tme croyance’ dont les effets né peuvent
manquer de leur être souvent funestes. Ils
sont persuadés que les crocodiles ( i ) , assez
connoisseurs pour distinguer le chrétien d’un
musulman , n’attaquent que le dernier' et
respectent le christicole. Us sont tellement
imbus de cette opinion, qu’ils se baignent
sans crainte dans les eaux du N il, où l’on
rencontre de ces grands et hideux lézards,
tandis que les Mahométans, dont la crédulité
les engage à convenir d’une prédilection
qui tient du miracle, n’osent s’y hasarder.
Je me souviens d’avoir lu quelque chose de
semblable dans le premier volume d’une
déscription dé l’Ethiopie occidentale. L ’auteur
assure que les chrétiens n’ont rien à
eraindre dés crocodiles , tandis qu’ils dévorent
beaucoup de nègres. La superstition a
par-tout le même langage, et ic i , les gens
sensés reeonnoîtront aussi celui des missions.
Dans les temps reculés, le crocodile éprou-
voit en Egypte un sort différent, suivant
( i ) Crocodile, ou le crocodile proprement dit. L a -
«epède, Hist. nat. des Quadrup. ovipares. — Lacerta
Crocodilus. L . — En Egypte, timsah , nom approchant
de celui de chctfnses 3 que le crocodile y portoit
anciennement.
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l’endroit où il se trouvoif. L à , il étoit
poursuivi avec fureur et égorgé sans pitié.
I c i , il faisoit l’objet de la vénération. Lés
habitans des environs de TÜèbes et du lac
Moeris, le regardoient comme un animal sacré.
Ils en choisisséient un qu’ils apprivoisoient;
on en prenoit le plus grand soin; sa nourriture
étoit prescrite et réglée par les livres
religieux; on le paroit de pendants d’oreilles
d’or ou de pierre factice, et d’espèces de
bracelets aux pieds de devant (1), atours
bien élégans poür un animal aussi laid.
Aujourd’hui, les crocodiles ne sont ni
attaqués ni révérés. On les laisse en paix
infecter Igg eaux du Nil de leur odeur de
musc , et lés dépléuper dé poissons. Relégués
dans la partie la plus méridionale de
l’Egypte, ils y sont fort nombreux. On les.
voit-au grand soleil, la tête hors de l’eâü ;
immobiles,' et ayant de loin l'apparence de
gros' morceaux de bois flottaus , être entraînés
doucement par le coûtant, et jouit
de la chaleur qu’ils aiment beaucoup. J’en
ai tirés plusieurs dans céttè situation, et dé
fort près , car n’étant pas ordinairement inquiétés
on poitvoit les approcher aisément'
(1) Hérodo te y à l’endroit cité , §. 69.