lut me donner à dîner. L*intérïeur de sa
maison étoit propre et commode ; tout y an-
nonçoit l’aisance ; mais je n’y vis pas plus
de femmes que dans la maison d’un Musulman.
Le repas fut servi avec profusion : l’on
y but copieusement de l’excellente eau-de-
vie de dattes, donton offroit à chaque instant
dans des petits verres de crystal de Venise.
Au-surplus , la manière de prendre leurs
repas est la même que celle des Turcs et des
Arabes. L’on est assis, les jambes croisées,
autour d’une table à un pied , en forme de
grand plateau rond, sur lequel on pose les
plats saûs nappe , sans assiettes % sans couteaux
et sans fourchettes.. L ’on promène là
main droite sur les plats, dont on prend
successivement, et selon son goût, des pincées
avec ses doigts. La main gauche , destinée
aux ablutions j est impure*, et ne doit
pas toucher aux mets. Quelquefois on réunit
ce que l’on a pris d’un plat dans un autre ,
pour y former un mélange , une grosse boulette
, que l’on porte à,la bouché extrêmement
ouverte. Les volailles et les viandes bouillies
sont mises en pièces, et déchirées avec les
mains et les ongles. Les-viarides rôties se ser-
yept ep petits morceaux «coupés avant de les
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m e ttr e à la broche, et nulle part on ne mange
de meilleurs rôtis que dans les pays de Turquie*
La table n’est point une occasion de
discourir. L ’on ne s’y assied que pour manger
bien vite; l’on se presse, on avale avec
précipitation. Ce ne sont pas des hommes que
le plaisir de la socjété réunit, ce sont des
animàux que le besoin et la voracité rassemblent
autour de leur pâture. La graisse découle
de chaque côté de la bouche. L ’estomac
renvoie de fréquentes vapeurs que l’on prolonge
et que l’on rend les, plus bruyantes que
l’on peut. Celui dont la faim est appaisée se
lève le premier. Ce n’est-pas plus une impolitesse,
que de rester seul, à table si l’on a
encore appétit.
Pendant mon séjour | Siout, )e ne man-
quois pas d’aller aux bains pour lesquels
j’avois pris beaucoup de goût , et qui me
sembloient très-salutaires. Ces bains ne sont
ni si beaux , ni. si bien tenus qu’au Caire,
Outre les diifei entes maniérés de pétrir les
chairs , d’assouplir les membres et de frotter
le corps, les Sybarites de ces contrées se plaisent
beaucoup , dans leurs maisons, à se faire
frotter la plante des pièdsavec des morceaux
de pierre-ponce. Celle qui est la plus esti-
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