maladie de langueur l’accabloit; il voulut
m’avoir pour médecin. Il n’en manquoxt
pourtant pas ; car jren rencontrois souvent
chez lui, qu’il faisoit venir de tous côtés, et
dont il avoit la constance de prendre tous
les remedes l’un après l’autre, et quelquefois
en même temps.
L ’un de ces médecins lui faisoit mettre
sous son turban une dépouille de serpent,
préservatif et spécifique très-renommé en,
Egypte contire toute espèce de maux de
tete. L ’autre prescrivoit à son malade de
sortir à pied, et de marcher dans la. campagne
jusqu’à ce qu’il eût rencontré un
chiffon quelconque , qu’il devoit traîner,
avec son pied nu, jusqu’à la maison où il
falloit qu’il l’assemblât avec trois bûchettes
et un peu d’alun, et qu’il brûlât le tout ensemble,
pour en respirer la fumée. Un troisième
avoit promis à l’Aga de le guérir, dans
trois jours, du mal d’estomac dont il souffroit
beaucoup. Son traitement consistoit à frotter
et à comprimer très-durement l’estomac, ensuite
de le serrer fortement avec des bandes*
J’ai été témoin delà rési'gnatiop du malade à
souffrir cette fatigante opération ; mais Je médecin,
prudent, partit avant l’expiration des
trois jours qu’il avoit demandés pour la cure»
Au reste, cet Aga, trop crédule, me fut
d’un grand secours. L ’armée de Mourat
Bey, commandée par un Bey de sà maison, e t,
avec elle y la licence la plus effrénee , entia
à Manfeloià pendant le séjour que j’y fi?*
Au milieu de hordes de barbares superstitieux
et sans police, un Franc couroit de
grands risques. Par un de ces abus de la
lorceque les nations civilisées se permettent
par un de ees actes tyranniques, trop fre-
quens chez les hommes en état de guerre,
c’est-à-dire, en état de révolte contre la nature
et les principes de la sociabilité, je fus
obligé de céder la place à une troupe de
Mámeloucks^ qui vinrent s’établir dans mon
logement.: Omar jÀga , c’est le nom de mon»
malade, aussitôt qu’il fut informé de mon embarras,
fit transporter mes effets chez lui,, et
m’y logea avec empressement. Ce Turc étoit
vraiment un bon homme, mais superstitieux
à l’excès. Ce n’étoit pas assez pour liji de
consulter tous les charlatans de l’Egypte, il
avoit encore , toute la journée, à ses côtés ,
des prêtres qui lisoient des chapitres de 1’Alcorán,
ou qui récitoient des prières-*11 me
prenoit souvent envie dre rire, en voyant
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