A R G U M E N T .
Ce livre est appelé par les Grecs Ecclésiàste , et par les Hébreu*
C oheleth, c’est-à-dire, Orateur, Prédicateur, ou celui qui assemble ou
qui instruit dans l'assemblée des peuples / et c’est sans doute dans le même
sens que l’auteur du trentième chapitre du Livre des Proverbes s’est surnommé,
v. i . Agur , qui signifie aussi, celui qui assemble et qui instruit*
L ’auteur de celui-ci prêche en effet contre la vanité des créatures, et contre
le néant des plaisirs , des honneurs , des richesses qui séduisent les homme*
en ce monde : c’est le néant qu’il assure y avoir éprouvé par sa propre expérience
: car après- avoir passé la plus grande partie de sa vie dans l’usage de
tout ce qu’il y a de plus grand, de plus agréable et de plus capable d’enchanter
les sens, et de satisfaire, s’il étoit possible, la cupidité du coeur de l’homme , il
avoue qu’après en avoir usé, il n’y a trouvé autre chose, sinon que de la vanité^
et de l’affliction d’esprit. C’est ce que cet auteur a uniquement intention d©
prouver, pour désabuser les hommes de l’estime qu’ils font de ces faux biens ,
et pour les- porter à en rechercher en Dieu de plus solides par une fidello
obéissance à sa loi et à ses- commandemens. Il montre aux hommes charnels et:
aux amateurs de ce monde, en répondant à leurs objections , que toutes les-
créatures, toutes les choses sensibles , tout ce qui concerne la vie présente r
et même leurs folles-pensées passent subtilement, s’anéantissent et se perdent
dans un oubli éternel ; mais qu’il viendra un temps où Dieu jugera les hommes v
et qu’alors tout sera ré e l, fixe , permanent et éternel.
Les anciens Juifs et les saints Pères n’ont point mis en doute que ce livre1
ne fut l’ouvrage de Salomon , quoiqu’il ne porte pas son nom, ainsi que celui
des Proverbes et du Cantique des Cantiques. Il s’est suffisamment nommé1
sous la qualité de fils de David et de roi de Jérusalem, et le portrait qu’il fait
de soi-même, chap. 1 , v. 1 , 12 , i 3 , 1 4 , 1 6 et 1 7 ,chapka, v. 1 ,4 ? 5 , jusque*
au v. n , chap. 7 , v. 24 , et chap. 12, v. 9 , dans lesquels il décrit ses différens-
états , la situation de son ame, les dispositions- de son coeur, sa ehûte ; et
même ses écrits le font assez reconnoître , et ne permettent pas qu’on puisse'
attribuer ce Livre àd’autres-qu’àce sage prince. Quelques termes ou expressions-
ehaldaïques qu’on remarque dans ce livre, ne prouvent autre chose , sinon
quelles y ont été glissées par ceux qui, depuis la cap tiv itéon t recueilli-ce*
divines écritures.-