
de force, 6c beaucoup moins de hauteur de taille, il a
plus de grâce, plus de vivacité , & même plus de
courage que le cerf a ; il eft plus g a i, plus lefte, plus
* Le Chevreuil; en Grec, aomæV; en Latin, Capreolùs, Caprio-
lus; en Italien, Capriolo; en Efpagnol, Zorlito, Cabronfflto montes;
en Portugais, Cabra montes; ffli Allemand, Relit ; en Angiois, Roe-
Deer; en Suédois, R a-D iur, en Danois, Raa-Dïur; en E'coffois,
Roe-Buck.
D ou as, Arifiotelis. Caprea, Pfinir.
Capta., CapreolùsJïve l'toecue, GaCnet. Icon. animal, quadr. pag. 6 4'
Capriolus, Jonfton. H ijl. animal, qmdr. tab. 3 } .
Douas Scotice perfatfliliaris, Charieton. de different, animal, pag.
9‘ 9 * I2‘ ■ S , r Caprea, Plinii. Capreolùs vulgo, Cermtus fdvéffris fepteatnonalis nof-
tras, Ray. Synop. anim. quadr. pag, 8p .
Cervus cornibus ramofis, teretibus, ereélis. Linn.
Cervus minimus, Capreolùs, Cervulus, Caprea, cornibus brevibus ra-
mojis, anmatim décidais. Klein. Quadr. H ijl. Nat. page 2 4 .
“ Lorfque les faons font attaqués, le chevreuil qui les reconnoit
pour être à lui, prend leur défenlè ; & quoique ce foit un animal
éveillé ; là forme eft plus arrondie, plus élégante, &
là figure plus agréable ; fes yeux fur-tout font plus
beaux, plus brillans, 6c paroilfent animés d’un fenti-
ment plus vif; fes membres font plus fouples, fes
mouvemens plus preftes, 6c il bondit, làns effort, avec
autant de force que de légèreté. Sa robe eft toujours
propre, fon poil net 6c luftré ; il ne fe roule jamais
dans la fange comme le cerf ; il ne fe plaît que dans
les pays les plus élevés, les plus fecs, où l ’air eft
le plus pur; il eft encore plus rufé, plus adroit à fe
dérober, plus difficile à fuivre ; il a plus de fineffe,
plus de reffources d’inftinél. Car quoiqu’il ait le defa-
vantage mortel de laiffer après lui des impreftîons plus
fortes, 6c qui donnent aux chiens plus d’ardeur 6c plus
de véhémence d’appétit que l’odeur du cerf, il ne laiffe
pas de fàvoir fe fouftraire à leur pourfuite par la rapidité
de fà première courfe, 6c par fes détours multipliés
; il n’attend pas, pour employer la rufe, que la
force lui manque ; dès qu’il fen t, au contraire , que
les premiers efforts d’une fuite rapide ont été fàns
fuccès, il revient fur fes pas, retourne, revient encore,
& lorfqu’il a confondu par fes mouvemens oppofés
ïa direétion de l ’aller avec celle du retour, lorfqu’il
a mêlé les émanations préfentes avec les émanations
paffées, il fe fépare de la terre par un bond, 6c fe
jetant à côté, il fe met ventre à terre, 6c laiftè, fàns
afîèz petit, il eft afïèz fort pour battre un jeune cerf & le faire fuir.
Nouveau Traité de la Vénerie, Paris, 1750 , page 178.