purger sa demeure d’une foule d’insectes,
dont il est tourmenté dans des pays où l’excès
de-la chaleur les rend plus multipliés et plus
importuns qu’ailleurs.
Par les soins (VOmar A g a , je fus bientôt
fen état de continuer mon voyage. L’on se
rappelle qu’en remontant le Nil, je vis à
"Manfelout une espèce de corvette qui ne
pouvoit naviguer que pendant la crue du
fleuve. Les eaux avoient acquis asséz de
hauteur ; l’on venoit d’achever son chargement,
et elle étoit sur le point de partir pour
le Caire. Ce grand bateau, que l’on appelait
Galioun ( vaisseau ), à cause de sa grandeur
et des sabords dont il étoit percé, pour y
placer des canons, pouvoit contenir une cargaison
considérable pour une riviere ; il avoit
à son bord deux mille cinq cents sacs de blé,
ou le poids, environ, de deux cents cinquante
tonneaux , outre une quantité de
ballots, envoyés .par des particuliers , cent
hommes au moins , et beaucoup de bétail.
Sur le derrière , on avoit pratiqué trois belles
chambres, dont l’une avoit plus d’etendue
que celle de la frégate VAtt(liante. Celle
de la poupe même étoit la plus agréable , et
c’est celle que l’Aga m’avoit fait réserver.
( 3 3 1 )
Je m’embarquai dans ce bâtiment le 24
août au soir. * Une quantité de demoiselles
(ï) , de couleur pourprée, voltigeoient
sur le bord du fleuve, tandis que des nuées
de cousins et datipules fatiguoient, à l’approche
de la nuit, de leur nombre ët de leurs
piqûres.
Toute la nuit le vent du nord fut impétueux
et froid. J’ai lu quelque part qu’aucun
vent ne se faisoit jamais sentir sur le Nil ;
c’est une erreur grave , car il y règne des
vents violens , qui deviennent souvent des
tempêtes et des ouragans dangereux pour la
navigation.
Le 25, à la pointe du jour, le bâtiment
fut mis au large ; mais ce ne fut pas pour un
long trajet : l’on s’arrêta encore, à deux cents
toises au - dessous de Manfelout, afin de
prendre à bord une quantité de buffles. Je
m’apperçus bientôt de l’extrême mal-adresse
de l’équipage dans la manoeuvre.Nous échouâmes
près de terre; et il fallut travailler , le
restant du jour et la nuit entière, pour remettre
le bateau à flot. Après cela, nous
descendîmes quelques pas au-dessous du
lieu de l’échouement, pour charger les buffles.
(1) Libellula. L .