15. J’ai donc dit en moi-même : Si je dois mourir aussi-bien que
l’insensé, que me seryira de m’être plus appliqué à la sagesse? Et
m’étant entretenu de ceci en mon esprit, j’ai reconnu qu’il y avoit
en cela même de la vanité.
16. Car la mémoire du sage ne sera pas éternelle , non plus que
celle de l’insensé ; et les temps à venir enseveliront tout également
dans l’oubli: l’homme savant meurt comme l’ignorant.
i j . C’est pourquoi la vie m’est devenue ennuyeuse, considérant
que toutes sortes de maux sont sous le soleil, et que tout n’est
que vanité et affliction d’esprit.
§. 111. Vanité de la sagesse humaine,
18. J’ai regardé ensuite avec détestation toute cette application
si grande avec laquelle j’avois tant travaillé sous le soleil , devant
laisser après moi un héritier,
io. Qui deviendra le maître de tous les ouvrages où je me suis
appliqué avec tant de peine et de travail, sans que je sache s’il doit
être sage ou insensé ; et y a-t-il rien de si vain?
20. C’est pourquoi j’ai quitté toutes ces choses, et j’ai pris une
résolution dans mon coeur de ne me tourmenter pas davantage
sous le soleil.
21. Car après qu’un homme a bien travaillé à acquérir la sagesse
et la science, et qu’il s’est donné bien de la peine, il laissera tout
ce qu’il a acquis aune personne qui n’aimera que l’oisiveté. Tout
cela donc est une vanité et un grand mal.
22. Car, que retirera l’homme de tout son travail, et de l’afflic*
tion de son esprit, avec laquelle il s’est tourmenté sous le soleil ?
23. Tous ses jours sont pleins de douleurs et. de misère, et il n’a
point de repos dans son ame, même pendant la nuit. Et n’est-ce
pas là une vanité ?
2\. Ne vaut-il pas mieux manger et boire, et faire du bien à
son ame du fruit de ses travaux ? Et ceci vient de la main de Dieu.
2h. Qui se rassasiera et jouira de toutes sortes de délices autant
que moi ?
s6. Dieu a donné à l’homme qui lui est agréable la sagesse, la
science et la joie; et il a donné au pécheur l’affliction et les soins
inutiles, afin qu’il amasse sans cesse, et qu’il ajoute bien sur bien,
et le laisse à un homme qui sera agréable à Dieu ; mais cela meme
est une vanité, et un tourment d’esprit fort inutile.
C H A P I T R E III.
§. I. Chaque chose a son temps.
i. T outes choses ont leur temps, et tout passe sous le ciel apres
le terme qu’il lui a été prescrit.
2. Il y a temps de naître, et temps de mourir; temps de planter,
et temps d’arracher ce qui a été planté. 3. Il y a temps de tuer, et temps de guérir; temps d’abattre, et
temps de bâtir.
4. Il y a temps de pleurer, et temps de rire ; temps de s’affliger,
et temps de sauter de joie. 5. Il y a temps de jeter les pierres, et temps de les ramasser ;
temps d’embrasser, et temps de s’éloigner des embrassemens.
6. Il y a temps d’acquérir, et temps de perdre; temps de conserver
, et temps de rejeter.
7. Il y a temps de déchirer, temps de se rejoindre ; temps de se
taire, et temps de parler.
8. Il y a temps pour l’amour, et temps pour la haine ; temps pour
la guerre, et temps pour la paix.
9. Que retire l’homme de tout son travail ?
1 o. J’ai vu l’occupation que Dieu a donné aux enfans des hommes,
qui les travaille pendant leur vie. .
11. Tout ce qu’il a fait est bon en son temps, et il a livré le
monde à leurs disputes, sans que l’homme puisse reconnoître les
puvrages que Dieu a créés depuis le commencement du monde
i us qu’à la fin.
\2. Et j’ai reconnu qu’il n’y avoit rien de meilleur que de se
^éjoujr, et de bien faire pendant sa vie :